MELOMANIA

C'est lundi, le jour que n'aimait pas Brenda Spencer. Et elle avait bien raison.

Le report/


Pizza et rencontres hasardeuses

J'aime bien la bouffe italienne. Et aussi faire des
rencontres pas prévues par Doodle.



La rencontre. Un dimanche après-midi comme les autres, je me balade avec ma douce dans une rue bondée du 10e arrondissement. Des odeurs de bouffe nous envahissent les nasaux, ça tombe bien on a la dalle : « on va où ? ». Après avoir bien tourné en rond, notre choix se porte sur une petite pizzeria italienne. Si elle ne paye pas de mine, elle renferme avec elle son lot de surprises.

Alors que je dévore à pleines-dents une pizza 4 fromages qui s'avère être sacrément bonne, un sexagénaire à chapeau s'agite à côté : « Hum, que bueno ! Ves hijo ! », rugit-il en regardant sa progéniture, avec ce ton enjoué et gouailleur que j'ai croisé plus d'une fois durant d'antiques pérégrinations barcelonaises. Le mec est content et tient à le faire savoir.
Toujours prompt à tailler le bout de gras avec mes congénères, je me tourne vers lui : « de donde eres, Papy ? ». Le mec vient du Brésil et fait visiter notre vieux continent à son gosse : « Après Paris, direction Amsterdam, Londres.. Il faut absolument qu'il connaisses ces endroits magnifiques ! ». Par le concours de bonnes vibes partagées, on en vient rapidement à parler musique, et il se trouve que le vieux à quelques histoires à raconter : «Regarde cette photo, c'est moi avec BB.King dans les 70's ! J'ai beaucoup tourné à l'époque, maintenant j'écris des chansons pour les autres ». Merde alors, ce mec n'est peut-être pas n'importe qui.


Toujours prompt à tailler le bout de gras avec mes congénères, je me tourne vers lui : « de donde eres, Papy ? »

S'il est manifestement rangé des brancards, il écrit encore aujourd'hui des trucs pour lui. L'art pour l'art. Et maintenant pour moi et la rue, au moyen d'une enceinte Bose. En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, un doux mélange de jazz, de samba et de bossa inonde l'espace du faubourg st-denis. Conquis par tant de douceur mélodieuse, je lui tape sur l'épaule : « Putain c'est vraiment cool, c'est toi qui chante ?! ». « Oui », me sourit-il avant de préciser : « c'est moi qui fait tout, texte, musique et voix », et de m'attraper par le bras : « passe moi ton mail, que je t'envoie la musique ! ».


« Le passé, c'est le passé ». Comme quoi y'a pas que SoundCloud, les potes et les communiqués de presse pour dénicher des nouveaux (bons) sons.. Y'a aussi la pizza.

En me repassant « Talento Master » bien installé dans mon canap', il est clair qu'il s'agit là de bonne musique. Et de singularité, en tout cas à mon humble avis : un concubinage astucieux entre un remuage de fesses sud-américain et des couleurs jazz, avec des guitares claires qui chialent et la voix hyper suave de Gerson qui se love là-dedans avec autant d'évidence qu'une clé dans la serrure.



Aucune info dans Google, rien dans les bacs de la Fnac : je décide de le contacter par mail pour savoir à qui j'ai affaire. Quand je lui demande de me raconter ses 70's, il tique : « le passé, c'est le passé ». OK, après avoir tourné ça dans tous les sens pour lui faire cracher le morceau, je me dis que le mystère fera l'affaire. Reusta, clochard, les deux ou pas du tout, nous n'en saurons rien. Reste ce « Talento Master » écrit pour lui et ses potes récemment, dont le professionnalisme laisse à penser qu'il a pu sortir quelques bons trucs, et boire des cocktails avec les plus grands.

« la voix hyper suave de Gerson qui se love là-dedans avec autant d'évidence qu'une clé dans la serrure »


Le lieu de l'action
Vodka-Orange et ventilateur. Je suis en route pour son appart', guitares et amplis en main, quand mon cellulaire sonne : « tu traverses le grand arche et c'est la 3e à gauche ». Je suis accueilli comme il se doit par le maître des lieux, qui me salue de la main depuis une fenêtre en hauteur: « Hola Maxime, ven ! ». Quelques instants plus tard, me voilà à taper le blues avec lui, qui joue sur ma Gibson Mélody Maker alors que j'apprivoise sa Godin : « elle a été faite pour moi il y a 35 ans ! Une des premières de la marque ! », me raconte-t-il avant qu'une voisine ne débarque dans notre champ de vision: « on descend en bas acheter de la vodka, ma belle ! », lance-t-il tout excité en l'attrapant par le bras. Affalé sur le lit avec un Iphone, le fils me regarde d'un air amusé : « c'est la 4e depuis le début du séjour ». Le vieux briscard n'a manifestement pas perdu la main. Une boussole réglée au poil qui semble afficher : « sex, drugs & rock'n'roll ». Et de me demander, une fois de retour : « sers-nous 4 verres de vodka-orange avec des glaçons ! ». Rapport à la chaleur suffocante qui s'est abattue sur la ville ces derniers jours, cet apéro improvisé du mardi soir me fait le même effet qu'un jambon-beurre après 3 jours de diète.

« Une boussole réglée au poil qui semble afficher : « sex, drugs & rock'n'roll » »

Émoussé par ce climat pourtant bien de chez lui, il demande à sa voisine de ramener un ventilo : « quel objet fantastique ! », avant de poser ses premiers pions : « demain soir, tu viens chez moi ma belle ? ». Qui fait mine de ne pas saisir la bête de drague pourtant lancée à vive allure : « pour quoi faire ? ». Et le vieux loup de viser droit dans le mille : « eh bien, pour me voir, moi ! », tout en la prenant dans ses bras. Cette fois, le maestro aux 3000 femmes (dixit l'intéressé) a du mal à saisir sa prise. Et la voisine de se remettre bien droite sur sa chaise, comme pour parer à de nouvelles attaques.

La parisienne..
Il tente alors une approche plus douce en misant sur ce qu'il sait faire de mieux, la musique: « écoutes celle-ci, c'est l'histoire d'un ménage à trois entre moi, le soleil et la lune », partouze poétique écrite par notre ami un poil mégalo, qui fredonne ensuite sa mélodie : « da di da dou di da dou.. ». Si elle apprécie, elle se semble pas prête pour autant à faire tomber le t-shirt aussi sec. Pas découragé pour un clou, Gerson passe à la suivante: « ça parle d'un home enfermé chez lui, au milieu d'une batterie d'objets technologiques ». J'opine du chef : « ouais, il ne vit plus vraiment... ». Ses grands yeux expressifs s'allument : « exactement, il a oublié ce qu'était la vraie vie ! ». Et moi de jouer aux Nelson Monfort d'opérette pour la belle, qui me sourit en retour. Pendant ce temps, le gamin observe ce qui est pour lui la routine avec un air amusé, le nez dans la technologie.. Et l'animal de lancer sa dernière flèche : « je veux te faire tomber avec ma musique, tu comprends ?! ». Pas évident de détendre une parisienne, mon pote : « non, vraiment, je vais rentrer ». Il voulait son cul, il a eût le ventilo', ce sont des choses qui arrivent.

« Si elle apprécie, elle se semble pas prête pour autant à faire tomber le t-shirt aussi sec »

Pour me prouver que son tableau de chasse légendaire n'est pas du flan, il me tend son smartphone. Des photos de jeunes femmes bien roulées de 35 ans max' s'affichent : « celle-ci c'était à Madrid ! ». Avant de se rassurer quant à son échec récent : « de toute façon, 37, c'est trop... ».

Un bel et sombre inconnu. S'il m'a dit qu'il ne faisait plus de concerts depuis une paye : « trop de stress », il est toujours d'attaque pour une petite jam'. Et Gerson d'envoyer une rythmique samba toute douce sur laquelle je pose des notes électriques. Après une énième impro de blues, ses 65 ans le rattrapent : « je m'allonge un moment, tu peux continuer à jouer ». Je sors alors quelques classiques : Dylan, Donovan, Cash, Stones, Yardbirds. « Ce mec est un juke-box vivant ! », lance-t-il à son fils. Ouais, en attendant, le mystère reste entier : mais qui est-tu Gerson Acha ?

« Il voulait son cul, il a eût le ventilo', ce sont des choses qui arrivent. »




C'est mercredi, le jour avant jeudi. Le combien ? On s'en branle.


La chronique/


Objet analysé :  Magnifique, de Ratatat


Un album MAGNIFIQUE (je sais c'est facile)



Pour la première fois de ma vie, j'ai eu ce CD gratos, envoyé gracieusement par le service de presse de Because à Gonzai, et je dois dire que ça fait plaisir. Si vous n'avez pas encore lu mes papiers foireux publiés par la presse musicale la moins chiante de France, c'est par là: http://gonzai.com/tame-impala-a-contre-currents/

Venons-en aux faits : Ratatat.. Comme tous les rejetons de ma génération, j'ai été bercé par Wild Cat, Loud Pipes et autres Gettysburg, sortis en 2006 sur ce qui reste comme leur grand œuvre, Classics (Cf à côté). Utilisation ostentatoire de matos électronique, esthétique pop bien marquée et cette façon si particulière de pondre des trucs qu'on croirait tout droit sortis de la BO d'un jeu-vidéo. Non, franchement, les mecs ont trouvé leur son, c'est assez sidérant. Et tout ça sans paroles, sans voix.. Pourquoi s'emmerder à écrire des textes que personne ne comprendra ? Les mecs ne sont pas là pour nous donner des leçons de morale avec des chansons engagés à la con et l'assument totalement. D'ailleurs, leurs titres de chansons (parce qu'il faut quand même des titres..) viennent de délires que eux seuls peuvent comprendre. Et que dire du nom de l'album : Magnifique ? 

Quand on sait qu'ils ont mit 5 ans à le torcher, on était en droit de craindre le pire. 5 ans, c'est long quand même.. Loin d'avoir tergiversé dans tous les sens pour nous pondre une merde, les gars ont tout simplement pris leur temps pour nous sortir un putain de disque, bien chiadé. Comparé à tous ces groupes qui se sentent obligés de sortir des trucs moyens tous les 6 mois (à part Ty Segall mais bon c'est pas la règle), la posture perfectionniste/jamais contents/On recommence façon Stanley Kubrick est plus que louable, et fonctionne à plein ici.

Toujours sans paroles mais avec (beaucoup) plus de guitares que sur leurs premiers, Ratatat réussit avec Magnifique le pari de sortir un album qui, pour une fois, n'usurpe pas le qualificatif d'« album ». C'est à dire un début (Intro), une fin (Outro) et de très bonnes variations entre mélancolie lancinante et pop lumineuse qui fait que l'écoute d'une seule traite est cette fois un vrai BONHEUR.

2 gros hipsters, il fallait le dire.
En dépit de leur délit de hipsterisme caractérisé, rapport à leur petit look bien soigné et leur petite vie bien rangée à Williamsburg, Ratatat réussit là un véritable tour de force artistique : de la putain de bonne pop. Le son jeu-vidéo est toujours là, qui vous fait vous sentir à la maison en 2 sec, avec en prime des gros solos de guitare assez inattendus il faut le dire, et quelques emprunts assez marrants à la musique classique (Intro).
On a beau cherché, il n'y a absolument rien à jeter. La construction des morceaux (ou songwriting) en montées/descentes/temps morts/explosions est parfaite. Pour moi l'album de l'année. Et c'est de pop dont il s'agit.. (je suis plutôt garage généralement)


Quand vous êtes en bad : Magnifique, Drift, I Will Return, Supreme (en-dessous)

Quand vous êtes au sommet : Abrasive, Pricks Of Brightness, Nightclub Amnesia.

Pour lancer la piste, cliquez sur la vidéo





C'est jeudi, le jour avant vendredi. Le combien ? On s'en branle



Le Report/





First Aid Kit : nouvelles reines de la country-folk

Le "kit de premiers soins" triomphe au Cabaret Sauvage

Dans les années 60/70, la folk et la country, c'était June Carter, Joan Baez, Judy Collins et Emmylou Harris. 4 grandes dames qui remplissaient les salles et résumaient parfaitement l'atmosphère d'une époque. Depuis, de l'eau a coulé sous les ponts et la folk de tomber en désuétude. Avant que de jeunes âmes ne décident de redonner ses lettres de noblesse à ce genre musical à l'aube du nouveau millénaire. Mumford & Sons et Fleet Foxes en tête, qui remplissent à nouveau les stades avec de simples grattes acoustiques. Ce cercle très fermé des folk-stars compte une nouvelle recrue : First Aid Kit.
"Queen of the Nothing" ? Les reines de la folk ouais.


Steeling Sheep : Raté!
21. Le temps des conneries. J'arrive pile à l'heure au Cabaret Sauvage, salle partiellement en bois bien dans son jus que je découvre pour la première fois. Et c'est une très bonne surprise. Après avoir fait grincé le vieux parquet du hall, j'atterris sur une grande terrasse en pierre pavée, attiré par des odeurs de bouffe. C'est vrai qu'il fait beau et chaud, et qu'on a tous envie d'un bon hot-dog. Et bien non: "Désolé mec, on vient juste vendre le dernier". De toute façon, je suis végé. Je repère ensuite une meuf' de Steeling Sheep, duo féminin anglais de folk-psyché, pour la faire courte :"j'ai adoré ton Dj-set bien planant au point éphémère, hâte de voir le live". Elle opine du chef: "Merci ! A tout à l'heure!". Deux petites marches à gravir et me voilà dans la grande pièce circulaire du Cabaret, toute de bois vêtue, surmontée d'un grand chapiteau et bordée de tablées façon far-west. Un grand saloon quoi. Impatient de voir cette première partie de choix. Une autre fois peut-être : "elles viennent juste de terminer!", me glisse une voix féminine. Quel con, la musicienne avait pourtant l'air honnête. J'ai encore du raconter des conneries..



21h15. Le triomphe des sœurs Soderbergh. Je suis sous le choc de voir à quel point First Aid Kit déplace les foules. Le grand saloon du Cabaret Sauvage est rempli comme un oeuf! J'ai du raté un épisode. Y'a 3 ans je les voyais jouer devant 20 personnes au Point-Éphémère. Elles défendaient alors un 2e album splendide, Lion's Roar, qui ne rencontrait qu'un succès confidentiel. Un objet culte qu'on se passe entre initiés fans de folk rétro. Mais là.. Il y a bien sûr les jeunes branchés et les mecs sapés en cowboys comme au début, mais pas que : je vois des familles, des vieux, des blacks, des asiatiques.. Pour la faire courte, la France Black-Blanc-Beur s'est rassemblée pour écouter de la country-folk. Le dernier et 3e album Stay Gold, qui lorgne dangereusement vers la pop, est manifestement passé par là. Des cabanes perdues au beau milieu de la forêt scandinave, elles sont passées dans une nouvelle dimension : des folk-stars. Et je dois dire que le grand saloon qu'est le Cabaret Sauvage, avec ses poutres en bois et son chapiteau en velours, est l'écrin parfait pour célébrer le triomphe de cette country-folk toute douce. 
Il est 21h est c'est bien les soeurs Soderbergh qui débarquent sur scène, attifées comme des nymphes grecques au moyen de longues tuniques d'une blancheur à faire pâlir d'envie Monsieur Propre. Et d'entamer pied au plancher (c'est le cas de le dire) une performance de haute volée qui va durer une grosse heure et demi.



Stay Gold : le tournant pop
21h30. Wanna running away ? Le premier morceau qu'elles envoient est Lion's Roar, sublime ballade vibrante qui nous vient du 2e album éponyme, interprété à la perfection. Leurs voix cristallines sont toujours d'une beauté renversante. Avant d'introduire la suivante: "this is a song about becoming someone else, and running away!". A croire que Klara veut déjà se barrer de la scène. Sa sœur fait ensuite étalage de son aisance langagière: "Bonjour, comment ça va? Je m'appelle Johanna", et de pousser le curseur un peu plus loin que les sempiternels basics: "je suis contente d'être avec vous ce soir. Nous allons maintenant vous jouer Stay Gold". Et d'interpréter le tube du dernier album éponyme suivi de très près par Master Pretender : deux morceaux qui reflètent très bien le tournant pop pris avec ce disque. Une alt-country pas non plus "commerciale" mais bien plus accessible, chantée par deux femmes qui sont devenues de vraies pros, et imposent désormais leur corps et leur timbre sur scène avec une vraie confiance. 

Et la jolie blonde Johanna de balancer nerveusement son buste d'avant en arrière, derrière un vieil orgue analogique (CF tof'). Avant de revenir à l'esprit plus artisanal du 2e album avec Blue, autre ballade vibrante sur laquelle l’aînée fait des miracles avec son antique gratte en bois qui accompagne les harmonies vocales du duo, prouesse vocale et marque de fabrique. On aura même droit au 1er LP, avec Our Own Pretty Ways : "c'est une des premières chansons qu'on a écrites, dans notre chambre, quand on avait entre 13 et 15 ans". Le bon vieux temps comme on dit, dans les 70's..". Le public pouffe avant de se prendre de la country à l'ancienne en pleine tronche : les sexagénaires en santiags et stetsons exultent. Pas pour longtemps, puisqu'elle enchaînent avec le calibré 3e album et Shattered & Hollow, dont les paroles nous rappellent que Klara Soderbergh n'a qu'une envie, se barrer : "Wanna get Out Of Here". Un élément de réponse psychanalytique à ces pulsions de départ incontrôlées ? Le "putain de succès" et ce qui va avec : surmenage, perte de repères, boisson.. Alors que Johanna qui était déjà bonne est encore plus bonne (que ta mère), Klara a troqué sa jolie petite bouille pour un visage bouffi et émacié. Comme il est bien évidemment impossible de se barrer maintenant, il va falloir trouver autre chose..





22h. Au coin du feu. Encore mieux que la cure thermale de remise en forme à l'île de ré, l'ambiance "soirée au coin du feu". En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, les deux sœurs obtiennent un silence religieux et interprètent, guitare/voix sans aucune amplification, Ghost Town: "pourquoi utiliser un micro?", rugissent-elles. L'émotion est palpable dans la salle, face à cette approche antique de la musique live. Tonnerre d'applaudissements face à cette (belle) prise de risque esthétique. Sans transition, elles rebranchent les instrus et rendent hommage à une grande dame de la country en reprenant le cultissime Jolene de Mrs Dolly Parton : une figure imposée à laquelle elles ne peuvent pas échapper, qui s'appelle "le respect des anciens". Un air de country-rock bienvenue et, comme d'hab', impeccablement troussé par Klara et Johanna. Qui comme vous vous en doute ne sont pas toutes seules sur scène. Il y a un batteur et un joueur de pedal-steel/mandoline au combien important pour le grain racé et country. Que les 2 soeurs remercient comme il se doit, en français et avec beaucoup d'amour. C'est même l'anniversaire du mandolinien, qui a droit à sa petite heure de gloire: "joyeux anniversaire, joyeux anniversaire..." chante le public tel un seul convive. Reconcentration immédiate pour Klara et Johanna qui se rappellent qu'on a payé un billet, et d'interpréter Heavens Knows du dernier album et Wolf du 2e Lion's Roar. Avant de conclure par un instrumental stoner-country endiablé, qui voir le batteur taper un solo interminable de derrière les fagots. On sent que les meufs aiment le côté brut et romantique de la country. Tombé de rideau.


Paul Simon
22h30. Pas un rappel de PD. Les gens en veulent encore et le font savoir, en tapant vigoureusement le plancher du pied durant 5 minutes. Avec une bonne partie munie de santiags à talonnettes, ça fait un boucan pas possible. Auquel First Aid Kit met fin en revenant rapidement sur les planches. Et cette fois, ça sera pas un rappel de PD: "on va vous jouer une chanson de Simon & Garfunkel", qu'elles introduisent en racontant une histoire marrante: "on a fait un live avec Paul Simon il y a 3 ans, on était très tendues.. C'est un homme d'une grande rigueur. Il est sympa mais tout petit! Un homme adorable". Et ce sera.. America, tube folk culte qui résume à lui seul l'esprit de toute une époque, celle des 70's. Après ce très bel hommage à ces grands mélodistes, les soeurs Soderbergh finissent de nous convaincre de leur génie avec deux sommets de leur répertoire, King Of The World et Emmylou, une chanson hommage aux grands de la country sublime, où une pedal-steel romantique vibre au beau milieu d'harmonies de compétition portées par les voix pures et cristallines de Klara et Johanna. Le passage de témoin s'est passé sans encombre. "Queen Of The Nothing", chante-elle sur King Of The World. Les nouvelles reines de la Folk ouais!




23h. Une parenthèse enchantée. Alors que les gens se pointent massivement vers la sortie, je croise un ami pigiste de R&F. Pas étonnant de le voir traîner par ici ce soir. Sur le quai du métro, un homme manifestement au bout du rouleau vomit tout son mal-être. Eric* me confie alors une anecdote amusante (ou pas) : "c'est marrant mais avant de venir j'ai vu deux gars s'envoyer des tatanes dans la gueule. Et là le mec qui gerbe devant nous.. Le concert de First Aid Kit c'était la Parenthèse Enchantée en fait!". 


*les prénoms ont été modifiés.



C'est lundi, le jour que n'aimait pas Brenda Spencer. Le combien ? On s'en branle




/Les « invisibles » de la 
musique/


>Mis à part les groupes, qui sont régulièrement à la une de l'actualité musicale, de nombreux individus dont on parle beaucoup moins se tuent à la tâche quotidiennement pour servir ce grand art fédérateur et populaire qu'est la musique. Patrons de salle, disquaires, directeurs de labels, etc. Nouvel invité, JR, fan de rock'n'roll comme toi et moi qui a poussé le curseur de la passion encore plus loin : il vend des disques.<












RIP Fargo Records Shop


Vouloir vendre des disques en 2015 relève presque de la folie. Comme vous ne le savez peut-être pas, des mecs pas très raisonnables se cassent encore le cul à commander des disques et à les ranger dans des bacs à la bonne odeur sylvestre. J'ai rencontré le jeune JR fin avril, dans le café qui jouxtait Fargo Records Shop. Je parle à l'imparfait car ce magasin de disques de très bon goût vient juste de mettre la clé sous la porte, comme en témoigne ce post facebookien du 29 mai dernier: "Pour des raisons personnelles, j'ai décidé de faire une pause et de cesser mon activité de disquaire. 15 ans de Fargo toujours à donf', ça fatigue.."Last but not least. Une interview en forme d'hommage à un objet culte en voie de disparition : le disque.


Salut mec. Tu peux te présenter rapidement ?

JR : Ouais salut je m'appelle JR, je vais sur mes 22 ans. Je suis arrivé à Paris il y a un mois pour bosser chez Fargo.

JR : 2e en partant de la gauche. Et bien entouré.
C'est quoi Fargo ?

JR : Fargo c'est un label spécialisé dans le rock américain, on peut même dire anglophone, il faut pas être raciste. Donc voilà, ça existe depuis 15 ans, le fondateur c'est Michel Pampelune. Et depuis 5 ans, pour faire vivre le label on a ouvert un magasin de disque.

D'accord, donc c'est d'abord un label ?

Tout à fait, depuis les années 2000, et le magasin a ouvert il y a 5 ans. Michel Pampelune a décidé de faire partager sa passion, et moi je suis arrivé il y a 1 mois pour l'aider quotidiennement au Fargo Records Store.



T'es arrivé il y a 1 mois seulement ?

Ouais, avant j'ai travaillé pendant un moment chez un disquaire à Biarritz, Jet Records.

Un disquaire un peu atypique si j'ai bien compris ?

Ouais, c'est le second plus gros stock de vinyle en France. Le premier a .. ben merci (je lui file une rasade de bière). Et l'idée c'était que, en fait dans les années 90 Jacob Boucaud le fondateur a remarqué que tout le monde foutait en l'air sa collection, et il s'est dit qu'il y avait un truc à faire. Il a récupéré un stock énorme gratuitement en se servant dans la rue.. A cette époque, tu trouvais vraiment des vinyles dans la rue !


"A cette époque, tu trouvais vraiment des vinyles dans la rue !"




Le déclin de l'acétate, quoi.

Ah ouais. Pour être clair, 0,4 % des médias (qui incluent dans leur grand ensemble les Cds, NDLR) vendus dans le monde étaient des vinyles.. Ce qui est très peu. C'est le milieu des années 90, la chute libre.



Et donc ce mec a eût une idée de dingue..

Ouais, il a récupéré un paquet énorme de vinyles dans la rue. A la fin des 90's il commence à vendre sur internet, ça était le premier vendeur de vinyle sur Ebay en 98, en 2002 sur Amazon.. Et aujourd'hui il se retrouve avec un stock de 300 000 disques dans un entrepôt à Biarritz. C'est colossal, et j'ai travaillé 3 ans là-bas.

Tu viens de Biarritz ?

Je suis né dans le nord, j'ai vécu 16 ans dans l'agglomération de Lille avant de descendre dans le pays-basque il y a 6 ans..

Sacré changement ! T'aimes bien voyager ?

J'ai pas beaucoup voyagé. J'ai été en angleterre énormément quand j'habitais à Lille..

Revenons à Biarritz. T'as vu le 1er concert de La Femme c'est ça ?

Ouais, j'ai vu 2 des membres actuels du groupe quand ils étaient en terminal. Leurs premiers concerts.. Ils vendaient leur 1er EP une bouchée de pain à l'époque ! On voyait ça on était une quinzaine au foyer à ce moment là, en se disant que c'était un énième groupe de lycée..


"J'ai vu deux mecs des futures La Femme jouer dans le foyer de mon lycée"


Parlons de la boutique Fargo. Votre créneau ?

Déjà c'est un disquaire de neuf. Parce que t'as deux types de disquaire, les antiquaires et les disquaires « de neuf ». On va aussi se lancer dans l'occasion bientôt.. Comme j'ai un peu d'expérience dans le milieu.

"Très rock, très très rock"
Un autre type de client..

Tout à fait. T'as les collectionneurs, les puristes de l'occasion, et puis t'as des gens qui préfèrent acheter neuf, découvrir des nouveaux groupes.. Deux publics très différents.

Et quel style de musique ?

Très Rock, très très Rock. Soit du neuf et des nouveaux groupes ou des grands classiques du Rock réédités : c'est le gros de notre collection. Mais on a aussi du hip-hop, de la soul, du jazz..


De façon plus précise : pas mal de garage, de psyché et d'americana ?

Ouais, ouais, absolument.

C'est ce qui fait votre singularité, votre identité ?

Ouais, et puis Fargo est très apprécié d'un certain public. Michel Pampelune a des accointances avec des labels très pointus comme Third Man Records, il se tient vraiment au courant de tout ce qui sort, il est à l'affût..

Un vrai passionné.

Ouais complètement. On a affaire à un gros gros passionné de la culture américaine. Il a été de très nombreuses fois aux États-Unis d'ailleurs..

On trouve quoi à Fargo qu'on trouve pas à la Fnac ?

Toutes les choses que la Fnac estime être destinées à un public pas assez nombreux. On s'adresse vraiment à tout type de clients, en proposant des trucs hyper indépendants que tu trouveras sûrement pas à la Fnac. Mende (un truc qu'il m'a fait écouté avant, NDLR) en est un exemple. On laisse notre chance a des artistes qui n'ont pas leur place à la Fnac.. Là-bas tu trouveras du Selah-Sue..
Ces gros bras de la Fnac seront les premiers à dire qu'ils sont les premiers sur les jeunes artistes, alors que les jeunes artistes sont connus grâce à des disquaires comme nous, qui les font découvrir, justement, alors que personne ne les connaît. (rires)


"La Fnac ? Ils vendent du Selah Sue quoi.."



Le disque que vous vendez le plus en ce moment ?

Là, c'est le nouveau Sufjan Stevens. Y'a une grosse attente sur ce disque et on a pu bénéficié d'une édition limitée réservée aux disquaires indépendants. On aime beaucoup ce genre d'attention de la part des labels qui ont bien remarqué que le retour du vinyle ne bénéficiait pas aux disquaires indépendants..


Et le disque que vous vendez le moins ?

Euh... (longue hésitation).

Comme on pouvait s'y attendre, il botte en touche, refusant d'entacher à tout jamais la réputation du groupe, et surtout de son disquaire où il vient juste d'être embauché.

La nouveauté la plus excitante ?

Le nouveau Alabama Shakes qui sortira pour le Record Store Day. (fête des disquaires indépendants inventé en 2009/10/11 par Jack White, NDLR)

Justement, venons-en. Tu trouves ça bien?


Euh, ouais forcément c'est un rendez-vous incontournable pour nous, c'est le genre d'initiative qui donne envie d'acheter des disques. Ce sera le premier pour moi, car c'est réservé aux disquaires « de neuf », et on m'a dit que ça serait « huge » ! 
Après, ça profite pas tant que ça aux disquaires, mais je pense que ça va être 
impressionnant.


"Dans les 70's, un disquaire on appelait ça un dealer"


Quelle est la clientèle de Fargo ?

Déjà, il y a forcément les habitués, comme Polo (sic), qui a été le 1er client de Fargo (rien que ça!, NDLR), un grand grand habitué, un gars très sympa et très attachant.. Il vient tout le temps dans le magasin.. (je lui offre une nouvelle gorgée de bière). Après on est là pour accueillir n'importe qui, l'idée du magasin étant de ne pas être du tout élitiste. On est prêt à consacrer du temps à n'importe quel client pour lui montrer comment marche une platine, par quel disque d'un artiste il faut commencer...
Toujours on est dans l'accueil, on fait en sorte que le client se sente bien, on lui offre des cafés, on met de l'encens dans le magasin.. On est accueillants et pas du tout élitistes, ce qui m'a plu quand j'ai débarqué ici chez Fargo. C'était important de retrouver ce côté chaleureux d'un disquaire, à savoir qu'un client se sent beaucoup mieux ici, à recevoir des conseils, à discuter un peu, plutôt que d'être livré à soi-même à la Fnac ou sur Amazon.

Un disquaire est un passionné..


Exactement, et on essaie de la transmettre, ce qui fait toujours plaisir au client. Qui nous apprend lui aussi des choses, quand il est plus calé sur un artiste que nous. Ce côté dialogue est vraiment important..

De façon plus générale, comment conçois-tu ton métier de disquaire en 2015 ? Passeur ?

J'aimerais que ça reste un terme comme ça l'était dans les 70's : un disquaire on appelait ça un « dealer »..

AHAHAH.

"on arrive avec notre petite barque.."
Les mecs la musique c'est leur drogue, et nous on est là on deale.. On leur deale ce qui leur fait plaisir, on leur deale les nouvelles choses, on leur fait découvrir des trucs.. Disquaire pour moi c'est ça : la musique c'est un océan énorme plongé dans le noir, et nous on arrive avec notre petite barque et notre petite lanterne, on ramasse le mec dans l'eau..


AHAHAH.

Et on lui dit : « bah tiens je vais te guider où il faut t'inquiètes. On va te filer un coup de main ! ». Un disquaire ça doit être quelqu'un avec sa petite lanterne qui éclaire les néophytes comme les passionnés.




"On arrive avec notre petite barque, notre petite lanterne et on ramasse le mec dans l'eau.."


Un concert qui t'a marqué dernièrement ?

Euh.. (il a du en faire beaucoup, NDLR), je dirais Steven Wilson à l'Olympia. C'était marquant et un peu décevant à la fois. Comme c'est très progressif et très symphonique, t'en prends plein la gueule durant 1h30. Après il a pas fait d'improvisations et s'en est tenu à l'album, ce qui est assez dommage pour un artiste prog', quand on sait que ces mecs font souvent des instrus assez longues en live. C'est un artiste exceptionnel donc je lui pardonne..

Un concert que tu vas faire ?

Mikal Cronin (le gratteux de Ty Segall, NDLR), au mois de mai à La Maroquinerie. Ça sera très bien je pense.

Au vu de la situation calamiteuse de l'industrie du disque, t'as pas peur que le magasin ferme dans les prochain mois ? (là ça devient vraiment prophétique)

Non.. Les ventes de disques depuis 5 ans ont augmenté de 900 %, je te parle des ventes de vinyles. Pourtant t'as pas l'air de voir ça chez les disquaires parce que c'est tout simplement invisible, donc euh.. L'avenir pour les disques avec la crise de l'industrie du disque, je le vois assez radieux. Dans les années 90 les disquaires existaient toujours et s'adressaient à un monde de collectionneurs. Les vinyles se sont jamais arrêtés définitivement, il y a toujours eût un public de niche. C'est encore le cas aujourd'hui, ce qui assure toujours une petite base financière. Avec le retour du vinyle, je me fais pas trop de souci...



Tu restes optimiste, donc.

Complétement.

Tu fais de la musique ?

Je me suis essayé à la guitare. J'ai vite arrêté.







"L'avenir du disque je le vois assez radieux"


Pourquoi ?

J'y arrive pas, je suis pas assez patient. Ouais, pas grand-chose, à part un peu de flûte au collège.

C'est comment une journée type à Fargo Records ?

Quand on arrive à 10h on prépare le magasin et on fait le ménage avant l'ouverture à 11h. Si on a un peu de temps on s'occupe du label aussi, on s'occupe de la promotion de nos artistes. On range les bacs, on s'occupe de l'inventaire (l'arrivée des nouveaux disques, NDLR) : vraiment, il s'agit de préparer le tremplin avant le grand plongeon ! Après les clients arrivent et on s'occupe d'eux toute la journée, jusqu'à 19h !

Généralement t'as pas le temps de te faire chier ça va ?

Non, impossible. Ça continue même après le boulot. Les horaires que j'ai ici sont complètement différentes de celles que j'avais dans les autres disquaires. Comme ici y'a le label en plus, on a vraiment pas le temps de rien faire.. Mais bon c'est une passion !
J'ai des journées énormes de 10h à 19h30, sans pause déjeuner. Si je vais chercher un pepsi je reviens direct' au magasin.

Les musiciens les plus cools que t'ai rencontrés ?

Les Lords Of Altamont, dont je m'occupe de la tournée en France. On s'occupe de leur image en tant que label parce qu'en plus ce sont des amis de Michel. On a pas produit leurs derniers disques mais on s'occupe de leur tournée. Ca m'a permit de faire la connaissance de Jake Cavaliere (lead singer, NDLR) et des autres ; ce sont des gens hyper sympas, hyper méritants. Ce gars est un des mecs les plus cools que j'ai rencontré, ah ouais !

JAKE CAVALIERE
Une histoire marrante à raconter sur ces gars ?

Hum, alors.. Je peux pas tout dire.. Ouais, alors, un truc hyper marrant avec Jake : quand tu le vois sur scène il fait le ouf' avec ses lunettes noires, avant de revenir dans les loges, de mettre ses lunettes de vue et de regarder ses mails.

HAHAHAHAH.







"Jake Cavaliere : il fait le ouf" sur scène avec ses lunettes noires avant de revenir dans les loges, de mettre ses lunettes de vue et de regarder ses mails"


Fargo Records Store avait sa boite aux lettres dans une rue animée du 11e . Dans une petite pièce où le rock'n'roll résonnait à pleins tubes toute la journée, des passionnés essayaient de relever un défi qui ressemble de plus en plus à une folie : vendre des disques. RIP Fargo Records Store.





C'est dimanche, le jour du seigneur. Le combien ? On s'en branle


Le report/       




Crédit Photo : Laura Haddad
Jacco Gardner  Le live

Manifestement remis de notre beuverie, l'orfèvre pop batave
a donné un concert honorable. Sans trembler.



18h30. Les retrouvailles. A peine arrivé devant le Point-Ephémère, Jacco s'avance vers moi, le sourire aux lèvres. Il n'a pas oublié: "Hey Maxime! How are you?!". Un mec comme toi et moi, qui porte la même veste en daim verte depuis 3 semaines. Il fait beau, il fait chaud, la soirée s'annonce sous les meilleurs hospices. Il me raconte, satisfait, le début de sa tournée: "on était en Allemagne hier. Une super ambiance!", avant de se barrer: "a tout à l'heure!". Plusieurs inconnus me congratulent pour mon article: "c'est toi l'article sur Jacco qui a vomi? Génial mec, j'ai bien ri!". N'en faites pas trop, j'ai dit... Le mec de Fargo est encore là, toujours prompt à déconner: "mec, t'as vu son van? Il manque un C à Jacco, et puis c'est d'un kitsch..". Comme quoi, le génie musical n'empêche pas d'avoir des goûts de chiotte pour le reste.. La jeune blonde pimpante de l'autre fois est là aussi, prête à dégainer son Iphone pour graver dans le marbre des souvenir impérissables. Blonde, pas exactement: "Je suis pas blonde, je suis châtain clair!!". Mea Culpa.

Le mec de Fargo : "t'as vu son van? Il manque un C à Jacco, et puis c'est d'un kitsch.."

CP : Laura Haddad
21h. La jouissance auditive. La salle est comble, ce qui me fait encore plus plaisir que d'habitude, car, ce soir, je connais (un peu) le mec sur scène. Non seulement je suis fan de sa musique (ma place est achetée depuis janvier), mais en plus je sais que le type est attachant, suite à notre nuit endiablée. Du coup, quand je le vois monter sur scène, suivi de près par ses musiciens, j'ai un pincement au cœur. "Vas-y mon vieux, tu vas tout déchirer", me dis-je.

CP : Laura Haddad
Accompagné par le backing-band qui le suit depuis le début, Jacco livre une très bonne prestation, sans accroc et sans trop de répit. Il a fait du chemin depuis ses premières scènes calamiteuses. Je suis ravi. C'est pas une bête de scène (c'est pas un groupe punk, hein) mais il fait le job', exécutant avec application le meilleur de Cabinet Of Curosities : Clear The Air, Ballad Of Little Jane, Where Will You Go... Le public est ravi, les esprits divaguant gentiment à l'écoute de cette pop baroque et psychédélique de premier choix. On a droit a quelques titres de Hypnophobia, qui sort demain, dont le magique et efficace Find Yourself, tube potentiel à la mélodie entêtante. Du bon boulot, Jacco.




Le public est ravi, les esprits divaguant gentiment à l'écoute de cette pop baroque et psychédélique de premier choix.

CP : Laura Haddad

 Malgré sa timidité, il tente de pousser le curseur un peu plus loin que les simples remerciements, jouant même ouvertement la drague: "ça fait longtemps que j'étais pas revenu, et ça me fait plaisir, je me sens comme chez moi ici!". Leur égo flatté, les spectateurs exultent. Après s'être prêté au jeu du traditionnel rappel, il quitte la petite scène, visiblement comblé.




23h. Deuxième soirée avec Gardner. A peine le temps de récupérer de son show, Jacco se retrouve entouré par des vautours qui l'assaillent de questions. Alors qu'il tente de répondre à 4 personnes en même temps, il attrape un joint en plein vol', avant de le faire tourner. De la bonne came. Sont présents ma photographe attitrée, Laura, un pisse-copie de Rock & Folk et le mec de Fargo, toujours dans les bons coups. Une étrange bouteille de rhum arrangé me tombe entre les mains. J'en bois une gorgée, ça réchauffe. Avant de lui demander: "mec, pourquoi t'as pas joué Watching The Moon, elle est magnifique!". Du tac-o-tac, il m'explique: "j'ai plus envie, tout simplement. Elle date du tout début, j'ai changé depuis..". Au moins c'est clair. 

Alors qu'il drague deux jeunes parisiennes, je m'interpose: "Jacco, on va dans un bar?!". Après avoir convaincu ses musiciens, tout ce petit monde se retrouve dans la ligne 5, direction Oberkampf. Je fais écouter un inédit de Gardner, Mixed Feelings, au type de R&F : il hoche la tête en signe d'approbation.

Alors qu'il drague deux jeunes parisiennes, je m'interpose: "Jacco, on va dans un bar?!"


01h. De retour au Pop'in. Le tenancier n'en revient pas de revoir débarquer dans son troquet Mr Gardner. Tournée de bières pour tout le monde, direction l'étage, et le piano. On est 15, c'est le bordel. On s'entend pas, c'était mieux la première fois, en petit comité. Je trouve quand même le temps de faire un duo au piano avec le batteur de Jacco. Des trucs de Blues, et Sympathy For The Devil. Les filles, bon public, font les chœurs. Pendant ce temps, Gardner discute dans l'obscurité avec le mec de Fargo : chercherait-il à le ramener dans son escarcelle?
Après beaucoup de bières et de mots pour rien, on se tire, le bar ferme. Direction la rue Oberkampf où, selon moi, "il y a forcément un endroit d'ouvert!"


03h. Ce n'est qu'un au revoir. Tout ce petit monde me suit, en quête d'un nouvel endroit. Je dois leur inspirer confiance: "on va au Gibus, ça doit fermer à 5h!". Quelle ne fut pas leur déception quand, enfin arrivé dans le club de la rue Saint-Maur après 20 minutes d'une bonne marche, on eût droit à un cordial "On ferme" en guise d'accueil. Des regards accusateurs se tournent vers moi. "Il doit y avoir une erreur, ce quartier fourmille de bars et de clubs!", me justifie-je maladroitement. On tombe finalement  sur un bar, rue moret. A l'intérieur, ça boit et ça danse, beaucoup, sur une musique douteuse. C'en est trop pour Jacco, qui tranche froidement: "J'ai pas envie d'aller là-dedans. On rentre". Après avoir salué les copains et Mr Gardner, je monte sur mon skate, direction les Grands-Boulevards, avec l'intime conviction que je le reverrai. En attendant, il me reste la moitié de Paris à traverser, dans le froid d'une nuit printanière.





 C'en est trop pour Jacco, qui tranche froidement: "J'ai pas envie d'aller là-dedans. On rentre"


SORTIE OFFICIELLE HYPNOPHOBIA : DEMAIN LES COPAINS



C'est mardi, 2 jours avant jeudi. Le combien ? On s'en branle.



L'interview/






JACCO GARDNER

« La musique ? La seule chose que je sais faire »


A la faveur de la présentation de son nouveau disque Hypnophobia dans les locaux du disquaire Fargo Records, j'ai rencontré l'orfèvre pop batave Jacco Gardner, avant de passer une soirée épique en sa compagnie. Multi-instrumentiste, compositeur et producteur de génie, il écrit des comptines psychédéliques inspirées de la pop baroque de la fin des années 60, que l'on savoure en cachette telles de délicieuses gourmandises. Autour d'une bière (et d'une table), il nous raconte la genèse de ce nouvel album, ses débuts scéniques calamiteux, et nous explique pourquoi il fait de la musique. C'est vrai ça, pourquoi ?



Un Blog qui s'écoute : Peux-tu te présenter rapidement ?

HOORN, son chez-lui.
Jacco Gardner : Qui je suis ? Hum.. (il hésite), je suis Jacco Gardner, je viens des Pays-Bas, et plus précisément d'une petite bourgade, Hoorn. C'est une ville très ancienne, avec beaucoup d'histoire. Elle fait partie des 3 villes de mon pays, avec Amsterdam et Rotterdam, où les gros bateaux arrivaient, à l'époque. Du coup, de nombreux objets et animaux délirants, venus du monde entier, débarquaient dans notre petit village. Ce qu'on retrouve dans les musées aujourd'hui, et que je trouve toujours aussi passionnant. Certains sont vraiment bizarres..

Est-ce une source d'inspiration pour ta musique?

Jacco : Oui, tout à fait, c'est là d'où je viens, tu sais..


Combien de temps ça t'as pris pour faire ce nouveau disque ?

Jacco : A peu près 1 an. J'ai écrit certaines chansons en tournée, avec un petit synthé que j'emmène partout avec moi. Je me suis ensuite enfermé dans mon home-studio, où j'ai composé d'autres morceaux avant de travailler sérieusement à l'enregistrement. Et tout ça tout seul ! Sauf pour la batterie : je fais appel à quelqu'un d'autre par ce que je ne suis pas assez bon. C'est bien le seul instrument.. (rires)

"Hypnophobia est bien meilleur que le 1er album!"


Cet album est-il meilleur que Cabinet Of Curiosities ?

Jacco : Oui, il est bien meilleur ! Tu sais, après le premier album, j'ai beaucoup tourné, un petit succès auquel je ne m'attendais vraiment pas.. A l'époque, tout ce que je voulais c'était enregistrer les chansons que j'avais en tête depuis un moment, mais de là à faire autant de concerts.. J'ai passé près d'1 an sur la route mec ! Et en rentrant j'ai senti qu'on attendait de moi un nouvel album, alors que j'ai pas eu une minute à moi, pour réellement travailler, durant la tournée. Mais au final, le résultat est plutôt bon.


De quoi parle Hypnophobia ?

Jacco : Ça parle de mes problèmes d'insomnie, récurrents depuis la tournée et l'arrivée de ce succès inattendu.. Et, dans mon cas, on appelle ça l'« hypnophobie » : c'est quand t’arrive pas à dormir alors même que t'es couché et fatigué. T'as peur de t'endormir, d'être "hypnotisé", et ça te fout une angoisse pas possible..


Quels effets utilises-tu le plus ?

Jacco : Les effets les plus utilisés dans la musique psychédélique, c'est à dire le Delay et la Reverb. Aussi un peu d’Écho.. Je ne suis pas très original sur ce coup là..

Pourquoi tu fais de la musique ?

Jacco : J'ai une facilité pour ça.. C'est une des seules choses que je sais faire d'ailleurs. Je sens que je dois le faire, c'est une intuition profonde, alors je me laisse guider.. Et j'aime toujours autant ça, les notes viennent de façon si naturelle.

"La musique ? La seule chose que je sais faire!"


Tu te lèves et tu prends ta guitare ?

Gardner en studio
Jacco : Non, c'est pas trop mon style.. Je compose uniquement dans mon studio, entouré de tous mes instruments et de mon matériel d'enregistrement. Le reste du temps, je fais beaucoup d'autres choses: préparer les « light-shows » pour les concerts, voir les gens du label.. C'est beaucoup de travail, et de temps passé sur des choses qui, au final, n'ont rien à voir avec la musique. 80% de ce que je fais au quotidien ne me plaît pas vraiment, mais c'est comme ça.. Il reste quand même 20% pour la musique !



Tu préfères le studio ou la scène ?

Jacco : Je préfère le studio, je suis plus un producteur et un compositeur qu'un « musicien-performeur », tu sais. J'aime les concerts, mais je me sens bien mieux en studio. J'étais hyper stressé avant mes premiers concerts..

A en vomir ?

Jacco : (rires) Non, pas à ce point là, mais j'étais vraiment nerveux. Comme c'est moi qui fais tout en studio, j'ai trop de choses à gérer en même temps sur scène, même si j'ai des musiciens qui m'accompagnent. Au minimum deux claviers, et la voix.. C'était pas évident au début de reproduire ma musique en live. Maintenant, ça va beaucoup mieux, je connais les chansons sur le bout des doigts, comme je les ai écrites.. Avec l'expérience de la tournée, je suis beaucoup moins nerveux avant de monter sur scène. Quelle que soit l'estrade sur laquelle tu montes, les gens attendent une performance, c'est pas facile au début.

T'aimerais reprendre Syd Barrett sur un album ?

Syd Barrett
Jacco : Peut-être un jour, mais pas maintenant. Je préfère me concentrer sur mes compositions. Comme toi, et comme beaucoup de gens, j'apprécie la musique de Syd Barrett, mais ce n'est pas mon « maître absolu » comme les journalistes passent leur temps à le répéter. Il n'est même plus sur ma playlist..


"Syd Barrett n'est pas mon maître absolu"


Qu'y a-t-il donc sur cette playlist ?

Jacco : Des petits groupes canadiens qui font de la musique électronique, une formation appelée « Zodiac », beaucoup de choses électro en fait..

Et des trucs français aussi ?

Jacco : J'aime beaucoup un mec qui s'appelle François de Roubaix, un très bon compositeur. Des groupes de pop « cinématographique », j'adore les sons « cinématographiques », et aussi d'autres musiciens/producteurs/compositeurs (comme lui !, NDLR) qui jouent pleins d'instruments et font tout par eux-mêmes. Il y en a de très bons chez vous..


Tu arrives à vivre de ta musique ?

Jacco : Ouais.. Avec tous les concerts que j'ai fait, je peux juste payer mon loyer et ma bouffe tu sais.. En tout cas c'est pas en vendant des disques.



Une drogue préférée ?


Jacco : J'aime bien fumer du cannabis, et prendre des champignons h********** de temps en temps. Par contre, j'ai horreur de la cigarette..


"J'ai horreur de la cigarette"


Jacco Gardner était en concert mercredi dernier au Point Ephémère, vous l'avez raté.. J'y étais, c'était bien, il a joué Ballad Of Little Jane, Clear The Air et Find Yourself sans trember, malgré la morgue du public parigot. Son album sort le 4 mai.




C'est jeudi, le jour des jedis. Le combien ? On s'en branle.



Le reportage/







La boum de Bloum au Badaboum


Bloum : « Merci à tous pour hier c'était vraiment magique !!! ».







Bloum, collectif électro-pop dont j'ai vanté les mérites il y a peu, donnait un concert multi-sensoriel jeudi au Badaboum. J'y étais, je vous raconte.


Vous allez rencontrer un bel et sombre inconnu, W.Allen
20h. La recherche. J'ai 2 places gratos pour le concert mais toutes mes copines m'ont fait faux-bond. Elles ne savent pas ce qu'elles ratent, les bougres. Conscient qu'il est inconcevable de gâcher un ticket d'entrée pour une si belle expérience, je ratisse le quartier à la recherche de l'âme sœur d'un soir. Je ne vais voir que les jolies filles (pardon), aux yeux bleus, en étant on ne peut plus clair : « Ca te dit d'aller voir Bloum avec moi ? ». Après plusieurs échecs, je tombe sur Alice, élégante jeune femme aux yeux bleus translucides. Banco : « Sérieux, t'as une place gratos ?! Trop cool ! ». Mission accomplie, let's go dancing.


« Ca te dit d'aller voir Bloum avec moi ? »




21h. L'extase sensorielle. Pour rappel : Bloum est un collectif passé maître dans l'art de la fusion entre la froideur de la musique techno et la chaleur d'instruments organiques, entre douceur et agressivité, groove et refrains vaporeux. Des nappes synthétiques, des lignes de basse qui te transpercent et un collectif de voix éthérées qui t'ordonnent de te laisser aller : « This is a Long Trip [...] Let Yourself Be Free ! ». Une techno-pop chiadée, hypnotique à souhait, incontestablement faite pour le Live. D'autant plus qu'ils s'accompagnent, pour la performance, d'un sax ténor. On est gâtés.

En moins de temps qu'il n'en faut pour le dire, je perds le contact avec la réalité, et vibre intensément à l'écoute de Faith, On The Moon, et autres trips sensoriels à paraître très bientôt sur un nouvel EP. Je plane, avec Alice à mes côtés, mes yeux se perdant dans des images de routes sans fin, projetées en vidéo derrière le band. Les yeux et les oreilles : une expérience multi-sensorielle, car comme je ne vous l'ai pas encore précisé, Bloum, c'est aussi des vidéastes. Une expérience artistique totale, envoyée par des mecs qui sentent l'application et l'envie de bien faire à plein nez. Les spectateurs du Badaboum, rempli bien comme il faut, ne s'y trompent pas et ondulent langoureusement, perdant le contrôle de leurs jambes qui n'en font désormais qu'à leur tête. Que c'est bon. Je me tourne vers Alice, elle me sourit béatement, emportée qu'elle est dans ce tourbillon de chaleur et douceur.


           "Je me tourne vers Alice, elle me sourit béatement, emportée                          qu'elle est dans ce tourbillon de chaleur et de douceur"




22h. Les sourires. Bloum revient pour un rappel, dans un brouhaha de mains qui claquent et de jeunes adultes qui gueulent. L'être humain est ainsi fait qu'il en veut toujours plus, face à la qualité. Cette ovation bien méritée ne laisse pas les musicos indifférents : un grand sourire se dessine sur le visage du chanteur/flûtiste/bidouilleur. Alors que les dernières nappes de sons s'évanouissent, les applaudissements fusent à nouveau. Le concert est fini. Émus et pas hyper à cheval sur la communication, les 6 Bloum gueulent des « Merci Beaucoup ! ! »  dans les micros, qui, on le sent, viennent du fond du cœur. Ça fait plaisir de voir des gens (vraiment) heureux.



22h30. Les rencontres. Comme c'est la boum de Bloum, tous les copains ont été invités. Je croise un mec de chez Animal Records, le petit label qui les produit avec amour, sur la lune. Avant de tomber sur les mecs de Stand Wise, duo électronique récemment signé chez Animal Records qui ne va, à mon avis, pas tarder à exploser. Ils me racontent, le sourire aux lèvres, l'histoire de leur récente ascension: « Quelques blogs ont parlé de nous à la fin de l'an dernier, suivi d'un bon bouche à oreille. On s'y attendait vraiment pas. Barth (Boss à la coule de chez Animal R, NDLR) nous a repéré comme ça.. Ca nous fait super plaisir d'arriver dans cette maison ! ». Un Ep arrive bientôt : à suivre !
Il est maintenant l'heure de féliciter le guitariste de Bloum, au combien indispensable à l'alchimie du groupe, avec ses solos à la David Gilmour. Un mec simple et attachant, qui, avant de repartir dans sa petite Renault, me remercie, ému :«Ah c'est toi ! J'ai halluciné en tombant sur ton article, quelle histoire! Ça nous a fait super plaisir en tout cas». N'en faites pas trop les gars, quand même.


Stand Wise : "Ca nous fait super plaisir d'arriver chez Animal Records"




Stand Wise : "bon on va s'enjailler ailleurs ?"
23h30. L' ascenseur émotionnel. Le Dj set qui suit, envoyé par « La French », est tout pourri. Pardon, hein, mais là, c'est trop pour un seul homme : ils réussissent la prouesse de passer les pires morceaux de notre temps en l'espace de quelques minutes, avec Get Lucky, Blurred Lines.. Non mais sérieux ? Après avoir fait illusion sur la piste de danse pendant 5 minutes, je vais m'asseoir sur le côté, piqué au vif. Un mec de Stand Wise se désole: « Badaboum, c'était bien au début. Maintenant c'est trop de la merde ». L'attaque, frontale, fait mouche. Avant de sortir une idée de son chapeau : « viens on va juste devant le Dj et on croise les bras, en mode boss du game». Aussitôt dit, aussitôt fait : le mec tombe dans le panneau et croise lui aussi les bras, au 1er degré. Ça rigole sévère dans les chaumières. Avant de conclure : « bon on va s'enjailler » aillleurs ? ». Adieu Badaboum, et à très vite, BLOUM.



Un mec de Stand Wise se désole: « Badaboum, c'était bien au début. Maintenant c'est trop de la merde ».


Bloum : https://soundcloud.com/search?q=bloum (Nouvel EP Bientôt!)

Stand Wise : https://soundcloud.com/standwise (1er EP Bientôt!)

Si vous aussi vous voulez vivre une expérience artistique multi-sensorielle inoubliable, RDV le 30 mai prochain à Paris !



C'est mercredi, le 18 mars



La chronique/


L'EP en question

Le hasard fait parfois bien les choses.



Chaleur. Au beau milieu d'une après-midi flottante, un mercredi du côté du canal st-martin. Il fait beau, il fait chaud, les bières sont sur la table, et les premières gouttes de sueur de l'année perlent sur nos jeunes fronts de vingtenaires romantiques.

Naviguant à vue à l'intérieur du Point-Ephémère, je tombe par hasard sur un CD égaré dans le coin aux flyers. L'artwork, une tête de sphinx blanche sur fond noir, me laisse songeur. Et le nom des groupes, Bloum/Backbone, m'est tout aussi familier que le dernier album de Demis Roussos. 

Mystère. De retour dans mon réduit, je me précipite sur mon bon vieux lecteur CD 90's, impatient de savoir quels sons se cachent derrière cet objet quadri-dimensionnel énigmatique.

"This is a long trip, I've got what you need"

Je lance la première piste, "Faith" (le clip, bien barré, ci-contre), et là c'est la claque. Douce pulse électro, ligne de basse bien lourde, quelques notes de guitares qui se fondent parfaitement dans cette nappe digitale, et des voix éthérées qui nous ordonnent de nous laisser aller : "This is a long trip, I've got what you need [...] Time to let's go, let yourself be free". Ça colle parfaitement avec cette électro-pop planante, hyper bien produite et efficace, qui plonge l'auditeur dans une douce transe. Le refrain, maelstrom de voix et de chœurs qui fusent au beau milieu de sons électros bien violents, porte le coup final. Mais que c'est bon. 
Le reste de l'EP, qui contient 6 titres, 3 de Bloum et 3 de Backbone, est dans cette même veine électro-pop chiadée, plutôt noire, froide et hypnotique. "On the Moon", la plus pop et légère de l'album, vous emmènera très loin, précisément jusqu'à la lune, avec son refrain velouté et imparable.

Motivation. Et tout ça grâce à un petit label parisien, Animal Records, l'oeuvre de jeunes gus qui ont la motivation chevillée au corps, quand on connaît l'état désastreux du secteur. Le hasard fait parfois bien les choses.


Partez sur la lune, tout de suite.

Bloum en concert immanquable le 21 mars à Paris.
Où ça ? Surprise...





C'est mardi, le 10 mars


Eclairage enfumé/


Dj set/Live set : Kesako ?


Comme on entend beaucoup de conneries à ce sujet, je suis allé voir Antoine*, un jeune Dj parisien qui nous explique, en bref, le pourquoi du comment. Tout ça en mixant sur ses platines, dans un nuage de fumée qui sent pas vraiment la rose. Si il réussit à être assez clair, vous allez enfin comprendre ce que signifient ces quelques lettres qui envahissent les affiches de concert et vous paraissent aussi intelligibles que des hiéroglyphes.

Tu peux te présenter, rapidement ?


Antoine : Ouais, je suis signé sur un label, mon 1er EP sort ce moi-ci. Un truc assez chelou, plutôt techno, mais je sais même pas comment le décrire, au final. 

Garnier, Dj-set
C'est quoi un Dj-set ?

T'as deux types de Dj-set, le plus courant étant celui avec des vinyles. T 'as 2 platines, une table de mixage, et tu passes des morceaux déjà enregistrées en essayant de les faire cohabiter de la meilleure manière possible.





Jaar, Live-set
Et un Live-set ?

C'est quand tu utilises « Abbleton » ou des logiciels similaires, ce qui s'apparente à peu de chose près à la MAO (Musique Assistée par Ordinateur, NDLR), mais adaptée à la performance live. Ils ont des contrôleurs, et ils lancent des « loops » (boucles, NDLR) de « kicks » (frappes, NDLR), en ajoutant progressivement des sons par dessus. Tu crées vraiment un truc, en direct. C'est pas vraiment de l'impro, les boucles sont préparées à l'avance, mais c'est tout. Le reste, c'est une pure performance live.

La principale différence entre les deux ?

Pour résumer, certains utilisent des disques déjà faits et les autres font des sons qui ne sortiront jamais, juste là pour le concert. Une performance, qui peut durer des heures. Regarde là, (il me montre ses platines), je mets un vinyle sur la première platine, un sur la 2e, et je règle le son avec ma table de mixage pour que le rendu soit le plus cool possible. C'est un Dj-set. A l'inverse si je prends mon ordi, un pad, et que je lance des boucles préparées à l'avance sur mon PC, c'est un Live-Set. Ça peut être des boucles de 4 sec, d'1mn30, ou plus..


*Les prénoms ont été modifiés



C'est vendredi, le 23 janvier




Le Grand Entretien/



Star Horse, épisode 3/





« Ne sois-pas un     trou-du-cul ! »



Comme toutes les bonnes choses ont une fin, même les plus savoureuses, il est temps de clore ce Grand Entretien en compagnie de nos amis suédois de Star Horse, réalisé je le rappelle durant l'été à Stockholm, et dont les deux premières parties ont été respectivement mises en ligne début novembre et début décembre.
Fêtes de fin d'année en forme de cuite monumentale oblige, cette dernière partie arrive un peu plus tard que prévu. L'humain d'abord, comme dirait l'autre.
Retour sur les lieux de la rencontre. Après avoir discuté de leurs influences, de leur identité musicale, du sens de leurs textes, de leurs plus grosses déconvenues avec la bouteille et de tout un tas d'autres sujets aussi passionnants qu'un livre de Valérie Trierweiller, on en vient maintenant aux Vraies questions. De celles qui vous font relever la tête alors que vous étiez imprescriptiblement sur le point de délaisser cette page pour vous mater un bon film sur Netflix. Toujours confortablement lové dans un canapé local (merci Ikéa), dans un petit studio niché dans la partie septentrionale de la modeste capitale scandinave, je tente de conserver l'attention de mes interlocuteurs, qui commencent à sérieusement piquer du nez après 40 minutes passées à essayer de répondre à un français s'exprimant au moyen d'un anglais approximatif. En discutant de philosophie, de leurs villes préférées pour faire la fête, du pouvoir de la musique ou encore du sens de la vie. Sans oublier un passage obligé par la question incontournable des groupies..
Last and Least. Magnéto !


UBQS : Quelle chanson préférez-vous jouer sur scène?

Andreas (guitare/chant): Hum, parmi nos chansons tu veux dire ? (rires)

"J'adore ce film"
Sam (batterie): J'adore les reprises !

Maja (guitare/chant): Pour mois c'est une reprise aussi. On joue souvent une chansons des Parapluies de Cherbourg, j'adore ce film !

Sam : Oui, il s'agit de I will wait for you, une très bonne chanson. Concernant nos chansons, j'aime bien jouer Trampoline en live.


Andreas : Ouais, j'aime aussi jouer Trampoline en live, cette chanson possède une vraie densité sonore, ce qu'on appelle le « mur du son » (technique d'amplification inventée par Phil Spector dans les sixties, NDLR). Et elle a une bonne dynamique, partant d'une introduction plutôt douce avant d'exploser quand vient le refrain, ça procure de très bonnes sensations sur scène.

Sam : Ouais elle est très agréable à jouer sur scène, même si elle ne fait même pas partie de notre répertoire « officiel ». Si on a déjà publié 15 chansons sur plusieurs Ep's, Trampoline n'en fait pas partie. Parmi ces 15 là, celle que j'aime le plus juer sur scène est Don't Get Closer, j'adore cette chanson, avec cette batterie très « grungy »

Croyez-vous encore que la musique peut changer le monde, tel que certains ont pu le revendiquer dans les 60's?

Sam : Non.

Andreas : hum... (fous-rires). Ca peut changer la vie des individus, mais pas tout une société. Ou bien je ne m'en rends pas compte..

Sam : Bien sûr que c'est possible! (ironique)

Un groupe de dream-pop en pleine action


Stas (Basse): Je pense pas que ça se soit déjà produit. La musique peut toucher le cœur, l'âme, le cerveau des hommes, mais changer la société.. Le monde est constitué d'individus, un conglomérat de cerveaux et d'arbres.

Sam : La musique est d'avantage un miroir de la société, une sorte de snapchat de l'état du monde à un instant « t ». Mais je ne pense pas qu'elle puisse « changer » la société..

Du coup c'était naif de penser ça à cette époque?

Sam : Hum, je sais même pas si à un moment donné certaines personnes ont véritablement pu revendiquer une telle chose. Je suis d'accord avec Stas, la musique ne peut rien changer, elle ne fait que refléter nos états d'âme.

Votre ville fétiche pour faire la fête, en Europe ?

Sam : Pourquoi uniquement l'Europe ? J'aime aussi faire la fête avec des Cds américains !

Non, je veux dire ville!

Sam : Ah, ok, j'avais compris Cds ! (en anglais, City/Cds, avec mon accent de merde français, NDLR)

Andreas : Mes meilleurs souvenirs sont à Stockholm. Mais je n'ai pas encore vécu ma nuit « complétement dingue » !

Les meilleures fêtes ? A la maison, à Stockholm.
Maja : J'aime bien les bars de Berlin.


Sam : J'ai passé du bon temps au Royaume-uni. A York, Londres et Dublin tout particulièrement.

Stas : Berlin est cool c'est sûr, mais ce que j'aime le plus reste les fêtes à la maison, parce que ce qui compte avant tout, c'est les gens avec qui tu fais la fête.

Du coup, vos habitudes à Stockholm ?

Sam : Les parcs et aussi ce pub génial qui s'appelle le « key karaoke », c'est un bar à karaoké de style japonais, original et très sympa.

C'est l'heure des questions débiles : vous avez combien de groupies ?

Sam : On en a tous au moins une.

Andreas : J'en ai une qui s'appelle Maja (sa copine, NDLR), c'est amplement suffisant. Sinon, je dirais qu'on se « groupit »* les uns les autres !

*Du verbe « se groupier », 1er groupe : je groupie, tu groupies, il groupit, etc.


Seconde question débile: pourquoi faites-vous de la musique ?

Sam : Parce que je m'éclate. Même si c'est quand même assez ridicule, quand on y pense.

Maja : J'ai commencé à faire de la musique parce ma vie manquait de quelque chose, et aussi parce que je recherchais une musique qui n'existait pas. J'ai donc décidé d'essayer de la créer..

"La musique donne un sens à ma vie"



Andreas : La musique donne un certain sens à ma vie. Je ne suis pas un musicien à plein temps, j'ai un boulot normal, mais quand je rentre à la maison je suis un artiste. C'est important de créer, de ne pas être juste une machine. Tu sais c'est aussi pour casser le train-train quotidien du « métro-boulot-télé-dodo et rebelote »



Maja : J'aime bien avoir un groupe parce que ces mecs sont obligés d'être mes amis !

Sam : En fait, la batterie est mon seul exercice ! Et j'adore le côté création, le fait que j'utilise des parties de mon corps pour faire sortir des sons, ça paraît tellement insensé ! C'est un peu stupide, d'un côté, et un peu anodin, mais ça m'apporte énormément de choses : du sens, de la stabilité, de la sécurité, et en plus j'adore ça. C'est le « rêve qui devient réalité » comme on dit !
Le simple fait de zoner avec ces gus et faire des blagues pourries me procure un plaisir indescriptible. Après il y a la musique et tout le « blablabla » qui va avec, mais c'est pas le plus important...

Stas : Je suis d'accord avec tout ce qui a été dit, je n'ai rien d'original à ajouter.

C'est maintenant l'heure des questions sérieuses..

Sam : Ohh.. On a déjà répondu à tes questions débiles avec un certain sérieux !

Andreas : Je vais devoir y aller bientôt..

T'inquiètes mec, c'est bientôt la fin !

Du coup, quel(s) philosophe(s) aimez-vous ?

Sam : (soupir) Aucun.

Stas : Nietzche et Dostoievski sont les seuls auteurs qui m'aient véritablement enseigné quelque chose. Mais pour quelques génies, combien d'imposteurs qui ne font qu'envelopper des tunnels de connerie dans des formulations ultra complexes, sur des centaines de pages, pour au final ne retenir qu'une seule et maigre idée ?
Du coup, pour élever mon esprit, je préfère parfois m'en tenir au roman : un auteur de littérature peut tout aussi bien faire accéder le lecteur à une sorte de spiritualité, de vérité profonde.
Néanmoins, certains philosophes sont incontournables : Platon, Sartre ou encore Camus ont écrit certains des chapitres de philosophie les plus puissants qu'il m'ait été donné de lire.

Bukowski, un philosophe ?


Andreas : J'ai pour habitude de piocher des idées chez différents auteurs. Comme Stas le disait, certains romans contiennent des parties très philosophiques, qui te font réfléchir sur la condition humaine. On apprend beaucoup de choses en lisant un bon Bukowski, par exemple.. Je ne saurais l'expliquer, mais..

Stas, lui coupant la parole: Attends, t'es en train de dire que Bukowski faisait de la philosophie ?!

Andreas : Ouais mec, derrière ses histoires de déglingue apparemment banales, ses livres ont souvent un sens bien plus profond. Un truc qui revient souvent chez lui est : « n'essaye pas », ce truc du mec qui ne fait jamais les choses jusqu'au bout. Un comportement qui peut se révéler très dangereux. En musique, par exemple, ça peut être une vraie catastrophe..

Sam : Pour moi il n'y a aucun philosophe qui mérite qu'on s'y intéresse. Mais si, sous la torture, je devais en choisir un, je sauverais Judith Butler. C'est une américaine, féministe et queer, et qui a développé des théories sur le genre absolument passionnantes. Et aussi certains concepts sur sa façon d'appréhender le monde. Même si c'est pas de la philo', je considère ça comme fondamental.
Tu sais, je ne veux surtout pas perdre mon temps avec des trou-du-cul grecs chiants comme la pluie qui ont théorisé des trucs il y a plus de 2000 ans... Pour moi, c'est hors de propos.

Andreas : Alors là je te suis pas.. Essayes au moins de lire des philosophes contemporains, ils sont à l'évidence plus pertinents..

Ok, préparez-vous pour la prochaine question sérieuse..


Quel est le sens de la vie ?

Sam : Ohhhh.. (soupirs)

Maja : Quoi ? (Avec un fort tremolo dans la voix)

Andreas, le plus brave : Je pense que le sens de la vie est...

Maja, coupant la parole à son chérie : c'est l'amour !

Andreas : Ouais, l'amour d'accord, mais le plus important, je pense, c'est trouver une façon de vivre qui te rende heureux. Et il n'y a pas de recette miracle. Maja a certainement une vision des choses différente de la mienne. Et aussi, je pense que l'argent n'est pas si important. J'ai un job pour ça, mais ce qui me rend le plus heureux, c'est la musique.

Maja : Le fait de ressentir beaucoup d'émotions est très important.

"Ne sois-pas un putain de trou-du-cul !"
Sam : Pour moi, le sens de la vie c'est d'abord de ne pas se comporter comme un trou du cul. Parce qu'en soi, la vie n'a aucun sens, je fais partie des gens qui sont persuadés qu'après tout ça, il n'y a absolument rien. J'aimerais bien mais ça n'est pas le cas. C'est notre seul occasion de briller, ici et maintenant. Ceci étant entendu, la seule loi que je défendrai toujours corps et âme est celle-ci : « ne sois-pas un putain de trou-du-cul !

Andreas : Un truc important, aussi, c'est de pas faire attention à ceux qui essayent de t'expliquer comment tu devrais mener ta barque.. Si tu t'y retrouves, c'est bien le plus important.

Sam : Et célèbre l'amour mec, autant que tu peux, c'est tellement magique. Sois amoureux de ta vie, aimes ton prochain et aimes toute chose. Et ne sois-pas un trou-du-cul !

L'interview se transforme soudain en un brouhaha indescriptible, si bien qu'il  devient alors impossible de distinguer le moindre sens. Il est grand temps de clore cet entretien !

Et toi Stas ?

Maja : d****!!

Vous étudiez/avez un petit boulot à côté?

Andreas : J'ai fait une école de commerce. Mais je me vois vraiment pas comme un homme d'affaire. Je suis un musicien. Mais je garde ce boulot, ça me permet de payer mes factures.

Sam : Pour citer ce cher Jay-Z, « he's not a business man, he's a business, man ! ». Je suis professeur de musique et d'anglais, j'ai eu mon diplôme au printemps.

Bravo mec!

Sam : Ouais, merci !

"Je ne sais pas pourquoi je fais ce que je
suis en train de faire !"
Maja : Je suis étudiante en école d'art à Stockholm, en 2e année.

Stas : Je bosse comme freelance à la télé', du coup je fais des choses assez variées, en fonction des projets qui me tombent dessus..

T'as étudié avant?

Stas : Ah non. Et je ne sais absolument pas pourquoi je fais ce que je suis en train de faire. Mais je le fais.*


(Rires)

*Traduit du suédois à l'anglais par un petit chinois non rétribué.




C'est vendredi, le 19 décembre



La Chronique/





ANIMALI : Psyché' Made In France


Animali est une des nouveautés les plus réjouissantes du moment, que je me dois sans attendre de propager sur les internets. Je suis tombé sur eux un peu par hasard, alors que je traînais ma carcasse du côté de Ménilmontant. Dans l'obscurité d'une banale soirée parisienne, je décide de rentrer dans ce bar à concert bien connu de la rue Moret, quand soudain, la lumière surgit, sous forme de cure de jouvence psychédélique.
Après une première partie anecdotique vite oubliée, je décolle instantanément quand les mecs d'Animali commencent à envoyer la sauce. Une pop psychédélique Made In France ultra-référencée, et vraiment bien troussée par 5 gus originaires de Lyon. Quoi ? Ouais, moi non plus je savais pas, mais visiblement ils font de la bonne musique sur ce territoire étroit coincée entre deux massifs montagneux. Les quelques chanceux qui assistent au concert, dans un Inter' moins rempli que d'hab', sont rapidement happés par le son efficace et vaporeux des lyonnais. Un trentenaire à lunettes au blouson de cuir auburn me fait à ce propos bien marrer : il lance des "Oh Yeahhh" toutes les 2 minutes avec ce ton excessif très 'ricain, pour bien signifier son approbation.

Les mecs en Live : un must.
Venons-en aux faits. Durant un set envoûtant qui ne dure (malheureusement) qu'une demi-heure, la faute à un répertoire encore anorexique, je reconnais quelques influences évidentes. La pop psychédélique de Tame Impala, rapport aux nappes atmosphériques de synthé, à des mélodies éthérées ainsi qu'à ce savant mélange entre une basse groovy et des sons drogués. L'ombre des Pink Floyd plane aussi sur certaines chansons, surtout une, dont l'intro' évoque de façon troublante l'incipit instrumental du cultissime Shine On Your Crazy Diamond. Ils convoquent aussi dans ce bal hallucinogène les Daft Punk, de façon beaucoup plus surprenante, via 15 secondes de vocalises trafiquées à la manière du duo casqué.
Merci pour ce moment !


De retour dans la chaleur de mon réduit parisien, je peux enfin mettre des noms sur des sons. Et pour cause, leur premier Ep au titre à rallonge, "The Spark and Three Other Poorly-Produced Pieces of Music", a été publié en mars chez "Gourmets Recordingz", label indé' basé dans l'ancienne capitale des Gaules.

L'EP en question, à l'artwork bien barré.
La réécoute des 4 titres confirme mes intuitions. Tame Impala, ouais, à fond, sur toutes les chansons. Pink Floyd, dans une moindre mesure, exclusivement sur la bien nommée "The Spark (Rick Was Wrigt)", longue rêverie de 10 minutes et hommage direct aux flamands roses, et à son claviériste émérite Rick Wright décédé en 2009. Quand au clin d’œil aux Daft', il se niche sur "Who", via une partie de chant bidouillée à coups de vocoder, suivie au passage d'un solo de synthétiseur renversant.
Si les influences sont incontestables, le projet psychédélique d'Animali réussit à éviter brillamment le piège de la redite en créant des atmosphères qui lui sont propres. Assurément l'une des bonnes claques de cette fin d'année, à déposer sans plus attendre au pied du sapin.
Les 4 chansons de ce mini-disque sont toutes vraiment bien foutues, tant et si bien qu'il est assez dur d'en isoler une. Puisqu'il le faut, je vous conseille "Who", petit bijou de psychédélisme pop qui n'a absolument aucun rapport avec le groupe culte britton. Avec ou sans drogue, un bon trip vous est garanti.

"Who", Live.


Vous voulez les voir en concert ?
C'est mort, ils viennent tout juste de finir une tournée spartiate entamée cet été.

Facebook : https://www.facebook.com/animalitheband
SoundClound : https://soundcloud.com/gourmetsrecordingz/animali-the-alchemists
Bandcamp : http://animali.bandcamp.com/ :une nouvelle compo' y a été ajoutée aujourd'hui, vous tombez bien !





C'est samedi, le 06 décembre



Le Grand Entretien/


Star Horse, épisode 2/



'The show must go wrong'



Toujours en compagnie des amicaux et cultivés Star Horse, qui ratissent actuellement le nord du continent pour leur première grosse tournée, entre la norvège, la suède et l'allemagne. Bien installé dans mon canapé en cuir, je continue ma petite exploration de l'imaginaire du groupe shoegaze, entre questions sur la musique et l'art, interrogations philosophiques et disgressions de caniveau, histoire de relâcher quelque peu la pression. Sur les murs du studio/salle de répét', qu'ils partagent avec d'autres groupes de la scène locale, des affiches de concerts et des portraits de figures de la scène rock de Stockholm. Sur la table basse, des paquets de chips, du vin blanc, et des cendriers qui débordent.
Si la luminosité est désormais en train de baisser sur la capitale suédoise, la vigueur du propos, elle, ne faiblit pas. Accros du format EP (court album, NDLR), les Star Horse en ont sorti un 4e tout récemment. Moins bruitiste qu'à leurs débuts, ils s'orientent désormais vers une dream-pop mélancolique et rêveuse. Un doux remède à vos troubles du sommeil.
Mais bordel, une question me chatouille les neurones : pourquoi l'enregistrement de ce disque a-t-il pris autant de temps, les amis ? La réponse maintenant, en tout bien tout honneur.



Vous avez sorti des chansons récemment?

L'EP en question
Andreas : Ouais, on a enregistré et auto-publié un EP de 5 chansons entre mai et juin, et on va en enregistrer 2 autres à la fin du mois d'août.

Combien de temps ça vous a prit pour réaliser cet EP ?

Sam : Comment oses-tu poser cette question !

Maja : Ca a prit à peu près 1 an..

Andreas : Ouais, mais notre premier bassiste s'est barré, et tu sais, même si tout était plus ou moins fini depuis longtemps, on a pas mal procrastiné : “je suis pas chaud pour chanter aujourd'hui, si on remettait ça à la semaine prochaine ?”.

Maja : Comme on fait tous d'autres choses à côté, on ne peut pas se retrouver tous les jours pour jouer.

Sam : C'est sûr. Par contre je me rappelle d'une session où on a grave assuré. Si mes souvenirs sont bons, on a enregistré 17 chansons en à peine 9h30 ! C'était dingue, et en plus je ne connaissais pas très bien mes parties de batterie. J'ai donc improvisé au dernier moment.

Des labels vous ont contacté ?

Andreas : Pas vraiment. Il y en a bien eût quelques uns mais ils n'étaient vraiment pas sérieux..

Sam : Ouais, c'était des sacré branleurs. Si tu ne reçois pas une offre digne de ce nom, c'est pas utile d'y donner suite.

Du coup, comme beaucoup de groupes, vous faites tout vous-même ?

Andreas : Exact. Mais on perd de l'argent en procédant de la sorte. (rires)

Maja : On apprend sur le tas, et on s'y prend de mieux en mieux.

Sam : Ouais, jusqu'à maintenant on fait tout nous-même : publication, communication, etc. On s'est fait un bon petit réseau, sans aucun label. Si une boite peut le faire mieux que nous, pourquoi pas. A l'heure actuelle, on en a pas besoin.

Andreas : Il y a un mec qui nous a un peu aidé, un mec de Glasgow, pour la promotion et d'autres trucs.. Il est vraiment bon, et il prend aucune commission. Avec lui, c'est une “appréciation mutuelle” (référence à “Mutual Appreciation” film mumblecore qu'on a maté ensemble, NDLR)

Comment êtes-vous sur scène ?

Maja : Je suis timide, je ne parle pas. (attitude caractéristique du groupe shoegaze, NDLR)

Sam : Je ne peux pas parler. Je bouge. Je remue mon corps jusque dans ses moindres recoins.


Andreas (ci-contre) : Avant de monter sur scène, je suis plutôt timide, mais après 3 ou 4 chansons, je prends confiance. C'est moi qui parle au public entre chaque chanson. Mais tu sais, on n'est pas le groupe qui débarque et enchaine les blagues...

Sam : Je crois que Stas est celui qui s'éclate le plus sur scène (même si durant l'itw, c'est lui le plus sage, NDLR). Il bouge beaucoup, sautillant d'un côté à l'autre. Il y prend énormément de plaisir.
Sinon, je me rappelle d'un concert super marrant. On était tous torchés, parce qu'on jouait super tard, à 00h30.. On carburait au vin, en faisant tourner des bouteilles sur scène, et ma batterie n'arrêtait pas de tomber. Du coup, je la remets comme il faut, mais à chaque chanson tout se casse la gueule à nouveau.. On s'est vraiment bien marrés ce soir là. En accord avec le dicton : “the show must go wrong !” 

Andreas : C'était un mélange entre désastre et fun. Le son était à chier, on entendait pas ce qu'on faisait, il faisait noir et tout le monde était bourré, le public aussi. Pourquoi avoir joué 12 chansons ? C'était beaucoup trop pour un groupe comme nous..

Un livre qui vous a marqué ?

Maja : Je n'aime pas lire.

Andreas : J'aime bien Factotum de Charles Bukowski (récit des errances alcoolisées et sexuelles d'un “loser” aux 4 coins de l'amérique, NDLR), avec son esprit de road-trip.

BUKOWSKI
Stas : Je suis en train de lire L'Être et le Néant de Sartre, c'est comme un défi pour moi : 600 pages sur sa philosophie existentialiste. Pour le moment, c'est très intéressant. Aussi, n'importe quel livre de Dostoievski est un vrai must : tu trouves des choses nouvelles à chaque fois.

Sam : Autant Animal Farms et 1984 de Georges Orwell, car j'adore la S-F, que Moins que Zéro de Bret-Easton Ellis, qui pose un regard cinglant sur ces jeunes fils de bonne famillequi se détruisent dans le drogue, le sexe et d'autres vice. Sinon, tu savais que 1984 est inspiré d'un roman suédois ? Héhé !

Vous avez joué dans d'autres groupes ?

Maja : Oui.

Sam : Ouais, j'ai joué dans 5 groupes sérieux depuis mes 11 ans : skate-punk, punk-pop, pop, ska : j'ai fait un bon tour du propriétaire.

"un groupe inspiré par les Libertines"
Andreas : J'ai eu un vrai groupe avant, on était vachement inspirés par le rock anglais, les Libertines surtout.

Stas : Ouais, j'ai eu des groupes de punk-rock et d'autres trucs vachement “power-chords”(technique de guitare popularisée par Pete Towshend dans les 60's et réactivée par Nirvana au début des 90's, NDLR), depuis mes 11 ans. Je me suis aussi égaré quelque temps dans un rôle de singer-songwriter folk, mais c'était pas pour moi..

Que pensez-vous de l'actuelle situation politique en Suède ?

Maja : C'est en train de s'améliorer.

Extrême-droite suédoise
Sam : Je suis pas aussi optimiste. L'extrême-droite est de plus en plus populaire (ils on fait une percée spectaculaire aux dernières élections, NDLR), ce qui assez flippant pour quelqu'un comme moi, qui est noir. Les idées de gauche sont de plus en plus marginalisées. Ses sympathisants sont presque vus comme des extrémistes aujourd'hui, c'est ridicule. Il n'est pas rare que j'entende des gens comparer les féministes aux néo-nazis : c'est une énorme contradiction !

Andreas : En tant que musicien, mon ambition est d'être apolitique. Je ne veux aucun lien entre ce groupe et la chose publique.

Sam : Je suis totalement d'accord ! La politique et la musique sont absolument incompatibles.

Du coup, ils parlent de quoi vos textes ?

Maja : Beaucoup d'amour, et de rêves.

Andreas : Ouais, en gros c'est ça. Avec Maja, on s'inspire de nos vies pour écrire les paroles, dans un style assez rêveur.

"Beaucoup d'amour et de rêves"
Rien de réaliste quoi.

Sam : Au contraire, c'est très réaliste. N'importe qui peut se reconnaître dans nos textes, puisque ça parle d'amour.

Stas, tu veux ajouter quelque chose ?

Maja : Ça m'étonnerait, il sait même pas de quoi parlent les chansons ! (rires)

Votre meilleur souvenir de LIVE ?

Maja : Hum, aucun en particulier..

Sam : Hum..Quand on a joué pour cette espèce d'organisation à Stockholm, le “Fight Club”, qui marche comme un jeu-vidéo : tu commences tout en bas, et ensuite tu passes au niveau suivant. Si tu réussis à ramener plein de monde à ton concert, t'as toutes les chances de passer à l'échelon supérieur, et ainsi de jouer dans une plus grande salle. Du coup pour notre tout premier concert, au niveau le plus bas, on a invité tous nos potes, la salle était remplie. Impressionnés, les gars du Fight-Club ont programmé le concert suivant dans une salle plus grande, annonçant 500 spectateurs.
C'était vraiment bizarre, l'affiche était trustée par des groupes de glam-rock et, au final, il n'y avait pas grand monde. Une vingtaine de courageux qui se battaient en duel dans cette si grande salle.. A se tordre de rire. 


Stas : Pour moi, c'est surement le dernier concert qu'on a fait. Quand je suis arrivé sur scène, je me suis rendu compte que j'avais perdu mon médiator, et j'en avais pris qu'un seul ce coup là. J'étais vraiment mal. Après quelque chansons je l'ai finalement retrouvé : il était juste en face de moi.. J'étais si défoncé que je n'avais rien vu. (rires)


Andreas : Ouais, le 24 mai, un super souvenir. On était en tête d'affiche cette fois-ci, du coup pendant que les premiers groupes jouaient, on était au bar en train de picoler et de les regarder, en attendant notre tour.

Quels effets utilisez-vous ?

"le plus important, c'est la Reverb"
Sam : Je crois qu'elle est pour toi celle-ci, Andreas !

Andreas (lead guitar) : Le plus important, c'est la Reverb (rires). J'utilise aussi beaucoup le Chorus et le Delay. Et un peu d'Overdrive. C'est mon top 4 ! Depuis que Stas nous a rejoint, on utilise vachement le Chorus, il ne jure que par ça.

Stas (bass player) : Ouais, le Chorus c'est la vie. Avec un peu de Distortion de temps en temps. Les basiques en fait.




Vous écoutez des groupes français ?

Sam : J'aime beaucoup Nouvelle Vague et Manu Chao. Daft Punk aussi, et tout ce qui est publié par Ed Banger Records.

"Pocket Symphony : mon album de chevet"
Stas : Le groupe Air est pas mal. J'aime aussi la pop française des 60's, comme Françoise Hardy.

Sam : J'adoooore Air aussi ! Pocket Symphony est un de mes albums de chevet. M83 aussi.. Je me rends compte que j'aime beaucoup votre musique !


Andreas : La musique française ne m'intéresse pas plus que ça.. J'aime bien Phoenix, et certaines chansons de Gainsbourg aussi, comme Couleur Café









C'est jeudi, le 06 novembre


Le Grand Entretien/

Star Horse, 1er épisode/


« J'ai voulu faire un check à un train »

Star Horse : Stas, Andreas, Sam et Maja


Début août, en Scandinavie. Un des étés les plus chauds de l'histoire de la suède. Les locaux découvrent la chaleur avec un mélange de joie et d'irritation.
Quelques jours avant un premier concert dans une des salles les plus réputées de Stockholm, les Star Horse, jeune gens modernes adeptes de Twin Peaks et des chansons d'amour de Christopher Owen, m'ont gracieusement invité à leur répét'. Déjà entendu sur le net', je découvre in situ des chansons au charme et à la qualité évidentes.
Bien calés dans mon canapé, les oreilles encore sifflantes, je peux commencer mon interview. Une rencontre passionnante qui s'étale au delà de l'heure, les quatre suédois se confiant allégrement sur des sujets aussi divers que leur musique, le stop, la politique, la philosophie et l'addiction aux chips barbecue.
Si vous trouvez certaines réponses un peu courtes, rappelez-vous que les gens du nord ne sont pas les plus prompts à tailler le bout de gras durant des heures. Ce qui ne les empêche pas d'être des gens adorables.


Comment définiriez-vous votre musique?

Sam (Batterie, synthés) : Putain mec..
Maja (Guitare, chant) : Dream Pop, peut-être ?
Sam : Ouais, je dirais dream-pop aussi, c'est la seule étiquette qui me convienne.
Andreas (Guitare, chant): C'est très dur à expliquer..Je dirais plutôt shoegaze.
Stas (Basse): Cure pour l'insomnie !

"Snus" : ça fait un tabac un suède
Quelle est votre drogue favorite?

Maja : Le café peut-être..

Andreas : Seulement les drogues légales. Le tabac à chiquer (« Snus », très populaire en suède). Même si le plus gros est l'équivalent de 20 cigarettes d'un coup, c'est légal ici.

Sam : Un vrai accro au café et aux clopes. J'aime bien boire le week-end, comme tout le monde.


Combien de week-end par an?

Sam : 52 ! Les cookies sont aussi une très bonne drogue, légale en plus! (rires)


Qui est le « Ringo-Starr » du groupe?

Qui est Ringo ?

Maja : Je crois que c'est moi ! (rires). Mais dans quel sens ?

Le mec drôle et sympa mais qui ne compose pas.

Sam : C'est tout moi! (Maja éclate de rire). Je suis très drôle. Et je n'écris aucune chanson. Je m'occupe du synthé et de la batterie, mais tout le monde s'en fout de la batterie! Andreas et Maja composent la plupart de nos titres.

Andreas, aidant Sam : Il n'y a aucun « Ringo Starr » dans ce groupe, car on écrit les chansons tous ensemble. Il n'y a pas de structure établie. Quand ça vient, c'est parce que chacun y met du sien.

Justement : la plupart du temps, comment composez-vous?

Sam : Ce groupe a été créé par Andreas et Maja, ils sont donc clairement à l’initiative. On essaye de composer à partir de leurs idées, mais il arrive qu'on s'en éloigne complètement. Je dirais donc que c'est un effort collectif. On improvise aussi beaucoup : sur les derniers morceaux, on commence par une jam' avant d'affiner la structure ensuite.

Andreas : Oui, on s'oriente de plus en plus dans ce schéma là. Mais à l'origine, on fait juste comme la plupart des groupes: prendre une guitare acoustique et essayer des suites d'accords.

Stas et Andreas
Maja : Je fais les harmonies et d'autres trucs..

Sam : Il n'y a pas de recette miracle, c'est juste..C'est un effort collectif pour essayer de nouvelles approches.

Andreas : La meilleure façon de composer, c'est de laisser chacun apporter sa touche personnelle. Tu obtiens ainsi un son vraiment unique. Au début on essayait de sonner vraiment « shoegaze ». Maintenant, avec nos influences respectives, le spectre est plus large.

Maja : Quand Stas nous a rejoint, notre son a considérablement changé, même si la ligne de basse est toujours la même !

Sam : Ouais, c'est vrai, ça sonne si bien maintenant. Je suis tellement fier d'avoir ramené dans le groupe un fan' de reggae !

Stas : Je hais le reggae !

Sam : J'adore le reggae, fermes ta gueule !

"J'ai voulu faire un check un train"
Stas, qu'est-il arrivé à ton bras? (il a un plâtre)

Stas : J'ai voulu faire un check à un train. (rires de l'assemblée)

Sam : Mec, tu devrais essayer « accident masturbatoire » la prochaine fois, j'approuverai aussi.


Stas : Non, en fait c'était un accident de reggae : j'ai voulu jouer une chanson de reggae et mon bras s'est cassé en deux..

Votre premier choc musical ?

Andreas : Je me souviens de cette cassette des Beatles que mon père avait dans sa voiture. She Loves You était dessus. J'avais entre 9 et 10 ans et je me suis plongé dans la musique du groupe anglais.

1993 : une autre époque !
Maja : C'est peut-être les Beatles pour moi aussi. L'album rouge.

Samuel : Pour moi, c'est une collection de hits des années 90 que mon père avait ramené à la maison, en 93. Il ramenait constamment des tonnes de disques. Je me souviens très bien de la reprise de « Please don't go » par KC and the Sunshine Band (ci-contre). Je l'écoutais en boucle, encore, encore et encore..J'adore cette compilation !


Maja : Quand j'y pense, j'ai vécu longtemps à l'écart de la musique pop. Ma famille n'écoutait que des groupes traditionnels suédois..

Stas : Un jour, mon frère a ramené à la maison « Nevermind », alors que je n'étais encore qu'un gosse. Je découvrais une musique d'une puissance dingue.. En un rien de temps, je suis devenu obsédé par Kurt Cobain, je me disais « la vache, il s'est fait exploser la cervelle. Est-il possible d'être plus cool ? » (rires)

Sam : Attends, tu fais l'éloge du suicide là ?! (rires)


Vos influences principales?


Sam : La BO de Twin-Peaks est notre influence commune. On est tous les 4 de vraies groupies de David Lynch.

Andreas : Au début j'étais littéralement obsédé par My Bloody Valentine. Et Pixies : 2 groupes qui nous on rapidement rassemblé, moi et Maja. Ensuite elle m'a fait découvrir tout un tas de groupes shoegaze..

Maja : Le Post-Rock est aussi une influence importante pour nous. Aussi, je crois que certaines de nos chansons sont influencées par Mona, une artiste japonaise.

Twin Peaks : une influence commune
Stas : Godspeed est le groupe de Post-Rock que je préfère.

Sam : Bloc Party est mon groupe favori, j'adore Kélé (le batteur, NDLR), et Dave Grohl. Les boîtes à rythme sont aussi une vraie source d'inspiration pour moi. Une part importante de mon jeu de batterie est directement influencé par les séquenceurs logiciels (machines, synthés..). J'en suis un vrai accro.. J'aime aussi beaucoup la Soul et le son Motown, mais c'est compliquer de faire coïncider ça avec notre son.. (rires).

Quel genre de cinéma appréciez-vous?

Maja : J'adore les films.


Sam : Les chiens aiment les films aussi... J'aime la science-fiction en général, je suis à fond dans Doctor Who en ce moment. Robocops, Retour vers le Futur.. Je me rappelle de ce moment où on avait tous une gueule de bois carabiné, et qu'on matait un film avec Jennifer Aniston, c'était génial ! (Rires de Maja). Sinon, n'importe quel film avec Bill Murray ! Coffee and Cigarettes par exemple.

Andreas : J'apprécie le cinéma « classique », comme Tarkovski. La trilogie du Parrain est dans mon panthéon cinématographique. J'aime aussi beaucoup Wes Anderson : The Darjeeling Limited, Moonrise Kingdom..

Et toi Stas, il me semble que tu aimes la « nouvelle vague » ?

Stas : Oui, c'est vrai. J'aime tout ce qui touche au cinéma d'art européen, plutôt ancien. Le cinéma d'art asiatique aussi. En général, j'aime les plans-séquence très longs. J'adore André Bazin : tout ce qu'il a écrit sur le cinéma, ce qu'il doit être ou ne pas être, c'est comme la bible pour moi. Bela Tarr est sûrement un des meilleurs dans ce style : ses films durent 3 heures, et comportent 20 plans grand maximum! Seul le cinéma est capable de transporter les gens de cette façon. Depuis qu'il s'est récemment reconverti en chauffeur de taxi, je me sens un peu orphelin..


Bela Tarr : une certaine idée du cinéma

Et en ce qui concerne un cinéma plus récent ?

Stas : J'aime beaucoup Hirokazu Kore Eda, un cinéaste japonais vraiment fort. Avec peu de moyens, façon DIY, il raconte des drames inspirés du quotidien. Il ausculte avec acuité la condition humaine. Son dernier film, Father like Son, est aussi fort que ses œuvres précédentes. Enfin, j'apprécie Tsai-ming Liang, un réalisateur taiwanais, et un des meilleurs de notre temps.


Vous considérez-vous comme faisant partie de la « scène » shoegaze ?

Andreas : Oui, on en fait partie, c'est sûr. Star Horse est un nom mentionné ça et là.

Sam : Je trouve cette scène assez dispersée, et en plus je n'aime pas trop le concept. On a déjà fait des concerts avec des groupes du même style que nous, et c'était cool. Il n'empêche que parler de« scène » au 21e siècle est approximatif.. Avec Internet, des gens du monde entier peuvent écouter notre musique. Après oui, on en fait peut-être partie, d'une certaine manière..


Quand et comment vous-êtes vous connus ?

Andreas : J'ai rencontré Maja en 2010, à Tokyo. A l'époque j'étais à fond dans My Bloody Valentine, obsession à l'origine de la création du groupe. On a commencé à jouer tous les deux quand elle est revenue en suède.


Tokyo : l'origine du groupe
Maja : Oui, Andreas connaissait une de mes copines. Rapidement, on s'est baladé ensemble à Tokyo. J'ai rencontré Sam durant un voyage à Londres, grâce à un ami commun.

Sam : J'ai vu votre annonce comme quoi vous cherchiez un batteur, et je suis un vrai accro à la musique, je peux jouer avec n'importe qui, n'importe où, à n'importe quel moment. Du coup on est tombé d'accord assez facilement.

Maja : L'histoire de notre rencontre avec Stas est beaucoup plus amusante ! Il est venu à un de nos concerts l'été dernier, et deux semaines plus tard on avait besoin d'un bassiste, donc.. Il parlait si fort durant notre live, c'était vraiment gênant !

Andreas : Oui, il est venu me voir à la fin du concert. Après on a commencé à jouer ensemble, des chansons qu'il avait écrites. Après quelques sessions tous ensemble, on l'a intégré au groupe, au moment où l'autre bassiste abandonnait.

Stas : "c'est des mecs du coin et c'est pas mal du tout !"
Stas, l'intéressé : Un ami commun m'a dit: « Viens voir ce groupe, ça devrait te plaire», ce à quoi j'ai réagi« hum, j'aime pas trop voir des groupes locaux ». Il a finalement réussi à me convaincre. Après quelques chansons, j'ai pensé : « c'est des mecs du coin mais c'est pas mal du tout! »


Sam : Je me rappelle de toi, venant me voir à la fin du show : « c'était vraiment bien. C'est quoi vos influences ? », et j'ai répondu : « hum, du genre Soul, Motown, Hip-hop, R'n'b.. » Après quoi tu m'as regardé, l'air choqué, et tu t'es tiré ! C'est la vérité ! (rires)


"100 Eyes"
Artwork by Maja Thunberg





C'est mercredi le 05 novembre



Live-Report/


Un super concert des Superets à 
La Boule Noire

Un reportage de (beaucoup) plus de 160 caractères.

Crédit photo : Alison Granger
"Bonsoir, nous sommes Bagarre" : d'un ton martial, un des chanteurs de Bagarre fait les présentations, dans l'ombre tamisée de La Boule Noire. Répété ensuite plusieurs fois durant leur live, ce mantra est aussi le nom de leur premier EP, paru en mai sur le petit label parisien Rouge-Vinyle, qui supporte des newcomers prometteurs, tels Alba Lua (des petits génies), Von Pariahs, etc. Un jeu de scène original et amusant. Mi organique, mi électronique, le quintet joue une pop moderne en français aux influences éparses. New-Wave, chanson, rap, spoken word pour les plus évidentes.
De la "Musique de Club" selon les intéressés, qui s'emmerdent pas avec les étiquettes classiques. Un collectif sans véritable leader, le chant principal étant tour à tour assuré par deux membres différents : un souffle de démocratie bienvenu. Plutôt nerveuse, leur musique s'exprime très bien en live, notamment grâce à leur chanteur/performeur brun et barbu, qui fait preuve d'une grosse présence, vocale et physique. Pas avares en expérimentations, ils convient même pour une chanson un joueur de sitar, ce qui apporte une petite note de psychédélisme. Du côté des textes, les chansons parlent d'amour et de clubbing. Je retiens un "je t'aime" rageur et désespéré, hurlé 15 fois de suite, bien plus que je n'ai pu en prononcer durant toute ma vie. Une bien belle bagarre.

Merci Super 8 !

Entracte et causette avec les gars de Super 8, qui ont considéré ma photo de supermarché, où l'on me voit faire du skate entre salades et tomates, comme une des deux "plus folles" du concours, ce qui m'a permis de gagner 2 places pour ce concert. Si vous ne connaissez pas, je vous conseille d'aller jeter une oreille à ce très bon flux indé. Ca se passe ici.





Superets : la vie, du côté SUPER
C'est l'heure du concert des Superets, qui débarquent sur la scène de la Boule Noire, petite salle très sympa, toute de bois vêtue. Des mecs très sympas, bretons et fans de rock à l'ancienne. qui se sont taillés une petite réputation avec "160 caractères pour te dire adieu", au texte vif et actuel. Rock chanté en français aux réminiscences fifties (un petit côté Mustang), le son des Superets se dote aussi d'un grain plus contemporain, à la faveur d'un synthétiseur dernier cri. Propre et carré, le set est exécuté avec talent et vitalité post-adolescente. Mention spéciale au chanteur/gratteux qui, en plus d'une intonation vintage appréciable, a une pêche d'enfer : il harangue la foule, balance des vannes, danse frénétiquement d'un bout à l'autre de la scène (elle est petite, mais quand même !), et jette sa Gretsch au sol en guise de conclusion rock'n'roll. Avant un joli rappel, où l'on a droit au tube "160.." dans son intégralité (ils en ont fait 30 sec' au début, pour déconner) ainsi qu'à leur dernier morceau, "Le Sang, L'Argent", expédié encore une fois avec vigueur et élégance.
Pas innovant pour un clou, les Superets possèdent néanmoins une fraîcheur incontestable, qui fait plaisir à voir. "Vous venez au Truskel avec nous ? On va faire la fête jusqu'au bout de la nuit! ", lâche, en sueur, le chanteur des bretons magnifiques.




Samedi, fête des morts



Live-Report/


Lords take the Batofar
Les bikers californiens fidèles à leur sulfureuse
réputation

Le Batofar
Jeudi soir, en bord de seine. Les Lords Of Altamont, dont je vous ai parlé récemment, sont de passage à Paris, au Batofar. Je n'ai qu'une hâte, voir de mes propres yeux tout ce qu'on raconte sur leurs shows autodestructeurs.

19h30. Je rentre dans la péniche et me commande une bonne bière, tout en lançant au barman : "ça va sérieusement tanguer ce soir !". La faune rock parisienne est bien présente : jeunes, vieux, cuirs cloutés et tignasses colorées.

Le chanteur des Whodunit : en transe
La lourde tâche d'ouvrir pour les Lords revient à Whodunit, quatre quadra parisiens inconnus au bataillon, qui se défendent plutôt bien. Costards et cheveux gominés à l'appui, les gars nous envoient un rock-garage plutôt bien troussé, pas aussi punk que les Lords mais bien racé. Le chanteur-gratteux, en transe, rugit dans son micro. Le public reste en retrait, mise à part quelques courageux qui encouragent le groupe. Je croise les mecs à l'entracte, des types adorables, que je félicite au passage.




Lords on stage baby


Jake Cavaliere et son Farfisa chéri
20h45. Alors que le sous-sol du bateau est maintenant bien rempli, les bikers californiens débarquent tels des héros sur la petite scène. Les fans crient leur excitation, ce à quoi répond un Jake Cavaliere visiblement en pleine forme "Hope you're doin fuckin' good. Let's GOOOOO", grosses lunettes sombres bien vissées sur le nez. Et c'est parti pour un show de 1h15 effectivement tonitruant : dans un vacarme assourdissant, les 'ricains nous envoient un garage-punk brut et explosif, fuzz et riffs mordants à l'appui, avec une énergie atomique. La tension est palpable dans la salle, surtout près de la scène où des pogos inévitables éclatent entre les fans les plus dingues, dont je fais bien sûr partie. Le chanteur du 1er groupe, toujours en costard, se mêle lui-aussi aux émeutes. Pendant ce temps, sur scène, Jake malmène son micro et même son orgue Farfisa italien, qu'il retourne à la verticale pour laisser les spectateurs s'amuser dessus, avant de le laisser carrément tomber dans la fosse. Un batteur a la frappe bien lourde, une basse fuzzy et un gratteux à la tignasse frisée qui nous fait des solos bruts et bien fouillés : les ingrédients d'un garage explosif.

Des Live auto-destructeurs : du sang et des larmes
 Avec une sonorisation au top, ils jouent des classiques du genre comme "Psycho" et des titres de leurs 3 derniers disques, dont "Save Me", "Gettin High" et "Live Fast" : autant d'hymnes pour un hédonisme sans retenu. Dans le même temps, les images de la route américaine défilent devant nos yeux au moyen d'un écran vidéo. Et tout ça sans aucun temps mort : Cavaliere éructe violemment dans son micro, de sa voix caverneuse et exaltée si particulière, 75 minutes non-stop, tout en plaquant les accords d'orgue avec ses mains suintantes. 
En plus, il est cool, et interpelle le public entre deux gorgées de bière, histoire de motiver encore plus les troupes: "Which song do you want ?" ; "Are you ready to rock?". Ce qui occasionne en retour une salve de "Come on Asshole !" et autre "Naked!" crachés par des fans en transe rock.
Au top de la scène heavy-garage actuelle, les Lords sont effectivement une énorme claque en concert : sans hésiter dans le top 10 des meilleurs Live de l'histoire du rock, et c'est pas mon 1er concert. Ces mecs ont ça dans le sang, ils s'éclatent comme des gamins sur scène, comme si leur vie en dépendait. Parce que c'est ça le rock'n'roll, à la base

"Leur meilleur concert"


Moi, j'ai apprécié, mais les autres, qu'en ont-ils pensé ?



Un fan invétéré qui les a vu 10 fois en 2 ans me l'assure : "c'est leur meilleur concert". Avant qu'une jeune blonde alcoolisée me vomisse dans l'oreille : "à la base je suis fan des Sex Pistols, des Cramps, mais alors là je suis amoureuse. Une sacré claque". Enfin, deux trentenaires à la cool qui bossent chez Canalsat me confient : "on est venu par hasard, on savait pas trop quoi faire de notre soirée. Et ben là vache, ça cartonne ce groupe !". Bonne nouvelle pour les Lords, ils ont convaincu de nouveaux fidèles.



L'interview à chaud, backstage.

"Home away from Home"


A la suite d'un concours de circonstances heureux, je me retrouve dans les loges exiguës du Batofar, face à face avec le frontman du groupe. A peine remis de ses méfaits soniques, Jake Cavaliere me répond avec beaucoup de gentillesse. Quand j'évoque les légendaires Cramps, il tique : "tu sais je les connais très bien, j'ai joué avec eux durant 10 ans. Le batteur du groupe aussi, durant 4 ans". Sur le live : "c'était génial, comme toujours. On se sent chez soi même à des milliers de kms de la maison. Ca fait toujours plaisir de voir tous ces sourires et ces gens qui connaissent les chansons encore mieux que moi !". Quand je lui demande quelle est sa drogue favorite, il se mue en dandy romantique : "une jeune fille américaine quand je rentre à Los Angeles". Sur leur rythme de tournée effréné, il m'explique : "on fait que 100 dates cette année, on en faisait plus avant, jusqu'à 200 en un an. Je suis un peu moins frais que par le passé". Au point d'être fatigué après un concert comme celui-ci ? : "Non, pas du tout, c'était génial, grâce à vous. Ce sont les fans qui me donnent toute cette énergie".


Altamont Speedway festival, 1969.
Il me donne ensuite des précisions intéressantes sur le sens de leur dernier album, "Lords Take Altamont" : "Cet album est un hommage au festival d'Altamont de 1969, dont on tire aussi le nom de notre groupe. Je voulais que les gens comprennent mieux le lien étroit qu'il y a entre le groupe et le festival, tout ce que ça signifie pour nous. Ainsi, tout les titres du disque sont des chansons ayant été jouées par les Stones, Jefferson Airplane, Crosby, Stills and Nash, The Flying Burrito Brothers et Santana durant le festival." Je teste ensuite l'influence de la culture française, en lui demandant quelle est son groupe de rock français favori : "Hum, laisse moi réfléchir quelques secondes..Quand j'étais un gosse à Los Angeles j'ai vu en concert un groupe français assez connu, mais je me rappelle même plus..". Tout est dit. Il reprend ensuite : "Sinon, on a tourné pas mal avec un groupe français de Rouen, The Elektrocution, des mecs super cools. Un peu comme les Hives mais français.". Il se désole ensuite du décalage entre certaines premières partie et son groupe, durant cette nouvelle tournée : "la plupart sont des groupes plus Stoner, comme Queen Of The Stone Age. C'est pas la même chose. Je ne suis pas un gangster tu sais.Je le félicite à nouveau et lui serre la main, avant de m'éclipser. Quand à eux, ils s'en vont pour un autre concert, avec surement encore autant d'énergie.




Jour du seigneur, 26 octobre


Un 5e album explosif
La Chronique/


Lords of Altamont : le retour des rois




The Lords of Altamont, supergroupe de vieux briscards de la scène garage et punk américaine (Cramps et Fuzztones pour les plus fameux) viennent nous botter le cul une fois de plus avec leur 5e et dernier album."Lords Take Altamont", hommage au dramatique festival de 69 dont ils tirent aussi leur nom de gang, continue de creuser avec zèle un sillon rock-garage bien lourd, fuzz et orgue Farfisa maltraité à l'appui. A côté les Black Lips, également labellisés garage, font figure d'enfants de cœur. En revanche, les Jim Jones Revue, qui ont rendu leur tablier plein de sueur et de sang après avoir écumé sans relâche les scènes d'Europe durant 7 ans, sont sans conteste les cousins anglais des Lords en terme de son.





Lords in Live
     
Sur 14 morceaux tous plus agressifs les uns que les autres, on trouve 3 covers des Rolling StonesGimme ShelterSympathy For The Devil et Love In Vain : un hommage toujours explosif, de trois des plus grandes chansons des Stones.
Chroniques d'amours aspergés de foutre, récits de road-trips échevelés et blues saignants, les Lords continuent de donner dans la poésie. Tel un gang de Bikers lancé à pleine vitesse sur des Harleys rutilantes, ils ratissent actuellement l'Europe pour prêcher la bonne parole garage, à raison d'un show tous les soirs. Publiés par le très bon label américanophile Fargo Records, les Lords of Altamont seront de passage à Paris jeudi, au Batofar, pour un concert assurément musclé. Vous ne le regretterez pas : ces gars sont faits pour le live, donnant tout ce qu'ils ont dans le ventre à chaque fois, comme si la fin du monde était pour bientôt. Une sacré claque en perspective.




Sympathy For The Devil, par les Lords 






C'est Samedi, 25 octobre



Live-Report/



Ecrit à 4 mains, par Lauren Georges et moi-même.





Noisey : un bébé déjà bien trash
Noisey's Birthday : une première bougie 
bien enflammée



Jeudi soir on est allé au concert-anniversaire du bébé Noisey (le mag musique de Vice, ndlr), qui fêtait ses 1 ans à La Cigale. C'est trop mignon. Aucune affiche dans la salle, pas de gâteau-anniversaire, les gars sont curieusement restés plutôt discrets et ont laissé les artistes s'exprimer en toute liberté. Venu essentiellement pour me goinfrer de cake au chocolat, je suis un peu dégoûté.
Frustration
Pour le premier groupe, on préfère rester dehors à picoler nos canettes, pour deux raisons : les bières sont toujours trop chères dans les salles, et une jeune fille me met en garde: « oh, Bosco del rey, c'est vraiment pourri ». Mais pour le deuxième groupe, on est bien dans la salle. Signé sur le très respectable label garage Born Bad Record, le groupe parisien Frustration exorcise toutes nos angoisses avec un son new wave à l'énergie très punk. On ne peut s'empêcher de penser très fort au groupe de feu Ian Curtis, en entendant le chanteur éructer de la sorte. Carré, puissant, ce groupe est une vraie révélation. Des bêtes de scène que l'on vous conseille fortement. Déjà entendus sur la BO du film La guerre est déclarée, ils confirment tout le bien qu'on pensait d'eux.
Durant toute leur prestation, l'ombre des Black Lips plane déjà sur la Cigale, un grand drap blanc noirci à la va-vite du nom du groupe trônant au fond de la scène.
Mais d'ailleurs, où sont-ils ?

 Black Lips

Les quatre branleurs américains débarquent peu après, devant un public déjà surchauffé. « One, two, three, four » : dès les premières notes, la folie s'empare des spectateurs, si bien que notre duo de reporters se retrouve séparé. Lauren, aspergée de bière, décide de battre en retraite, alors que Maxime plonge sans hésiter dans la fosse aux lions. On retrouve l'énergie punk du « groupe le plus dangereux des Etats-Unis » qui a fait sa réputation des bouges crasseux d'Atlanta jusqu'aux belles salles lustrées parisiennes. Ils piochent dans l'intégralité de leur répertoire, de l'acclamé Arabian Mountain (2011) au lo-fi Let it bloom (2005), comblant ainsi le plaisir des vieux fans comme des teenagers. Ils nous achèvent avec le cultissime Bad Kids, leur tube interplanétaire qui occasionne une joyeuse bagarre dans les 1ers rangs.
Les spectateurs sur scène : un classique durant un
concert des Black Lips
On a également droit, comme à chaque fois, à une réelle communion entre les musiciens et les fans qui viennent foutre le bordel sur la scène. Un des deux guitaristes paraît bien en panique, et perd même le contrôle de son micro. Maxime, après avoir combattu durant 2h, monte sur l'estrade à la 2e occasion, manquant de justesse de s'écraser sur la batterie. Bien au chaud sur le côté de la fosse, Lauren choisit cette fois-ci d'éviter les bleus. Les trentenaires postés en haut sur les balcons observent le spectacle avec un mélange d'amusement et d’incompréhension.
Pour ceux en rad de papier toilette, de nombreux rouleaux furent jetés dans la foule, créant ainsi un ballet de papier blanc au-dessus des spectateurs en sueur. Et pour ceux nostalgiques du jardin d'enfants, on a aussi droit à plusieurs lancers de ballons de baudruche multicolores.
Verdict après 1h30 de concert, les Black Lips portent bien leur titre de groupe dangereux : ils n'ont rien lâché du début à la fin, ne nous laissant pas le temps de reprendre notre souffle (Lauren). Malgré tout, ça ne vaudra jamais leurs concerts dans les plus petites salles, comme à la Maroquinerie en 2011, une prestation sauvage qui avait fait date. Car, pour ma part, je les ai trouvé un peu en dedans. (Maxime)
En vrais professionnels, on essaye d'obtenir l'impression à chaud du guitariste, que Lauren a repéré grâce à son radar de groupie. « Sorry man, i just want to talk with my friend », le non est catégorique. Ok, well, on retiendra la musique.


Family Tree, Black Lips (2011)






C'est Vendredi, le 10 octobre



La Chronique/

Rain Plans : un grand disque

Israel Nash, nouveau roi 'ricain de la country-folk

Avec Rain Plans, cet héritier du Laurel Canyon
se hisse au sommet


         Originaire du Missouri, Israel Nash débarque à New-York en 2006 où il se produit dans les clubs de folk durant plusieurs années, peaufinant son art. Un destin qui n'est pas sans rappeler celui du parrain de la Folk Bob Dylan. Après trois ans de petits concerts, il sort en 2009 son premier album, le bien nommé « New-York Town ». S'en suit un 2e album studio prometteur, un album de reprises (dont Hey Joe d'Hendrix et Working Class Hero de Lennon) et une première tournée en Europe ponctuée d'un album Live. La notoriété acquise, Nash retourne là où il a toujours voulu vivre, dans la brousse. Dans une petite ferme du Texas, avec son backing-band bienveillant, il y compose et enregistre Rain Plans, son 3e album de compositions originales. Et son premier grand disque, publié l'an dernier et chroniqué avec un peu de retard pour cause de road-trip.
Into The Wild
Il y convoque de glorieuses références, de Neil Young au son libre et lumineux du Laurel Canyon, repère d'amoureux d'une certaine vision du monde (Folk, nature sauvage et binch drinking) dans le Los Angeles bouillonnant du début des 70's. Sans lien de parenté avec Graham Nash, un des tauliers de cette glorieuse génération, il est sans conteste de la même famille musicale. Guitares folk, pedal steel vibrante et mélodies lumineuses, chantées d'une voix touchante héritée du Loner canadien. Cette ressemblance est tout simplement évidente sur Just Like Water, où il mimétise sans tomber dans la parodie un motif vocal très Youngien, à savoir le « Hey, hey, hey » à l'émotion palpable.
Rexanimarum (vidéo ci-contre), qui clôt l'album, va en faire pleurer plus d'un. Chanson absolument sublime, cette ballade puissante qui rappelle les titres country des Stones doit être écouter selon un mode opératoire précis : volume maximal, au volant de sa voiture, torse poil, seul, en pleine nature. Si vous habitez à Paris, faites-le en vallée de Chevreuse, c'est moins épique que le grand canyon mais je pense que ça rend bien. Cette nature sauvage, il en est question justement sur la plupart des titres, de Just Like Water à Myer Canyon en passant par Iron of the Mountain, dans la plus pure tradition country-folk américaine.

Cet album n'est pas sans rappeler le son de Jonathan Wilson, singer-songwriter de la même génération. Ce type attachant a sorti en 2011 Gentle Spirit, coup de maître d'un ancien ingé' son qui contient quelques ballades déchirantes : Gentle Spirit, Can We Really Party Today, Desert Raven (un must pour les fans de country-folk chiadée)

Desert Raven, de son alter-ego Jonathan Wilson (en live chez KEXP, excellente radio 'ricaine) :














Un lundi sous un temps de merde, 06 octobre


Interview/


Les « invisibles » de la musique


Mis à part les groupes, qui sont régulièrement à la une de l'actualité musicale, de nombreux individus dont on parle beaucoup moins se tuent à la tâche quotidiennement pour servir ce grand art fédérateur et populaire qu'est la musique. Patrons de salle, disquaires, directeurs de labels, etc. Premier invité, Maxime, jeune luthier en Savoie. Une plongée au cœur de la fabrique de l'instrument, en (très) agréable compagnie.


Ça cartonne sa grand mère à coup de jambon”





L'histoire

« Que vais-je faire de ma vie ?». Un soir de septembre, il y a de cela quelques années, Maxime s'interroge, contemplant le clair de lune, assis à l'avant de sa voiture, seul. Il revient tout juste d'un voyage en Amérique du Sud mais doit maintenant construire la suite.. Un sentiment de vide s'empare de lui. Et là, le déclic : « mais oui, la lutherie ! Allez, lance-toi mon vieux ».
Après beaucoup de travail, d'acharnement et quelques rencontres décisives, il travaille désormais comme luthier/sculpteur pro', dans le petit village du Châtelard, au cœur de « ses » Alpes. Le meilleur endroit pour trouver l'inspiration.

Dans un français truffé d'expressions savoyardes fleuries, il nous raconte son parcours et nous explique quelques rudiments de ce beau métier qu'est la lutherie, sans qui vos chansons préférées n'existeraient tout simplement pas. Aussi au programme, ses groupes fétiches et des expressions bien de chez lui.

Rencontre


I/Qu'est-ce qui t'a amené à la lutherie ?

C'est une longue histoire. Au moment où j’étais au plus bas, je me suis écouté. J’étais prêt à vivre l’unique chose qui vibrait au fond de mon cœur, au delà de tout raisonnement économique et tout le bataclan ! En choisissant ce métier de luthier, je m’engageais clairement dans le chemin de vie le plus magique qui soit !

II/Quelles furent les rencontres décisives ?

Des tonnes... Si je dois en retenir une : j’ai pris le botin (Les Pages Jaunes, ndlr) et à force de persévérance j’ai rencontré l’homme qui allait devenir mon Maître, François Lebeau. Il m'a dit «  pas d’école, je t’apprends le métier ». Et on a partagé 6 ans dans son atelier à Annecy.

III/Quels instruments conçois-tu en majorité ?

J’ai appris la construction du violon. Cela reste encore un apprentissage au-delà de mon quotidien professionnel, qui s'articule pour l'instant entre les restaurations, les réglages et entretiens sur tout type d’instrument, à cordes frottées et pincées (une partie importante du travail de beaucoup de luthiers, ndlr).

IV/Quel est l'instrument/modèle le plus demandé ? Son prix ?

Je commence à avoir quelques demandes pour des violons. Le prix de base se situe aux alentours de 10 000 euros.

V/Tu fabriques aussi des sculptures, des bijoux.. Peux-tu m'en dire un peu plus ?

Oui, je me suis également formé en sculpture, car l'outillage est en tout point similaire à la lutherie. Ce sont tous deux des travaux « d’outil mains ». Je travaille sur commande sur tout type de sculptures. Je conçois aussi des bijoux, médaillons, des manches de couteau, des bas relief, hauts relief, des rondes bosse (différentes techniques de sculpture)...

VI/Quel est le processus de fabrication d'un instrument ?

Il y a plusieurs méthodes de fabrication. Pour ma part, j'applique celle de l'école crémonaise (de Crémone, ville italienne et capitale de la lutherie, d'où vient notamment le fameux violon stradivarius, ndlr). Avec un moule, tu crées une couronne d’éclisse. Ensuite, tu traces la table et le fond. En sculptant ces deux parties, tu obtiens la caisse, que tu assembles au manche préalablement taillé. Avant de finir par la pose des barres d'harmonie et des cordes.
Ce sont ensuite les sens humains qui font le reste : toute l'attention et l'amour donnés durant la conception transparaîtront dans le rendu final de l'instrument.

VII/Quels bois utilises-tu ?

Le violon est très standardisé pour les bois. Je fais donc comme à peu près tout le monde. Pour la table, de l'épicéa, pour le fond et l'éclisse de l'érable ondé. En ce qui concerne le cordier, la touche et les chevilles, si j'utilise généralement de l'ébène, il m'arrive aussi de tenter le coup avec du buis ou du palissandre.


VIII/Quelles musiques écoutes-tu ?

J’écoute de tout, à partir du moment où c'est fait avec une certaine vérité. Ce qui fait une belle différence avec les “produits commerciaux” de la musique. Pour citer quelques exemples : VRP (groupe français barré de la fin des 80's, auteur notamment de « La Vache a grossi »), Pink-floyd, le super son des seventies, le classique, le vieux français (Brassens, Ferrat)...

IX/Joues-tu dans un groupe ?

Je n’ai plus de groupe mais une bande de potes! On fait ça pour s'amuser. Avec d'autres musiciens que l'on croise à l'improviste, on se retrouve toujours avec quelques guitares dans le coffre de la voiture... Pour jouer du punk acoustique, des trucs plus chanson française, du rock’n’roll, de la zik' tsigane. Tant qu'on s'amuse, qu'importe le style de musique ?

X/Peux-tu me raconter cette fameuse « tournée » en Corse ?

La Corse! Vaste aventure! Comme tous les ans, je pars là-bas avec une bande de 15 potes, pour faire du canyoning, de l'escalade, festoyer et faire de la musique. Débarqués dans le petit village d'Ota, les habitants nous observent tout d'abord d'un air méfiant : « C'est qui ces punks ? ». Peu après, finalement convaincus de notre bonne grâce, ils nous laissent sortir les instrus dans le centre du village. Ce fut une fête mémorable, faite d'échanges de chants traditionnels (savoyards et corses, ndlr) respectifs. Les locaux laissèrent échapper leur joie en dégainant des grands coups de revolver (sic) dans le ciel insulaire. Le jumelage entre les Bauges (vallée savoyarde, ndlr) et la Corse était fait !

XII/Quelle est ta drogue favorite ?

Vivre le présent avec tout ce qu’il comporte… Le choix du bien-être au présent prépare à un futur prospère ! Sinon évidemment mon métier, la musique, la moto, l’amour… Bref je suis un grand passionné !

XIII/Un mot, une expression favorites ?

“Do It Yourself ! » me plaît bien. Sinon la déconne des copains: “Ça fait pas tant rire les patates à la cave”, “Ça cartonne sa grand mère à coup de jambon” (idiome savoyard qui décrit une grande satisfaction, ndlr), “In diot we trust”...(le diot est la saucisse savoyarde, ndlr).

XIV/Un livre qui t'a marqué ?

“Le loup des steppes” (Steppenwolf) d'Herman Hesse (classique de la littérature contemporaine qui raconte l'histoire d'un homme tiraillé entre son amour du confort petit-bourgeois et sa haine des conventions morales en vigueur dans cette même catégorie sociale, ndlr).
Ce livre transcrit la même chose que Siddhartha (autre ouvrage d'Hesse) mais en plus profond. Il arrive a mettre en lumière la magie de la vie, à faire rayonner les détails les plus insignifiants. Après une première partie lourde et un peu fastidieuse, il m'a vraiment embarqué. Il nous donne pas le sens de la vie mais presque !



XV/Pour quel musicien célèbre aimerais-tu concevoir un instrument ?

Si je n'y songe pas vraiment, disons, pour rigoler, Roger Waters des Floyd. Soyons fou !


Comment je l'ai rencontré

De passage à Nantes suite à 4 mois de road-trip en Europe, je rencontre Maxime, sous le soleil matinal, encore une fois grâce à ma guitare. « Tu joues ? ». S'en suivit deux heures d'une jam' enlevée dans les rues nantaises, lui à la guitare et moi à l'harmo', jouant du Brassens.



Le conseil "Musique" de Max' le luthier : VRP, groupe français barré des 90's








On est mercredi, le 1er octobre



Live Report/


J'ai survécu au concert des Libertines



23h30. Dans l'obscurité de la nuit tombée, des milliers de jeunes gens marchent, hagards, dans les travées du Parc de la Villette. Je suis moi-même complètement sonné, l'esprit à moitié fracassé. Les Libertines, rockeurs anglais cultes et adorés, viennent de donner un concert flamboyant, comme à la grande époque.
Libertines'Mania, à Londres le 26 septembre
De passage à Paris après des concerts en Angleterre et au Danemark, les enfants terribles du rock britton ont déjà engendré sur leur passage des scènes d'excitation, et d'exaltation, d'une rare violence. Spectatrices qui perdent connaissances, barrières explosées.. Une Libertines-Mania en les termes, qui résulte d'une attente énorme tout à fait légitime des fans. Séparés en 2004 après avoir expédié deux disques de rock-garage gorgés de tubes intemporels qui ont fait date dans l'histoire du rock, les branleurs romantiques ne se sont ensuite reformés, en 10 ans, qu'une fois, l'été 2010, le temps de quelques concerts. Sans parler des tensions profondes entre les deux leaders (le très beau docu' There Are No Innocent Bystanders, de leur photographe et ami Roger Sargent, en atteste) et des problèmes récurrents de Peter avec la dope (les pires tabloïds s'en font régulièrement l'écho pour ramasser du fric), qui rendaient impossible un retour sur scène. Certains fans, pour les plus cyniques, me disaient donc : "j'espère que je vais pouvoir les voir au moins une fois dans ma vie, avant que Peter meurt d'une overdose". C'est ainsi qu'un grand nombre d'entre eux, dont je fais partie, qui avons découvert le groupe après le split et ne les avions jamais vu en live, attendions cet événement depuis très longtemps. Ce qui explique les débordements observés sur cette tournée, qui revêt une saveur toute particulière.


J'attendais donc ce moment avec un mélange d'anxiété et d'excitation, en me demandant si j'allais réussir à passer entre les gouttes de la folie qui emporte tout sur son passage.


18h30. Je prends place en bonne position et sirote ma bière, payée au prix fort. La salle, d'une capacité de plus de 6000 places, se remplit tranquillement, dans une atmosphère encore calme. Je discute avec des fans, jolies jeunes filles lookées et garçons aux cheveux longs, tout excités à l'idée de les voir en chair et en os. Même avant le début du concert, on sent déjà l'électricité dans l'air, prête à faire exploser le thermomètre à tout moment. 
La chanteuse de Cuckoolander, sexy en diable
1h plus tard, la premier groupe débarque. Un jeune mec à la guitare et au chant accompagné par une copine qui chante, elle aussi. Anecdotique. Les compos sont faibles,  et ils ne sont vraiment pas en place. Sans parler du stress de la première scène. Du genre tremplin local. L'empathie est là, mais c'est tout. 1/5

Ensuite, Cuckoolander, quatuor londonien qui joue une pop sautillante très sympa. Songwriting de qualité, complicité indéniable et très bonne énergie, notamment la chanteuse/frontwoman, fille sexy en diable à la tignasse blanche, qui remue et chante avec particulièrement de talent. Mes voisins ne s'y trompent pas : "ah ouais elle est bonne". Pervers boutonneux façon "Beaux-Gosses" mais aussi mélomanes, ils apprécient aussi la musique : "c'est vraiment pas mal. Bonne découverte". En effet, pour en revenir au son, ils possèdent quelques potentiels tubes. 4/5

Rock en voie d'acquisition
Une 3e première partie arrive ensuite, si bien qu'on se demande tous quand est-ce que les héros vont pointer le bout de leur nez. Deers Barn, Plasticines anglaises, jouent un rock assez basique et pas très réjouissant. 3 accords, quelques pauvres notes alignées en guise de solos et des mélodies pour ados. Malgré tout, il y a quelques bonnes idées et les 4 filles s'en donnent à cœur joie, surtout l'une des deux chanteuses, qui gesticule telle la rockeuse londonienne débraillée et un poil chipie qu'elle est. Si ça me fait très plaisir de voir un groupe entièrement composé de filles dans un milieu quand même plutôt masculin, je ne suis vraiment pas emballé par leur musique. 2,5/5

Et là, et là, après une grosse demi-heure d'attente qui laissait présager le pire, quand on connait l'oiseau Doherty, les quatre Libertines débarquent sur scène, héros du renouveau rock britannique du début des années 2000, revenus de tout, des drogues, des embrouilles de fric et des conflits d'égo. Un miracle de les voir ici.
Les deux potes à nouveau réunis
La salle n'est remplie qu'aux 3/4 mais la fosse a été envahie par près d'un millier de jeunes rockeurs et jeunes filles belles et rebelles prêts à en découdre. Beaucoup de monde dans un mouchoir de poche. Ils démarrent pied au plancher avec "The Delanay", emblématique du son des Libertines, entre garage rentre dedans et songwriting génial. Quelle énergie, c'est touchant de les voir se donner comme ça sur une scène à nouveau ensemble. Surtout le duo d'enfants terribles Barat/Doherty, souvent côte à côte jusqu'à chanter dans le même micro, comme à la grande époque. 
Dans la fosse, l'émotion chez les fans est telle qu'ils ne peuvent contenir leur énergie. Les premières dix minutes sont d'une violence inouïe. Le mouvement de foule typique où plus personne ne contrôle rien et où l'on peut presque y laisser sa peau. Plus concentré sur ma survie que sur la musique, je bats en retraite quelques minutes, pour récupérer mon souffle. Le temps que les hormones de ces jeunes gens pourtant bien intentionnés redescendent quelque peu.
Rock'n'roll picture baby
Durant 15 minutes, je regarde le concert d'un peu plus loin, me délectant des classiques, magnifiques et racés (Time For Heroes, Vertigo), qu'ils enchaînent à un rythme effréné, sans dire un mot au public. Ces mecs ont l'énergie incomparable des rockeurs dans l'âme, à la vie à la mort, qui se donnent comme si leur vie en dépendait. Durant cette interlude, j'observe avec un léger sourire tous les mecs "morts", au visage livide, qui sortent du milieu de la foule, sonnés. C'est qu'il faut sérieusement s'accrocher pour tenir 5 minutes tout devant, en ce début de concert.
Remis sur pied, je reviens dans l'arène pour encore plus d'une heure de concert. Cette fois, je résiste mieux dans cette fosse bouillonnante. Car les flamboyants Lib's continuent d'envoyer la sauce. De tubes en tubes, avec s'il vous plait, What Katie Did, Boys in the Band, Can't Stand me Now, Don't Look Back Into The Sun, Death on the Stairs et Fuck Forever, quasiment torchés à la suite. Un enchaînement de titres cultes beaux et énergiques qui fait l'effet de coup de grâce. On a aussi droit à des morceaux solos de la part des deux frontmans, guitares acoustiques en main. Des moments assez émouvants. Malgré les craintes sur son état de santé, Doherty fait le job. Quant à Barat, il a toujours une pêche incroyable.
Barat-Doherty à l'unisson, et John Hassal, esseulé

Après s'être gavés durant près de 2h d'un concert rare et magnifique, les fans ont droit à un rappel épique, lors duquel ils dégainent 3 de leurs titres les plus énergiques, Up The Bracket, I Get Along et What a (Fuckin') Waster, avant de tomber le rideau sur la superbe et cultissime What Became of the Likely Lads. Fidèle à lui-même, Doherty saute sur son pote Barat en fin de concert, après avoir violemment jeté sa guitare au sol. Il s'écrase sur la batterie de Gary Powell, Barat allongé par dessus. Ou comment officialiser leur réunion, de façon très punk. Une image qui restera dans les mémoires. Gary Powell, le mec "easy-going" du groupe, est le dernier à rester sur scène : torse poil, tout de muscles vêtu, il remercie longuement le public. John Hassall, le bassiste, est déjà parti. Il a tiré la gueule durant 2h, une performance qui en dit long sur les relations qu'il entretient avec le reste du groupe.
Un homme dans un état second, à la fin du concert
Je ressors hagard, les oreilles sifflantes, les jambes flagellés, le souffle coupé, le t-shirt trempé et l'esprit retourné. Dans les vapes mais encore bien vivant, j'ai survécu au retour scénique des Libs'.
Pour l'album je reste dubitatif, mais en tout cas ils assurent encore impeccablement les concerts. Et même si, comme l'ont relayé les médias, Peter fait ça pour la tune (comme tout le monde, il a besoin d'argent, étonnant non ?), il le fait aussi pour la musique, preuve en est le don d'énergie qu'il a encore manifesté mardi soir. 




C'est jeudi, 25 septembre



La Chronique/


Joe Chicago, petit génie parisien

Personne ne le connaît (exceptés sa famille, sa meuf' et ses potes), et pourtant, le mec dont je vais vous causer vient de sortir un album très prometteur. Si il a déjà fait l'objet de chroniques dans quelques magazines, très peu de gens, en dehors du microcosme parisien, en ont entendu parler. Une injustice que je me devais de dénoncer haut et fort.



Comme beaucoup de gens, Joseph Holc a un boulot de merde. Pour s'évader de leur quotidien morose, certains jouent au golf, d'autres matent le foot, etc. Lui a choisi de tout foutre dans la musique. Dans un monde merveilleux où les violons dialoguent avec les guitares folk dans une atmosphère freak et psyché, il officie en tant que "Joe Chicago", fidèlement accompagné de ses "Supercherries". Inégal mais bourré de bonnes idées, "Surfing Cuties", son premier album, est un cabinet de curiosités qui recèle de très bonnes chansons dans des styles assez variés.


L'album en question
Dans un esprit global très pop, et souvent psyché, Joe ne s'interdit pas grand chose, tatant du glam à la Marc Bolan (Kali Yuga), de l'acid-folk (Death in Hawaii) en passant par un bel instrumental (Permission) ainsi que quelques trips bien barrés, comme une chorale religieuse de 30 secondes (Ein Lied), un obscure réquisitoire en français (Pigargue Vocifère) et un morceau chanté...en allemand, par une copine (Bereit). Car la plupart sont bien sûr chantées en anglais, langue pop officielle, par Joe Chicago lui-même, de sa voix douce et éthérée. Pas manche, il est aussi le responsable de toutes les compositions. Multi-instrumentiste, il en utilise sur ce disque un nombre impressionnant, du violon à la batterie en passant par la guitare, la clarinette, sans parler des samples de voix d'acteurs et autres trouvailles créatives. Les textes, barrés e ésotériques, sont aussi du monsieur. Ceux de l'une des 2 chansons en français sont un bel exemple de ce à quoi ressemblent en réalité la plupart des lyrics anglais de beaucoup de groupes, si on les traduit : " Bienvenue, l'univers a envie de toi, maintenant tu sais, la beauté est un péché pour les seuls pêcheurs". Comme vous l'avez compris, il fait donc absolument tout. Un vrai petit génie !
Le tube éponyme "Surfing Cuties", judicieusement placé en n°1, est redoutablement efficace, avec une belle mélodie, une ambiance western et un timbre de voix qui rappelle celui de l'ami Sixto Rodriguez. Entêtant dès la première écoute.
Même si c'est loin d'être toujours parfait au niveau du songwriting, le talent, le culot et la spontanéité sont bel et bien là. On attend impatiemment la confirmation au prochain album.
Lou Reed, dont Joe est un fan invétéré, observe ça avec émotion, de tout là haut.


L'histoire



Vous allez me demander, et c'est bien normal : "mais comment t'as découvert ce type ?". Voici donc toute la vérité : "affalé dans les hautes herbes des Buttes-Chaumonts, un Bukowski à la main, je suis apostrophé par un type : "tu nous jouerais une petite chanson ?". 1h plus tard, je me retrouve dans l'appartement-studio d'un pote à lui, occupé à savourer un pur malt tout en écoutant de la (bonne) musique. C'est alors qu'il me tend un CD : "écoutes ça quand tu rentres chez toi !". Voilà comment Joe Chicago est entré dans ma vie.


Et en concert, ça déboite


Et comme vous avez de la chance, il sera en concert le 04 octobre prochain à l'International.


Toutes ses chansons : https://soundcloud.com/supercherry



C'est jeudi, 18 septembre



Live Report/


Comment j'ai perdu ma virginité, un soir de septembre



Comme il y a un début à (presque) tout, j'ai participé lundi soir à l'Eldorado Festival, événement pointu qui programme chaque année, au début du mois de septembre, la crème de l'indé et du garage. Dépucelage aussi en ce qui concerne la salle, le Café de la Danse, agréable espace de taille moyenne "caché" dans une ruelle du bouillonnant quartier de la Bastille. Et, ce soir là, ça a plutôt pas mal "danser", pour la soirée du très bon label garage Born Bad.






Violence Conjugale, paire techno made in france exilée dans un squat berlinois pour créer du son en toute liberté, ouvre le bal. L'un aux platines et le second au chant, mèche punk et débardeur à la coule, ils jouent de l'électro bien cadencée mais pas si violente, avec un petit côté new-wave au niveau de la voix et de l'attitude du vocaliste, qui s'inspire très clairement de Ian Curtis. Si ce dernier, assez à l'aise, essaye de détendre l'atmosphère à coups de vannes et de feel-good paroles, du style "c'est l'heure de l'after-work à Paris non ?", son acolyte se trouve lui dans le mal le plus complet, tétanisé par le stress. Tout juste plaisant, et bien moins enlevé qu'une scène de ménage. Seuls les nombreux hipsters présents, justement en "after-work", apprécient, se déhanchant calmement tout en pensant déjà au retour dans leurs appartements du 11e.


La première claque arrive après, avec The Feeling of Love, quatuor français obsédé par l'Amérique. Guitare, basse, synthé, batterie et un son garage-psyché bien efficace, quelque part entre les Cramps et la vague psyché californienne des années 70. Un très beau mélange entre l'urgence du garage et le romantisme psyché. 
Ils ne font clairement pas dans la dentelle, jouant tout leur set sans aucune pause. 40 minutes droit dans ta face. Les 3 derniers morceaux, assez longs et construits sur des riffs de guitare imparables, finissent de nous achever. Avec la voix éthéré du chanteur-guitariste, le résultat est magnifique. On plane tout en secouant nerveusement la tête et les épaules au rythme des guitares garage. 

Au premier rang, je suis littéralement en transe, avec un autre type encore plus atteint, qui s'agenouille régulièrement face au leader. De temps en temps, il se retourne également pour faire des gros fucks à la foule, trop calme selon lui. A la toute fin, le chanteur à la touffe frisée se laisse porter par la foule, gratte en main. Après n'avoir pas dit un mot du concert, ils se tirent sans même dire au revoir. Une façon de nous dire que s'ils sont là, c'est pour la musique, et rien d'autre. Un show mémorable doublé d'une excellente découverte. Ce que me confirme Zoé, jeune rockeuse croisée durant l'entracte "c'était génial, ils sont vraiment bons en live !". On est d'accord.






Seconde claque et pas des moindres avec Magnetix, duo bordelais qui clôt le line-up dans un chaos sans nom. Jusqu'alors plutôt tranquille, une bonne partie de la salle, désormais comble, se réveille sous les coups de boutoir répétés d'un garage-rock brut de décoffrage, qu'elle prend droit dans la tronche. Sur le modèle des Kills, avec une batteuse et un chanteur-guitariste, ils font exploser la température. Déluge de décibels, de riffs crasseux, 50's et accrocheurs, et pogo généralisé dans la fosse, avec une cinquantaine de corps en communion totale. Un rituel païen et libérateur bien plus proche du combat rock que de la danse. Dépassés par cette énergie spontanée, les photographes professionnels sont éjectés du centre de la fosse. Une scène vraiment fun.

Dans le rôle du messie, Looch Vibrato, guitariste émérite et bête de scène impressionnante. Un rockeur pur sang, sauvage comme à la grande époque. Ce soir, c'est sûr, il s'est passé un truc unique, tout le monde le sait. Sans vous mentir, j'y ai perdu ma virginité. Et tout ça avec des groupes hexagonaux, ça plairait à l'ami Arnaud Montebourg.


A la sortie du concert, je rencontre un jeune teenager américain, en vacances en Europe, dégoulinant de sueur. Encore tout émoustillé par le live des Magnetix, il me braille dans mes oreilles sanguinolentes : "it was so great man, those guys are amazing. I love Paris !" L'eldorado du Rock'n'roll.


2 bonnes chansons des héros de l'Eldorado


The Feeling of Love





Magnetix












Jour du seigneur, 14 septembre



Live Report/


"Day of Electro" : du gros son à l'International

En ce jour de célébration des musiques électroniques, le bar à concert bien connu du 11e a mis les petits plats dans les grands. Après avoir remués leurs fesses dans la rue au rythme des chars de la 14e techno-parade, les parisiens ont eut droit à un show électro de plus de 5h, avec 3 Dj's à l'affiche. 
L'affiche de l'événement
Chacun dans son style, les gars mettent l'ambiance dans le sous-sol, bondé comme à l'accoutumée, avec beaucoup de jeunes et un certain nombre de jeunes beautés en chaleur. Tout ce petit monde se laisse envelopper par les vibrations électroniques des gars du label Beat X Changers, qui proposent un éventail de techno assez large, entre house, disco et électro plus jazzy. Mention spéciale aux derniers mousquetaires de la nuit, les fondateurs du label, qui nous envoient une house tabasseuse teintée de jazz de derrière les fagots. Un set explosif et réjouissant, avec du groove et des solos de piano jazz bien branlés. La température monte instantanément, les filles et les garçons s’enlacent. Une odeur de sueur bienvenue, indicateur d'un concert de bonne tenue.
Une très bonne alternative à la soirée officielle. Et, comme l'a signifié notre ami Jack Lang qui ne rate pas une occasion pour prêcher la bonne parole culturelle, "La techno est une musique pacifique. Peu de musiques créent un lien humain aussi aisé et direct". Ce n'est pas moi qui vais le contredire.

Pour finir, l'analyse assez pertinente d'un pote sur le jeu de scène des Dj's : "c'qu'est marrant avec les Dj's, c'est qu'ils se font pas trop chier pour le jeu de scène". Ce qui est souvent vrai : calmes et imperturbables, ils bricolent sur leurs machines face à un public en transe totale. Un contraste toujours amusant à observer.
L'ami Dither, en juin. Imperturbable.

Les deux gars qui m'ont le plus réjouit cette nuit : Dither https://soundcloud.com/dither
                                                               









Samedi 6 juillet


Live Report/


The Who à Bercy : j'y étais


Les jeunes Who dans les 60's


Un fan des Who, avant le concert
The Who, un des plus grands groupes de l'histoire du rock'n'roll, qu'il n'est même plus nécessaire de présenter, était en concert mercredi soir à Paris. Du line-up originel des flamboyantes 60's, il ne reste que deux membres, les deux tauliers du groupe, Pete Townshend, guitariste et compositeur de génie, et Roger Daltrey, chanteur charismatique à la voix tonitruante. En lieu et place de feu Keith Moon à la batterie et du défunt John Entwistle à la basse, les "Who" version 2013 tournent avec le fils de Ringo Starr, Zak Starkey ainsi qu'avec celui de Pete Townshend à la seconde guitare, dont la ressemblance avec son paternel est frappante.
Bercy affichait complet mercredi soir
Premier constat : les papys du rock continuent de déplacer les foules, puisque cet immense salle de 10 000 places qu'est Bercy est pleine à craquer, plus remplie encore que pour Neil Young le 6 juin dernier. Les organisateurs ont choisi de mettre des sièges dans la fosse "debout", un choix étonnant et contestable pour un concert de rock'n'roll. On croise des vieux, des jeunes, et beaucoup de fans arborant le fameux t-shirt des Who au logo "Target", symbole du mouvement Mod. Ce dernier est justement à l'honneur ce soir, puisque la tournée actuelle des anglais est consacrée à Quadrophenia, opéra-rock et album concept mythique composé par Townshend en 1973, qui raconte l'histoire d'un jeune Mod paumé dans le Londres bouillonnant des swinging' sixties.
Les Who sur la scène du POPB
En première partie, les américains de Vintage Trouble, emmené par un chanteur survolté, délivre un Rock vintage aux accents Soul très plaisant. Les guitares électriques et la voix suave du vocaliste, qui fait penser à un Otis Redding Rock, s'accordent à merveille. Il fait son show, faisant chanter le public et traversant la moitié de la salle pour se retrouver à hurler dans les gradins. Parfait pour chauffer le public de Bercy, qui salue la fin de leur prestation par de chauds applaudissements.
Après une entracte de 30 minutes, les Who, ou plutôt ce qu'il en reste, débarquent tels des héros sur la scène, sous des tonnerres d'applaudissements et de "Who, Who, Who!!" braillés par les fans. Pour la mise en scène, trois immenses plateaux argentés ont été hissés derrière les musiciens, sur lesquels on peut lire "Trouble", en référence à leur réputation de groupe explosif sur scène, ainsi que trois grands écrans géants qui diffuseront des images du concert, du film Quadrophenia, des Mods des 60's, et des Who eux même, morts et vivants.
"Out on my brain, on a trainnnn!" (Daltrey)
       Daltrey et Townshend, accompagnés par 5 musiciens (batterie, synthé, basse, guitares), démarrent par les chansons de Quadrophenia, avec pour commencer une magnifique interprétation de 5:15, morceau ample et émouvant avec ses synthés à la limite du grandiloquent, qu'ils étirent sur plus de 20 minutes. "Out on my brain, on a trainnnnn!!", éructe Daltrey avec toujours autant de vigueur. Les images de la mer issues du film Quadrophenia sont diffusées durant le morceau, pour encore plus d'intensité. Les deux vieux rockers sont bien présents, en forme, ça fait plaisir à voir ! Ils enchaînent ensuite avec I am The SeaThe Real Me, et l'épique Love, Reign O'er Me, superbement interprété par Daltrey malgré la difficulté de la partie de chant, qui contient plusieurs passages très hauts perchés. Le groupe est super bien en place, le réglage sonore absolument parfait, et les zikos dégagent une énergie et une intensité réjouissantes.
Même s'il ne casse plus guitares et amplis avec violence, Pete Townshend est toujours là, avec son jeu de scène si particulier, baptisé "windmill", autrement dit faire des moulins à vent avec son bras. Roger Daltrey, même s'il n'a plus la voix de ses 20 ans, chante encore étonnamment bien. Les spectateurs ne s'y trompent pas et s'agitent beaucoup, dansant, chantant et hurlant avec excitation. L'ambiance à l'intérieur de Bercy est littéralement survoltée.
Les Who sont toujours aussi énergiques !
Après avoir joué la quasi-totalité des morceaux de Quadrophenia, les Who interprètent, comme prévu sur le billet, d'autres chansons phares de leur répertoire. A commencer par une magnifique version de Baba O'Railey, durant laquelle des images de feu Keith Moon sont projetées sur les écrans. Les spectateurs applaudissent et crient en signe d'hommage à l'ancien batteur génial des Who. Suivent ensuite d'autres classiques comme Pinball WizardMagic BusYou Better You Bet et la cultissime Won't Get Fooled Again, avec le fameux cri de Daltrey au milieu de la chanson, à son climax, qu'il interprète merveilleusement bien. Une séquence magique ! Townshend et Daltrey terminent par une chanson acoustique jouée à deux, Tea and Theatre, avant de déguerpir en saluant le public, sous un tonnerre d'applaudissements de 5 minutes. On sent bien la satisfaction du travail accompli sur leurs visages. Il n'y aura pas de rappel. Le concert, qui a duré plus de 2h30, fut absolument mémorable. Les Who sont encore loin d'être finis, longue vie à eux !!!


Vidéos du concert :


Vintage Trouble


The Who




Mercredi 19 juin



Live Report/


Alba Lua électrise Paris


Le jeune groupe Bordelais dont tout le monde parle a livré une
prestation aboutie lundi soir au Point éphémère.



"La première partie était très sympa. J'ai découvert Alba Lua sur Soundclound, et leur concert m'a beaucoup plu". Selon son amie, "la première partie était bien, c'est pas mal de connaître comme ça. J'écoute Alba Lua depuis 2 mois et j'ai beaucoup aimé le concert". Une autre a " trouvé la première partie très cool. Une très belle voix, de belles chansons et de belles paroles".
Selon l'attaché de presse régionale d'Alba Lua, "ils ont fait un très bon concert, ça promet un bel avenir". Son amie "aime beaucoup la voix enfantine du chanteur". Deux copines venus ensemble de Bordeaux "n'ont pas vu la première partie. On connaît Alba Lua depuis leurs débuts, à l'époque où il n'étaient pas à 4, ce sont des amis. C'était un peu à l'arrache avant mais là le concert était vraiment cool, ils ont bien bossé leur live. J'adore l'album, c'est la bande-son de l'été, c'est hyper vacances". Pour une des deux, "ça me fait beaucoup penser au groupe Américain Smith Westerns, ils ont exactement le même son". Une autre "n'était pas là pour la première partie. Je connais Alba Lua grâce à des amis communs, comme je viens de Bordeaux. J'ai beaucoup aimé le concert mais je pense qu'ils auraient pu se donner un peu plus. Je suis un peu resté sur ma faim, je pense qu'il y a un gros potentiel qui pourrait être exploité". Voilà pour les réactions.

Le chanteur d'Auden
Alba Lua, jeune groupe français indie pop-folk aux sonorités américaines, était donc en concert ce lundi au Point éphémère. Une prestation attendue, car ils ont ravi à juste titre une bonne partie de la critique avec leur dernier album, Inner Seasons, sorti en avril. Auden, trio parisien confidentiel formé récemment, assure une première partie de qualité. Avec une guitare acoustique, un piano et une batterie minimaliste, ils nous livrent une musique Folk décharnée et vaporeuse, à grand renfort de chœurs éthérés. Le chanteur, à la voix douce et envoûtante, chante en français des paroles aux accents poétiques. C'est leur premier concert et ça se sent, mais ils sont quand même bien en place, malgré un léger problème technique sur la fin. "Je vais juste me réaccorder", s'excuse le chanteur. Le public, au départ assez distant, se rapproche au fur et à mesure du concert, en signe d'approbation, pour finalement les applaudir chaudement à la fin.
Les quatre Bordelais d'Alba Lua débarquent à 21h 30 dans une salle maintenant bien remplie. Des fans venus de Bordeaux s'excitent alors au premier rang. Armés d'une mandoline, d'une basse, d'une guitare acoustique et d'une batterie, ces petits génies euphorisent instantanément les spectateurs avec leur savant mélange de folk, de pop et de western aux accents psychédéliques, porté par la voix androgyne inimitable du chanteur-guitariste. Ajoutez à ça un zeste de country, quand le joueur de mandoline fait du bottleneck avec un briquet. Entre leurs comptines pop-folk aux mélodies entêtantes, ils jouent parfois des morceaux plus énervés, bruitistes, à grand coup de larsen. Certains morceaux issus du dernier album, plus exotiques et plus chaloupés, font aussi penser à du Tamikrest et à du Fool's God. Ils sont très bien réglés, on ressent réellement l'assurance du groupe qui tourne désormais de plus en plus, rapport à son nouveau statut de "révélation de l'année". Petit bémol : ça manque encore un peu d'énergie et de punch. Ils assurent mais ne sont pas encore des "bêtes de scène".
Alba Lua
Il y a une très bonne ambiance dans le public, qui salue la fin de chaque titre par un tonnerre d'applaudissements et de cris excités. Il connaît bien le groupe et reprend même en chœurs certains morceaux. Les Bordelais terminent leur set par un titre assez rock'n'roll, qui provoque un joyeux bordel dans la petite salle du Point éphémère. Les spectateurs en veulent encore et font un boucan pas possible pour un rappel, qu'ils obtiennent en 2 minutes. Alba Lua revient sur scène et conclue en beauté avec deux derniers morceaux. C'est entendu, le groupe de Bordeaux a conquis les cœurs parisiens.


Je croise ensuite le bassiste d'Alba Lua, qui répond avec gentillesse à mes questions. "On a déjà joué plusieurs fois à Paris. Le concert de ce soir était cool dans l'énergie, mais il y a quelques trucs à revoir au niveau de la propreté". Sur l'ambiance, "j'ai bien aimé". Concernant la salle, il "aime bien, avec le public à côté comme ça c'est cool".

"le concert était cool dans l'énergie"
 Ils joueront cet été "à Barcelone et à Benicassim. Je sais pas comment ça va se passer sur ces grosses scènes. Cet été, c'est pas une grosse tournée, on a 3,4 concerts". Face au succès croissant de son groupe, il assure "avoir toujours la même vie. On continue à bosser. C'est cool de passer dans les Inrocks, on sent qu'il y a un truc qui se passe mais ça ça change rien à nos vies".




Samedi 8 juin



Live Report/


Le Loner enflamme Bercy


Bercy bien rempli
Actuellement en pleine tournée européenne, Neil Young, assurément l'un des plus grands singer-songwriters de Country, Rock et Folk du siècle dernier, faisait escale à Paris jeudi soir. Le concert se déroulait à Bercy, la plus grande salle de spectacle de la ville sans compter le stade de France, avec ses 16 000 places et sa scène gigantesque. Comme on pouvait s'y attendre avec une telle légende à l'affiche, l'affluence est très importante. Les abords de la salle sont noirs de monde, la file d'attente pour accéder à la fosse s'étendant sur des centaines de mètres dans le parc de la Cinémathèque. Cette impression se confirme une fois rentré à l'intérieur : la fosse est remplie et les gradins sont occupés aux 9/10. Pas tout à fait sold-out mais presque. Toutes les générations sont représentées, du vieux hippie de 65 ans sur le retour en passant par le jeune fan des 70's et le trentenaire.

La première partie, assurée par les mexicains Los Lobos, groupe mexicain country-rock-blues des années 70, est assez molle et peu convaincante. Ils concluent leur set avec leur fameuse reprise de La Bamba face à une certaine indifférence du public, qui est venu pour voir Young. Après une entracte de 30 minutes, les choses s'agitent enfin sur la scène, sur laquelle sont disposées à la verticale d'énormes mallettes de rangement de matériel, objet emblématique des tournées de groupe. Comme toujours à Bercy, la mise en scène est impressionnante.

Une mise en scène impressionnante
 Quelques hommes habillés de blouse blanche font alors leur apparition, alors que résonne l'hymne français, en guise de remerciement à l'hôte d'accueil du soir. On peut trouver ça drôle ou assez bizarre, c'est selon. Vient ensuite le meilleur de ce show introductif : les quatre énormes mallettes s'ouvrent les unes après les autres, assez lentement, avec en fond sonore "A Day in A Life" des Beatles et ses montées symphoniques. Cette mise en scène réglée au millimètre nous fait saliver en nous faisant croire que Neil Young va sortir d'une de ces grosses boîtes, tel un héros. Il n'en est rien, le Loner arrive juste après la fin de ce très beau spectacle, chapeau vissé sur la tête et guitare électrique en bandoulière, accompagné de son fidèle Crazy Horse. Après avoir été accueilli comme il se doit, il démarre pied au plancher avec Love and Only Love, extrait de son album grunge sorti en 1990, Ragged Glory. Il enchaîne ensuite avec les titres les plus rock de son répertoire, issus de son dernier album Psychedelic Pill, de l'album Le Noise et de tous ceux qu'il a composé avec le Crazy Horse. Durant cette première partie de concert très électrique, il fait durer les chansons, fait du larsen à tout va et tapent des solos accrocheurs. Neil Young est là et bien là, à 67 ans, en forme comme jamais. Il impressionne par son énergie et s'amuse comme un petit fou. Debout durant 2 heures, il remue de la tête et se déplace beaucoup, pour par exemple jouer en complicité avec son guitariste. Il impressionne aussi par son chant toujours de qualité, presque similaire à celui du jeune barde du début des années 70. Sa voix n'a presque pas pris une ride.
La partie Folk avec le logo de Woodstock
Il sourit de temps à autre et salue même le public au bout de 20 minutes, avec un "How you doin' Paris?" bien senti qui fait plaisir aux spectateurs.

Il lâchera ensuite quelques mots durant la suite du concert : sympa le Neil ! A la fin du 5e morceau, lui et ses musiciens saturent le son de leurs instruments à l'extrême en se collant aux immenses amplis Fender, jusqu'à donner l'impression d'un bruit d'orage violent. De la fausse pluie en images de synthèses tombe alors sur la scène, obligeant les musiciens à mettre un ciré jaune et finalement à décamper définitivement.

C'est la fin du premier temps du concert. La déco du fond de la scène change, le cow-boy sur son cheval de Psychedelic Pill laissant place au logo de Woodstock. Neil Young revient alors sur scène seul, avec sa guitare acoustique et son harmonica, pour nous jouer ses chansons folk. Il interprète avec grâce son plus grand succès, Heart Of Gold, repris en coeur par tout le public. L'applaudimètre explose. Après une très belle reprise de Blowin' in the Wind de Bob Dylan, il passe au piano pour interpréter une chanson jamais enregistrée, Singer Without a Song,
Neil Young
accompagné par son guitariste à l'acoustique. Une jeune fille avec sa guitare rangée dans une housse apparaît alors puis disparaît sans jouer si chanter, pour illustrer le texte de la chanson. Les musiciens du Crazy Horse reviennent alors sur scène pour la dernière partie du concert, qui comme celle du début sera très noisy. On a droit entre autres à My My, Hey Hey qui contient le mythique passage "it's better to burn out than to fade away" et à Fuckin' Up, chanson au texte très cru reprise en cœur par une bonne partie du public, qui s'excite beaucoup en entendant le mot "Fuck". L'ambiance durant tout le concert est très bonne.Les spectateurs sont ravis de voir un Neil Young aussi fringuant et le font d'avoir à grand renfort de cris et d'applaudissements longs et fournis. Les plus fans sont littéralement possédés et bougent frénétiquement en fermant les yeux. Après 2h de concert de haute volée, le Loner s'eclipse, avant de revenir pour un court rappel d'une chanson. Il interprète Roll Another Number avec ses musiciens avant de quitter la scène pour de bon. La salle se vide aussi rapidement qu'elle s'est remplie. Well done Mr Neil Young and see you next time !

Vidéos du concert :

Heart of Gold




Lundi 27 mai



Interview/


Omar Sosa : "j'écoute plus les morts en fait !"

Près de 2 heures après la fin du concert, qui je le répète fut de très haut niveau, j'ai réussi à accrocher Omar Sosa pour une courte interview, avant qu'il ne prenne son taxi pour filer au restaurant. Malgré son timing apparemment serré, il a accepté avec gratitude de répondre à toutes mes questions.

-C'est la première fois que vous jouez à Paris ? 

-Omar Sosa :  "Non non c'est pas la première fois. J'ai déjà fait pas mal de concerts ici à Paris.

-Le concert vous a plu ?

-OS :  Oui j'ai beaucoup aimé, le public était généreux. Tout s'est très bien passé.

-Quels sont vos artistes de jazz favoris ? 

-OS : Alors, pour les vivants, Herbie Hancock et Ornette Coleman. Et pour les morts, Thelonius Monk, Miles Davis, Dizzy Gillespie, Chet Baker et Andrew Hill. J'écoute plus les morts en fait ! (rires).

-Que représente la musique Jazz à vos yeux ?

-OS : Pour moi, le Jazz représente avant tout la Liberté.

-Comment définiriez-vous la musique que vous jouez ?

-OS : Je fais du Jazz Afro-Cubain.

-Que pensez vous de l'état de santé de la "Culture" en France ?

-OS :  Je pense qu'il y a beaucoup d’opportunités, de possibilités, ici. Les jeunes peuvent écouter et voir toutes sortes de musique, c'est une vraie richesse.

-Pourquoi avoir composé un disque hommage au Kind of Blue de Miles Davis ?

-OS : C'est assez simple. Miles est un des rois du jazz, un des maîtres du jazz. Et ce disque est un chef-d’oeuvre indispensable, dans la discothèque de toute personne appréciant la musique.

-Enfin, quel est votre écrivain préféré ? Et votre groupe de musique, hors du jazz, préféré ?

-OS : Gabriel Garcia Marquez (romancier colombien). Mon groupe préféré, Earth, Wind and Fire"(groupe américain mythique de jazz-funk)


PS : Désolé pour les problèmes de police, j'essaye actuellement de rétablir la situation.


Dimanche 26 mai


Live Report/

Omar Sosa

 Omar Sosa hypnotise le studio 106


Omar Sosa, pianiste de jazz cubain, était en concert mercredi soir au studio 106 de la Maison de la Radio, dans le cadre du « club Jazzafip ». À notre arrivée sur les lieux à 19h, on découvre une salle bien remplie, impatiente de voir ce maître du jazz afro-cubain à l’oeuvre. Le pianiste est déjà en place, avec, à ses côtés, le quintet The Afri-Lectric Experience, composé d’un trompettiste, de 2 saxs, d’un contrebassiste et d’un batteur. Après un premier morceau et une interview d’Omar seul avec les animateurs de FIP, le groupe livre une prestation quasi-instrumentale de 30 minutes intense et généreuse, presque sans temps mort, ravissant le public présent. Applaudissements fournis, gesticulations nerveuses, grands yeux ébahis, cris de joie : autant de signes qui ne trompent pas quant à l’enthousiasme des spectateurs. Sosa nous présente son dernier projet, « Eggun », un hommage au mythique « Kind of Blue » de Miles Davis. S’il s’en inspire, le cubain ne copie à aucun moment.
Sosa et son groupe au studio 106 mercredi
Il compose une nouvelle version bien à lui, aux sonorités afro-cubaines et à l’orchestration plus riche. Le résultat est jouissif, surtout en live. Toujours très rythmée, douce et mélodieuse, leur musique alterne entre phases bien groovy et passages plus chill. Sosa, bien accroché à son « Steinway ans Sons », délivre une partition très inspirée, entre caresses mélodieuses et attaques plus agressives. On sent une réelle alchimie entre lui et son groupe, dont chaque musicien est très bon instrumentiste. Notamment les saxophonistes et les trompettistes, qui nous gratifient de solos de très haut niveau. Cette mixture de jazz et de musique afro-cubaine, enveloppée dans l’écrin Kind of Blue, est un véritable orgasme auditif. Ajoutez à cela l’énergie, l’envie et le plaisir qu’éprouvent manifestement les musiciens et vous obtenez un show mémorable. Ils quittent la scène vers 20h30, après avoir remercié le public, sous les hourras.
Le cubain joue par moments sur 2 pianos à la fois
A la sortie du concert, je recueille les réactions de quelques spectateurs. "Omar Sosa était excellent, accompagné par des individualités déjà aguerries", me glisse un trentenaire africain sapé à la cool. Pour une autre, « c’était très joyeux, ça faisait danser, c’était magnifique. J’ai beaucoup aimé ». Un homme blond d'une trentaine d'années me confie ensuite : "c’était génial, il y avait du punch, les musiciens étaient au top, ça fait plaisir à voir". La plupart ne le connaissait pas avant le concert de ce soir, sauf un homme qui avait « déjà entendu son nom, une fois ». Ce fut pour tous une « très bonne découverte ». Une spectatrice était même motivée pour « offrir l’album à quelqu’un ». Visiblement, Omar Sosa a conquis beaucoup de cœurs et d'oreilles ce soir.
30 minutes après la fin du concert, à la sortie de la maison de la radio, je croise un des musiciens, « très content du concert de ce soir. Une très bonne ambiance ». Il me parle ensuite brièvement du concert du lendemain, à l’Alhambra, où ils seront « beaucoup mieux habillés. Ce sera un vrai show, avec même un petit côté théâtral ». 




Mardi 7 mai



Live Report/


Ce week-end, la Bellevilloise a vibré au rythme
des Balkans




Samedi soir se tenait à la Bellevilloise, haut lieu culturel parisien organisant concerts, expositions, projections et spectacles en tout genre, une "Soirée Tzigane" célébrant les musiques de l'est européen, tziganes, manouches, balkaniques.. En somme, une célébration de la musique "gitane", et d'une certaine manière de faire la fête, pas de danse inspirés et champagne à l'appui. Au programme, des concerts et deux Dj set en clôture, dont celui du désormais mondialement connu Shantel, auteur notamment du tube "Disco Partizani", qui mêle avec brio musique électronique et sonorités balkaniques.

Quand on arrive sur les lieux à 21h30, il y a déjà foule dans ce vaste espace culturel du 20e arrondissement perché sur les hauteurs de Ménilmontant.
Valentina Casula sur la scène du Forum
Kabbalah sur la scène du Club
Le premier groupe, Valentina Casula, se produit déjà sur la petite scène située au centre de la salle principale, le "Forum", pièce très vaste comportant un haut plafond et deux grands balcons latéraux. Un contrebassiste et une guitare électrique accompagnent une chanteuse en habit de l'est pour une audacieuse mixture de musique tzigane, jazz et du monde. A la fin de leur prestation, on se dirige avec excitation vers le sous-sol où se trouve le "club", pour la suite des concerts. Une grande salle là encore, mais une ambiance beaucoup plus cosy. C'est alors au tour de Kabbalah de monter sur scène. Composé d'un line-up surprenant avec un batteur, un violoncelliste utilisant son instru comme une contrebasse, une violoniste virtuose, un
saxophoniste/flutiste/synthé/rappeur et un guitariste chanteur, ce groupe produit une musique originale et efficace, sorte de balkan music fusion où la musique tzigane invite à sa table le rap, le rock ou encore la funk. Tout en étant singulier, cela reste très cohérent, une vraie réussite! De plus, les 5 membres du groupe sont tous des virtuoses de leur instrument, nous gratifiant chacun leur tour de solos enflammés. Ils sont vraiment généreux et énergiques, ce qui établit tout de suite un bon contact avec le public qui s'excite rapidement. On danse et on tape des mains au rythme parfois effréné de la musique tzigane. L'ambiance dans la salle est réellement survoltée. Quand ils se retirent, ils laissent au groupe suivant un auditoire chauffé à blanc.
O'Djila
O'Djila entre alors en scène, vers 23h. Ils sont 5, en costard de manouche et lunettes noires de circonstance, et jouent un klezmer juif plus traditionnel, avec de l'accordéon et de la clarinette. Leur concert est agréable mais leur prestation est beaucoup moins énergique que celle du groupe d'avant, ce qui se traduit par une baisse de l'excitation du public, qui danse moins et s'ennuie même un peu sur la fin. Ils terminent par des reprises de chansons françaises à la sauce klezmer, en réadaptant par exemple "Elisa" de Gainsbourg. Plaisant.

Place maintenant aux Dj sets, avec en premier aux platines un mythe des nuits parisiennes, j'ai nommé Dj RKK, figure historique de Nova. Mélomane averti et fin connaisseur des musiques du monde, il nous envoie un set explosif et ultra dansant, composé en majorité d'électro balkanique mais aussi de quelques beats drum'n'bass sur la fin. Le public, soudain rajeuni, est littéralement survolté, l'ambiance assez énorme. Seul point faible, on a un peu l'impression qu'il est là pour nous faire patienter avant l'arrivée de Shantel, car il n'interagit quasiment pas avec la foule et reste bien gentiment derrière ses machines, esquissant parfois quelques mouvements de bras.
Shantel
Quelque chose d'étonnant se produit alors, Shantel arrive sur scène avant même la fin du set de RKK, sans dire bonjour à personne. Il reste assis derrière le Dj de Nova durant une bonne demi-heure, à tel point qu'on finit par se demander si il va vraiment jouer, lui, la star de la soirée. Finalement, malgré les inquiétudes de certains spectateurs -dont moi- , qui commençaient à s'impatienter, il prend place aux platines vers 1h30 du matin. C'est la tête d'affiche de la soirée, on l'a déjà vu à l'oeuvre à plusieurs reprises, il devrait mettre le feu à la Bellevilloise se dit-t-on, malgré la configuration un peu différente qu'est le Dj-set où il est seul, sans son groupe et sans sa guitare. Malheureusement, pour une raison obscure -un problème technique, un caprice de star-, sa prestation est assez moyenne, à la limite du foutage de gueule. Il ne dit même pas bonjour en arrivant, attendra près d'une demi-heure avant de prendre la température via le sempiternel "ça va la bellevilloise?!", et tire la gueule durant 2h. On est bien loin du Shantel showman et de la "fête à la bohémienne" qu'il prêche habituellement. Cette fois-ci, pas de bain de foule, pas d'osmose avec son public chéri. Malgré ça, l'électro balkanique qu'on aime est bien là, machine à danser ultra efficace. Il mixe ses plus gros tubes comme "Disco Boy" et nous gratifiera quand même d'une belle version du tube "Disco Partizani", qu'il fait durer 15 minutes, en prenant le micro pour la partie chantée. En revanche le public est lui bien là, dansant et hurlant durant 2h dans une salle pleine à craquer. Au final, une très belle soirée Tzigane mais une grosse déception sur Shantel, qui était pour beaucoup l'attraction de la soirée.


Ci-dessous, la vidéo du concert de Kabbalah, à mon sens le meilleur groupe de cette soirée :











Lundi 22 avril

Live Report/

D-Day

Chinese Man débarque à l'International





Samedi se tenait la 3e édition du Disquaire-day, déclinaison française du Record Store Day américain, qui célèbre le temps d'une journée événement les disquaires indépendants en grande pompe, à grand renfort de concerts gratuits et d'arrivage de vinyles sortis en édition (très) limitée. Parmi les précieuses galettes en acétate ayant débarquées en terre française ce week-end, on peut citer des exclus de Notorious Big, Metronomy, David Bowie, Django Django, Jake Bugg ou encore Jimi Hendrix. Côté Live, une centaine de concerts en entrée libre était prévue aux quatre coins de l'hexagone, avec entre autres les désormais très convoités La Femme à Auray en Bretagne, Miossec à Brest ou encore Alex Beaupain et Wax Tailor sur Paname.
L'international, rue moret à Paris
Bats Brigade
A l'International, bar/concert du 11e arrondissement situé à quelques encablures de Ménilmontant, une très belle soirée était programmée, avec un Dj set des héros marseillais Chinese Man en clôture. Avant eux, deux autres groupes ont échauffé les mollets des spectateurs, particulièrement nombreux en cette journée so special. Billy Noel, jeune duo rémois repéré récemment par Les Inrocks Lab, ouvre le bal à 21h. Entre pop et chanson-française, ils n'ont pas su choisir, et nous offrent une musique ennuyeuse et incohérente. Leur concert est assez mou, le public peu réceptif et assez calme. Arrive ensuite à 22h un autre groupe originaire de Reims, Bats Brigade, side-project de 4 membres des magnifiques Bewitched Hands, qui va réveiller un public jusqu'alors léthargique. Emmené par un chanteur exalté qui chante à la façon de feu Ian Curtis, le groupe rémois s'inscrit dans une veine new-wave très années 80, avec des synthés froids et des arrangements sombres, qui captive et secoue l'auditoire. Ils sont hyper bien en place, généreux et énergiques, ce qui produit tout de suite un très bon contact avec le public, ravi, qui se met à danser frénétiquement. Sur certains morceaux, le chanteur ainsi qu'un des 2 joueurs de synthés se mettent à rapper avec talent, ce qui, par dessus une atmosphère new-wave, produit un mélange explosif ultra réussi qui met encore un peu plus le feu au sous-sol de l'International. Plusieurs rappels et des tonnerres d'applaudissements concluent un concert mémorable.

Chinese Man
Ce groupe va exploser c'est sûr, tant leur son est original et percutant. Surchauffée, la salle est maintenant prête à accueillir comme il se doit les 2 Djs de  Chinese Man, combo Hip-hop/Electro/Reggae désormais star en son pays. Dj Le Yan et Dj Scoob Le Roi débarquent à 23h30 devant un public acquis à sa cause. Durant plus de 2 heures (oui, j'ai bien dit 2h!), les spectateurs s'excitent violemment et les corps s'entrechoquent, à l'écoute de certaines de leurs compositions les plus connues, comme le tube Hip-hop/Jazz envoûtant I've got that tune, les plus récentes Miss Chang et Racing with the Sun, et de samples de grands classiques connus de tous comme Satisfaction des Stones, Hound Dog d'Elvis ou encore Deceptacon du Tigre. Ils passent aussi des titres de rock 50's et de musique brésilienne, qui font danser filles et  garçons. Dans une petite salle remplie à ras-bord, le contact entre les 2 Djs et le public est total. Des spectateurs survoltés montent sur scène pour s'éclater à 1 mètre des Chinese Man que l'on sent en pleine forme. Ils suent à grosse goutte, tout comme le public, donnant tout ce qu'ils ont dans le ventre. Après deux heures de show mémorables, ils concluent avec Killing in the Name des Rage Against the Machine qui finit d'achever les jambes du public mises à rude épreuve. Ce n'est pas la première fois qu'ils se produisent à l'International, mais c'est, dixit un des 2 Djs, "la meilleure ambiance" qu'ils aient connu dans ce sous-sol de la rue Moret. On confirme!

Ci-dessous, deux vidéos du concert de samedi soir:

Chinese Man:

Bats Brigade: 




Vendredi 19 avril 




Du Rock et des Femmes

3 Girls-band se produisaient hier pour la deuxième soirée
des « Femmes s'en mêlent »



Novella

La 2e soirée du festival féminin de musique indépendante, qui se tenait hier soir au Point Éphémère, a démarré sous le signe du féminisme. Entre 18h et 20h, les spectateurs présents ont pu échanger avec une Pussy Riot emprisonnée grâce à une liaison vidéo Skype. Un texte de sa création
fut aussi exposé sur les murs de la grande salle.
Après cette introduction politique, le jeune trio londonien Novella ouvre le bal, dans une salle assez bien remplie. Ces trois jeunes filles, récemment repérées par le NME, délivrent de jolies pop-songs au son garage, parfois dissonant, mais la prestation est assez molle. Une bonne découverte musicale cependant. 
Tiger Bell
Arrive ensuite un ouragan Punk nommé Tiger Bell, qui va tout détruire sur son passage. Ces 4 suédoises jouent un Punk Rock élémentaire, en 3 accords et 2mn30, avec une énergie dévastatrice, telles des Hives féminines. Elles enchainent des tubes jouissifs avec un plaisir et une générosité rares, ratissant chacune la scène de long en large les jambes en l'air. La chanteuse a une voix incroyablement puissante et très juste, la batteuse une frappe ultra lourde, et la bassiste est littéralement survoltée. Elles sont vraiment rodées et très bien en place.  Entre deux chansons, elles passent un message à leurs sœurs punk des Pussy Riot, avant de reprendre violemment leurs grattes. Elles achèvent un public conquis avec une reprise de « Ça plane pour moi » de Plastic Bertrand, avec toujours autant de punch. Tonnerre d'applaudissements.
The History of Apple Pie
La soirée se termine par le concert du groupe londonien The History of Apple Pie, qui vient de sortir son premier album sur le mythique label anglais Rough Trade. Ils sont 5 sur scène, 2 filles et trois mecs, et nous délivrent un agréable rock garage aux accents psyché et aux mélodies pop sucrées. Leur atmosphère musicale fait parfois penser à du Radiohead. Un cocktail assez réussi, mais la présence sur scène n'est pas terrible. Il faut attendre la fin pour assister au miracle, avec un dernier morceau ultra psyché et ultra intense qui n'en finit pas et qui hypnotise une bonne partie du public. Ils quittent la scène alors que le son des guitares saturées flotte encore dans la salle. Après une telle soirée, le constat est sans appel: les rockeuses n'ont rien à envier aux rockeurs.


Pour le plaisir, une dernière photo, où l'on voit le guitariste de THOAP irradié de lumière

en plein solo:






Mardi 16 avril 2013


Soleil obscur


Après un premier album très prometteur, Suuns confirme avec
un nouveau disque splendide, passionnant et ambitieux

            Le jeune groupe canadien Suuns avait surpris son monde en 2010 avec «Zeroes QC», premier effort déjà très excitant. S'en était suivi une tournée mondiale qui marqua les esprits et les oreilles de nombreux festivaliers. Mais ça restait une formation assez confidentielle.

 Avec leur nouvel album, le bien nommé «Images du Futur», ovni électro dense, complexe et obsédant, ils frappent un grand coup qui va à coup sûr les propulser vers les sommets. Leur son est à l'image de la pochette, déformé, tortueux et bien tordu. La guitare est ultra saturée, l'atmosphère sombre, inquiétante, et le chant du leader Shemi Ben hargneux et possédé, même il se fait parfois plus doux et mélodieux. «2020», avec ses guitares complètement tordues et ses intenses moments de flottement, est un morceau génial et malsain. Une véritable expérience sensorielle, écouté au casque les yeux fermés.

 Le bien nommé «Edie's Dream», plus lent et plus doux, où le chanteur paraît moins torturé, est une douce rêverie. «Images du Futur», avant dernier titre, est un instrumental sombre, ample et hypnotique, façon Sigur Ros. On pense aussi souvent aux Dandy Warhols, pour ce côté expérimental, progressif, désordonné et un peu fou. L'album, assez long, se clôt par une chanson au titre pessimiste, «Music won't save you», au son toujours très captivant. Pour fuir la réalité, ne prenez pas de drogue, ne partez pas en road-trip, écoutez plutôt le dernier Suuns, prouesse artistique déjà à ranger sans hésitation parmi les meilleurs album de 2013.



Ci-dessous, "2020", titre hypnotique et intense issu de leur nouvel album:





Dimanche 20 Mai



Carlton Rara, Franco-Haitien à la voix très savoureuse.



     C'est à l'occasion d'un concert gratuit organisé par FIP dans un des studios ouverts

au public de Radio-France que j'ai découvert Carlton Rara. Programmé en première partie
d'Anthony Joseph and the Spasm Band, ce dernier, de nationalité Franco-Haitienne, a délivré un
set émouvant, fièvreux et très prenant. Mister Rara est le leader/chanteur et sort ses albums
sous son nom à lui. Il s'accompagne sur scène et en studio de pas mal de musiciens, guitaristes,
Premier album de Carlton Rara, sorti en 2008.
percussionnistes.. Lors de sa prestation à Radio-France il avait à ses côtés deux guitaristes, un bassiste, et un joueur de djembe et autres percussions afro-antillaises.
 Niveau musique c'est incroyablement rafraîchissant, revigorant, touchant.On pourrait qualifier ça de musique caribéenne aux accents funk et jazz, parfois blues, bourrée de groove et de rythmiques chaloupées, de celles qui vous font remuer votre derrière. Malgré ses accents funky ça reste très léger, loin de la Funk music traditionnelle, car c'est avant tout un son Caribéen, doux et chaud. A un moment un guitariste, le percussionniste et le bassiste s'éclipsent, ne restent alors plus que Carlton Rara et le plus vieux des deux gratteux. Ils nous sortent alors un bon vieux blues des cavernes, aux sonorités caribéennes, avec une seule guitare acoustique et la voix de Rara, qui se marie parfaitement bien à ce type d'ambiance. Magnifique instant !
 Sinon on peut dire que les deux guitaristes sont d'un excellent niveau, surtout le plus jeune, qui, avec sa Fender, nous sort des solos incroyables, tout en dextérité, en feeling, et en fluidité qui lorgne parfois vers un son Pink Floydien. La basse ronronne, lourde et funky. Le percussionniste, un Africain bien black aux belles dreadlocks, a lui le rythme dans la peau, il sourit, jubile sur son djembe. La voix du chanteur Carlton Rara vaut à elle seul le détour, douce et grave, un tantinet éraillée, mais surtout d'une beauté et d'une justesse dérangeante. On a vraiment l'impression qu'il force à peine, et pourtant, la puissance, la présence vocale, est forte, très forte. C'est naturel chez lui. Il faut aussi souligner qu'il chante en Créole, sa langue natale, ce qui sonne très bien en musique. En plus, il a le sens de l'humour, nous sortant entre les chansons deux trois mots marrants, bien sentis, qui font rire le public, assez nombreux dans les gradins. Son style ainsi que son jeu de scène sont comme sa musique, libres et radieux. Il est pieds-nus, danse, chante, sourit. Une très agréable surprise que je vous recommande vivement. D'ailleurs en sortant du concert j'ai même failli acheter l'album, ce qui est rare juste après une prestation d'artiste.
Son deuxième et dernier album, Home, est sorti en 2011.

Ci-dessous, un extrait de son premier album  :








Dimanche 29 Avril



Des Texans à Paris



Les Strange Boys étaient en concert hier soir à La Maroquinerie, petite salle située non loin de Ménilmontant à la programmation indépendante souvent alléchante. Ce groupe apparu assez récemment se compose de 4 jeunes garçons Texans, en provenance d'Austin, fans d'un son rock'n'roll pur jus aux accents garages et de mélodies simples et accrocheuses. Après avoir sorti un album remarqué en 2010, Be Brave, et un autre album en 2011, ils ont acquis une certaine reconnaissance et font désormais partie du paysage du Rock indé actuel, tendance garage.

Le chanteur et un des deux guitaristes des White Rabbits
La première partie était assurée par les White Rabbits, jeune formation qui vient de sortir son troisième album. Au nom faisant référence à la chanson phare des Jefferson Airplane, ce groupe vient lui aussi d'Amérique et propose une musique déroutante entre pop foutraque et accents garage. Ils sont 6 sur scène et le line-up est assez surprenant : deux guitaristes (les deux pouvant alterner rythmique et solo), un bassiste, un pianiste chanteur qui prend aussi la guitare et deux batteurs, l'un assis derrière des fûts classiques et l'autre debout derrière deux ou trois caissons. Ils sont vraiment convaincants et très énergiques, surtout le batteur debout qui à vraiment l'air shooté à la coke! Le chanteur, à la voix pop très haut perchée, est très remuant et dégouline de sueur au bout d'à peine 15 minutes. Les rythmiques proposées par les deux batteries sont très chaloupées et originales, les guitares carburent à la fuzz et au reverb, la basse est lourde et sautillante. L'atmosphère sonique de ce groupe est très intense. Ce son dense et complexe porté par un groupe très à l'aise sur scène ravit le public qui salue la fin de chaque chanson par un tonnerre de cris et d'applaudissements.


 Les 4 Stranges Boys déboulent ensuite et entament leur set par leur super chanson Night Might, à la mélodie imparable et aux guitares garages accrocheuses. Quelques spectateurs au premier rang, ravis d'entendre une musique rock aussi élémentaire, s'agitent et bousculent leurs voisins autant qu'ils peuvent. Cependant le chanteur ne fait pas le solo d'harmonica qui arrive normalement au milieu de la chanson, celui-ci est remplacé par une partie de guitare. Ils enchaînent alors durant près d'une heure de nombreux titres au son rock'n'roll vintage, teintés de blues pour certains, de country pour d'autres, issus de leur dernier album et de l'album Be Brave. Leur line-up est très classique : batteur, bassiste, chanteur/guitariste et guitariste soliste. Les structures des chansons sont très simples, basées pour la plupart sur des schémas rock vus et revus. La batterie assez limitée ne fait qu'accompagner le reste des instruments, mais le son rock et son rythme basique et entraînant passent très bien. Cependant ils sont incroyablement sages et manquent cruellement d'intensité, d'envie, peut-être fatigués par une tournée qui se termine ce soir même. Ils ne bougent presque pas, n'ont aucun jeu de scène, et à part le chanteur font presque tous un peu la gueule. Ce dernier essaye tout de même de parler avec le public, mais ça dure trois secondes et il n'a rien à dire, le pauvre.


Ce calme me déçoit fortement, j'attendais plus de mouvement et de folie sur scène de la part d'un groupe proposant un tel son sur CD. Leurs cousins des Black Lips, qui ont en commun un même amour du son garage (avec cependant une énergie punk en plus) avaient eux littéralement foutu le feu à cette même Maroquinerie lors de leur passage en Décembre : les spectateurs montaient sur scène, les musiciens s'agitaient dans tous les sens, la sueur dégoulinait de chaque front ... Hier soir rien de tout ça, les 4 Texans ont livré un set presque sans âme et n'ont pas fait honneur à la musique Rock'n'roll qu'ils vénèrent. Certains spectateurs ne s'y trompent pas et s'en vont avant la fin, ce qui est assez rare dans ce genre de salle. Malgré une belle fin durant laquelle ils nous jouent une belle ballade country et What i'd say de Ray Charles, je reste sur ma faim, déçu par ce concert qui promettait tant. Concernant ces Stranges Boys, il vaut donc mieux en rester à l'écoute de leurs albums. ( Ecoutez par exemple Night Might, en vidéo ci-dessus, qui est une véritable petite perle de rock garage)

Ci dessous un extrait vidéo du concert des White Rabbits, qui assura une fougueuse première partie :




Vendredi 13 Avril



OK CHANNEL : un son plus qu'"OK"


Ok Channel est un trio de pop/Rock indépendant inclassable composé par 3 jeunes étudiants Parisiens ayant à peine franchit la vingtaine. Deux membres du groupe, Léo à la guitare et au chant, et Loïc à la basse, étudient la musicologie à Paris 8. Le batteur, doyen du groupe du haut de ses 21 printemps est lui à l'université Paris Dauphine en licence Cinéma. Ils ont formé le groupe il y a plus de 5 ans au cœur des vastes étendues de Lozère, dont ils sont originaires. Depuis leur arrivée dans la capitale il y a 2 ans, ils ne cessent de travailler leur son, multiplie les répétitions et consacrent une large partie de leur temps au groupe. Ils ont aussi fait de nombreux concerts, dans des petits bars mais aussi et de plus en plus dans des lieux fréquentés de la capitale comme le bar rock Pop'in ou encore le bar/concert l'International. Plus récemment ils ont également participé au festival étudiant Ici et demain, pour lequel ils avaient été sélectionné, ce qui leur a permit de jouer dans des salles encore plus renommées, notamment au Petit Bain mais surtout au Point éphémère, la Mecque des hipsters.
La musique d'Ok channel, influencée en premier lieu par Radiohead, mais aussi par la musique expérimentale et le jazz, navigue entre un rock expérimental assez débraillée et une pop indépendante sophistiquée. En dehors de ces considérations stylistiques, forcément vagues et réductrices, Ok Channel est d'abord un groupe qui aime le Live, pour sa part d'improvisation et d'adrénaline. Je les ai moi-même vu récemment au Petit Bain et j'ai été saisi, tout d'abord par ce son inclassable et singulier, mais surtout par leur énergie, leur générosité, leur intensité. Sur scène, à l'image du chanteur léo, ils donnent tout, se lâchent, font les zouaves, et établissent ainsi un vrai contact avec le public. Lors de ce concert, un morceau m'a particulièrement retourné, Man with Microphone, instrumental qui clouerait n'importe qui sur place joué en live. La basse y est percutante et accrocheuse, la guitare sort des accords complexes et dissonants issus du jazz qui claquent et puis s'envolent, la batterie gesticule nerveusement, la tension est partout. Après ce titre psychédélique et addictif, on en redemande. Elle a d'ailleurs recueilli de chauds applaudissements de la part public du Petit Bain.
Après avoir enchainé les concerts en ce début d'année 2012, ils sont allés enregistrer un premier EP au studio La Fabrique de St Rémy les Chevreuses il y a une dizaine de jours. On leur promet un avenir radieux.
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Samedi 4 Juin



Beat Torrent se met au dubstep.


L'immense salle de la Machine du Moulin Rouge
Les Beat Torrent, que j'ai déjà vu en concert à plusieurs reprises, participaient mercredi soir à une énorme soirée parrainée par Puma à la machine du Moulin Rouge. De 23h30 à 5h du matin se sont succédées de nombreuses grosses pointures de l'électro, des plus connues au plus undergrounds dans une salle impressionnante digne des grandes boites de nuit Barcelonaises avec des balcons et un plafond à 10 mètre de hauteur au dessus de la fosse principale..
 Ainsi étaient présents Crazy B de Birdy Nam Nam, Beat Torrent, ainsi qu'un collectif de 3 djs très talentueux j'ai nommé Bobmo, Para One et le tout jeune Surkin. Ces derniers, qui nous gratifièrent d'un son bien "Fat", percutant et chaloupé de 3h30 à 5h du matin, ont d'ailleurs récemment créé leur label dénommé "Marble Music". Le set de Crazy B, placé en premier, a été très décevant, digne d'une techno miteuse qui passerait dans un camping de palavas les flots. 
Des gros noms mais un parrainage puant
En revanche le set de Beat Torrent qui dura presque 2h entre 1h15 et 3h du mat' fut l'effet d'une violente bombe à l'intérieur de la machine. Têtes d'affiche de la soirée ils avaient plutôt intérêt à mettre l'ambiance, ce qu'ils ont fait comme à leur habitude face à une foule conséquente et déchainée. En revanche, contrairement à leurs concerts habituels durant lesquels ils scratchent sur des samples de Nirvana, Daft Punk, Led Zeppelin, Grand Masterflash ou encore Justice, Dj atom et son acolyte passèrent durant plus de la moitié de leur Set de la musique Dubstep made in London bien lourde et bien vibrante. Ils ont donc fait le choix de suivre une mode très actuelle qu'emprunte actuellement une grande partie des djs, des plus branchés comme BT aux plus ringards comme David Guetta ou Laurent Garnier. Mais eux l'ont fait avec un immense talent qui les caractérise, en scratchant toujours sur ces rythmiques lentes et puissantes pour un rendu incroyablement explosif. Un des seuls samples qu'ils passèrent jeudi matin fut l'enivrant et jouissif Aerodynamic des Daft Punk qu'ils firent durer plus de 10 minutes, le ralentissant et l'accélérant alternativement, ce qui propulsa la plupart des cerveaux présents à la machine dans un monde parallèle.
Le gros point négatif de la soirée était le sponsoring de Puma qui envahit toute la salle, des immenses chaussures sur le comptoir du bar aux publicités vidéos qui passèrent en boucle durant 5 h derrière les artistes...


Vendredi 13 mai


M.Ward love the spring in Paris


Le singer-songwriter Américain était de retour à Paris ce soir pour un concert intimiste à la Gaité Lyrique. Découvert il y a 2 ans sur Internet j'avais hâte de voir s'exprimer son talent et sa finesse sur scène.

La première partie était assuré par un jeune groupe Français peu connu dont j'ai oublié le patronyme. La musique de ce trio composé d'un chanteur guitariste, d'un batteur et d'un joueur de mandoline électrique est très réjouissante. De la Folk plutôt moderne teinté de belles mélodies pop. Le chanteur, littéralement possédé par la musique qu'il produit par le biais de sa Takamine électro-acoustique a une voix très aigu, presque androgyne. Cela donne un côté enfantin et innocent à leurs chansons, magnifiquement interprétées. La guitare produit des rythmiques enjouées soutenues par un batteur sautillant qui sont complétées par les solos parfois planants de la mandoline. Le "mandolinien" effectue des passages slidés à l'aide d'un briquet qui se substitue au bottleneck traditionnellement utilisé pour cette technique. C'est précisément quand il joue en slide que leur musique me fait décoller.Ils ne se cantonnent donc pas qu'à la Folk. Ils défrichent sur les terres du rock alternatif et progressif pour un mélange très réussi. On remarque qu'ils n'ont pas encore l'expérience de la scène mais ils se défendent très bien, le jeune leader se déhanchant autant que possible. Les paroles évoquent le sud de la France, la mer, où ils ont poussé leurs premiers cris d'êtres humains. "Vive le sud", crie t-il à la fin du concert en signe d'au revoir. 
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Le chanteur Américain arrive sur scène vers 21h15, après s'être fait attendre quelques minutes. Il recueille d'emblée de chauds applaudissements de la part d'un public qui le connaît bien. Il faut dire que M.Ward n'est pas un inconnu dans le milieu du Folk et du Rock alternatif récent. Après avoir quelque peu galéré dans les années 90 il a obtenu une certaine reconnaissance depuis quelques années maintenant. Il est considéré comme l'un des porte drapeau actuel de la Folk music, à l'instar d'un type comme Andrew Bird. Ce soir il est seul sur scène, à la manière d'un Bob Dylan,  face aux 90 personnes présentes dans une ambiance donc très intimiste. Durant plus d'une heure je suis donc plongé au cœur de l'univers de M.Ward qui se donne corps et âme à son public. Parce qu'il est seul su scène, le contact avec l'artiste est direct, on se sent proche de lui et cela me permet de mieux ressentir ses chansons et sa rythmique Blues/Folk. Un piano Steinwey ainsi qu'une guitare acoustique Gibson lui servent de moyen d'expression musicale. A l'occasion de sa prestation solo, il interprète les titres les plus épurés de son répertoire, ceux qui sont le plus empreints de Folk traditionnelle. Nous n'aurons pas droit ce soir à ses titres plus agités comme Epistemology. Mon attention si particulière me permet de scruter tout au long de sa prestation son jeu de guitare, impressionnant. Il est très doué en picking et a une façon de faire de la guitare toute singulière. Fin connaisseur des racines musicales américaines, Folk, country, blues, il jongle avec facilité d'un genre à l'autre et les mélange de temps à autre. Il s'inspire fortement de sonorités existantes mais y ajoute un songwriting personnel. Ses textes parlent de sa ville d'adoption Portland ainsi que de sa passion pour la musique. Les accords qu'il utilise et sa façon de jouer de la gratte sont réellement inclassables. Malgré sa solitude il réussit à monopoliser toute la scène, n'hésitant pas à se déplacer avec sa guitare et son harmonica durant ses chansons. Sa voix est aussi unique. Un poil nasillarde, feutrée, chaude, et parfois bluesy, elle témoigne de sa grande sensibilité. Il enchante le public avec son univers si personnel et ses ballades Américaines. Quand il passe au piano, le rendu est différent, plus pop/folk, mais grâce à son timbre de voix tendre et sensible l'ambiance reste la même. Je suis littéralement transporté dans l'Amérique des grands espaces lorsqu'il se met à jouer de l'harmonica en même temps qu'il joue de la guitare. Il n'est pas un maître en la matière mais il sait en tirer le meilleur pour accompagner sa guitare acoustique. Des instants d'éternité. A peine une heure après le début du concert il s'en va subitement à la grande surprise du public, déçu.. Heureusement il se rattrape en  effectuant trois rappels durant lesquels il joue les chansons que le public réclame. Un spectateur cri "fisher man dude!!", il fait mine de ne pas entendre et la joue. Un romantique et un comique. Le contact entre l'artiste et son auditoire est totale. Il réussit à établir une certaine complicité avec les spectateurs, en discutant, en rigolant, avec une grande sincérité. "I love the spring in Paris", dit-il d'un air timide mais déluré. C'est un type simple et passionné par ce qu'il fait. Il est tellement cool que lors de son dernier titre il invite un spectateur à l'accompagner au piano. Un grand blond Hollandais présent au premier rang se dévoue et ose monter sur scène. M.Ward lui explique ce qu'il doit jouer au piano, (trois notes) et commence à jouer de la guitare. Après une bonne minute d'hésitation le spectateur, reconverti en joueur de piano d'un soir, s'exécute sans fausses notes tout en tremblant de stress. Rien d'extraordinaire mais il est en rythme ce qui lui vaut une salve d'acclamations de la part de ses comparses du public. Ca adoucit encore plus l'ambiance déjà agréable, tout le monde rit aux éclats devant cette incroyable dénouement. Il n'en croit pas ses yeux de jouer avec son idole. Il redescend, aux anges, conscient d'avoir vécu son heure de gloire. Je lui tape sur l'épaule : "well done man!". Le concert finit donc sur cette note inédito_joyeuse et M.Ward quitte la salle, ému et très satisfait sous de francs applaudissements. Le seul regret est qu'il n'a pas effectué ses titres plus mouvementés, plus rock. C'est un mal pour un bien puisque cela m'a permit de voir éclater au grand jour son amour de la ballade, de l'harmonica et du folk qui transpire chez  ce bonhomme solitaire. Et je ne vais pas m'en plaindre! Un très beau concert de Folk music en compagnie d'un "Grand" de l'underground Ricain!



Mardi 10 mai



Une sirène enflammée!


Après Nofx la toute nouvelle salle de musiques actuelles de La Rochelle a de nouveau fait le plein samedi soir pour le concert de Chinese man. A cette occasion le quartier de La Pallice, hôte de la sirène, s'est métamorphosé : des dizaines de voitures sont garées de manière anarchique autour de la salle et un nombre conséquent de lycéens et d'étudiants squattent dans la rue Kro en main. Cela promet un concert agité. En revanche il faut attendre de longues minutes pour commander un simple demi au bar(ils ne proposent pas de pinte, incroyable).
 C'est donc dans une salle bondée que j'arrive en début de soirée pour assister à la première partie assurée par le collectif strasbourgeois Lyre le Temps. L'ambiance est déjà survoltée pendant leur live set, grâce à tous les jeunes présents qui sont prêt à s'éclater sur fond de musique électronique. Deux djs et un chanteur forment le crew LLT qui produit une musique à dominante électronique agrémentée sur certains morceaux de beats Hip-hop, de quelques sonorités jazz et parfois même de riffs de guitare rock préenregistrés. Tous les morceaux qu'ils effectuent sont des compositions, ils ne sont pas le genre de Djs assembleurs de samples. En revanche, à l'instar de Beat Torrent, les deux djs déforment leurs compositions électroniques en scratchant à tout va, technique à laquelle le public répond instinctivement par des mouvements de tête et de bras incessants. Quand au chanteur, il tente tant bien que mal de trouver sa place parmi ces sonorités électroniques mais son timbre de voix trop classique ne s'accorde pas vraiment avec le turntabilism. En tout les cas un bon mix de 45 minutes qui chauffe à merveille une salle pleine à craquer.
Le crew Chinese man débarque sur la scène vers 21h30 devant une foule acquis à sa cause. Nul besoin pour la tête d'affiche de demander 4 ou 5 fois si les spectateurs vont bien, dès son premier essai le compteur décibel explose. Je félicite d'ores et déjà la sirène pour cette programmation digne d'une fin de soirée de festoch' qui a logiquement plu au jeune public Rochelais, connaisseur en la matière.
Le groupe se compose de 4 djs et d' un chanteur qui alterne les phrasés rap et reggae. Le "son" Chinese man est à la lisière entre le trip-hop, le hip-hop et l'électro. Comme d'autres formations plus ou moins similaires telles Wax Tailor Chinese man est donc une formation hybride. Un style ressort quand même plus que les autres à l'écoute de cette formation, le Trip-hop, de part l'ambiance planante et le melting pot musical. Le trip-hop de chinese man est singulier, il est souvent rythmé, agressif,  et ne se cantonne pas aux ambiances expérimentales et plutôt lentes souvent présentes dans ce genre de musique. L'influence Hip-hop, également très présente y est pour quelque chose. Le côté Hip-hop provient du chanteur/rappeur, des beats hip-hop de certaines chansons ainsi que de quelques samples de Grand-Masterflash utilisés à la fin de leur live-set. On note enfin des influences jazz, reggae, dub moins marquées mais non moins présentes. Certaines chansons ont un style très reggae, quand le chanteur chante avec sa voix Peace and Love et que les rythmiques se ralentissent et deviennent plus percutantes, plus puissantes. D'autres titres, dont le tempo est effréné et l'atmosphère inquiétante, puisent dans la dub et l'électro ultra rapide.
Ils ont interprété en majorité des titres de leur second opus, "Racing with the sun", sorti en Avril dernier. Vers la fin du concert ils ont aussi joué la génialissime chanson "I've got that tune", leur plus connue, qui mêle admirablement Trip-hop et Jazz, dans l'euphorie la plus totale. On ressort trempé, ça a frotté sévère. Aux premiers rangs les spectateurs étaient très remuants, ce fut une belle fête! Totalement lessivés par ces deux heures de trip-hop intenses on n'assistera pas au Dj set assuré il me semble par deux membres de Chinese man. Je recommande à tout amateur de concert de les voir en live car leur musique est réellement compatible avec la scène. Ils savent mettre l'ambiance comme on dit. Si vous n'aimez pas la sueur, la chaleur et le frotti-frotta, passez votre chemin.


Mercredi 27 Avril



Grosse blague à la Gaîté. 

La facade de la la Gaité Lyrique



 Samedi dernier, alors à la recherche d'un concert digne de ce nom à aller voir à Paris, on tombe avec un pote sur une annonce pour une soirée électro/hip-hop à la Gaité Lyrique, salle fraichement rénovée et réouverte au public depuis peu sous un aspect révolutionnaire. Cette programmation nous séduit immédiatement, pour deux raisons. Tout d'abord pour découvrir cette fameuse salle et ensuite car nous sommes tous deux férus de musiques électroniques et de Hip-Hop, surtout en live.

Vu de l'extérieur la Gaité Lyrique s'apparente à un vieux théâtre d'époque bourré de charme. A peine rentré à l'intérieur de ce lieu dédié aux "révolutions numériques', le contraste est saisissant. La décoration générale du bâtiment qui s'étend sur 4 niveaux est résolument moderne, classe et originale, avec de nombreux clins d'œil au monde numérique. On aperçoit tout au long de notre petite balade des écrans affichant des courts métrages expérimentaux, des lustres dignes des plus grands films de science fiction ainsi que de nombreuses œuvres "digitales". Les murs sont quand à eux d'un gris métallisé révolutionnaire. Le bar est également tourné vers l'avenir tout en restant ancré dans la tradition, puisqu'il se compose d'un plafond orné de peintures classiques alors que les sièges sont des blocs asymétriques de petits cubes fluorescents disposés les uns sur les autres de manière anarchique. Le design de la Gaité, en accord avec notre époque qui est celle des révolutions numériques, a clairement répondu à mes attentes.
Le bar de la Gaité Lyrique
Après avoir descendu une pinte plus vite que prévu en raison d'une interdiction de boire dans la grande salle, je me dirige à présent vers le concert, impatient de voir les prestations scéniques se déroulant dans cette espace non conventionnel.
         La grande salle de la Gaité ne m'impressionne pas plus que ça, la décoration se rapprochant plus ou moins de celle de salles plus conventionnelles. Les architectes ont été moins inspirés quand il a fallu donner à cette salle l'aspect post-moderne imposé par le cahier des charges. La deuxième déception réside dans la disposition de la salle samedi soir, toute de sièges et de gradins vêtue. Le public restera donc assis durant 2h devant un concert electro/hip-hop... 
La première partie est un collectif de musiciens rassemblés autour d'influences Jazz, Hip-Hop et électro. Le combo est atypique, puisque deux artistes seulement sont présents sur scène, le batteur et le pianiste/bidouilleur aux machines alors que le reste des musiciens s'est enregistré en vidéo, vidéos qui seront intégrées à certaines des pièces musicales. Les premiers morceaux, planants et très expérimentaux sont à mettre au crédit des deux musiciens présents sur la scène de la gaité. Certaines de ces pièces envoutantes sont jalonnées de solos de batterie dantesques. La seconde moitié de leurs morceaux, beaucoup plus portée sur le groove, intègre les interventions préenregistrées en vidéo du reste de la bande. Ce sont pour la plupart des cuivres, saxophones, trompettes et autres trombones. Cette partie est particulièrement novatrice : par moment les deux musiciens sur scène et les cuivres de la vidéo se répondent, ce qui donne des pièces très originales. Mais le plus impressionnant reste les impros du batteur sur des extraits vidéos de quelques secondes où l'on voit les musiciens se présenter, extraits qui sont répétés en boucle une dizaine de fois ce qui finit par imprimer une rythmique syncopé, ravissant une grande partie du public. Plus les musiciens se présentent de façon musicale, plus l'impro est réussie. (Yeah, me it's Franck from New York/Yeah me it's Frank from new york/....) Le piano quant à lui reproduit toutes les notes correspondant aux sons sortis de la bouche de ses acolytes en vidéos lors de leur présentation. Cette première partie qui dura 30 bonnes minutes fut pour moi une révélation puisque je n'avais jamais rien vu de tel. Un spectacle conforme à l'identité du lieu, alliant remarquablement musique et progrès numériques. Seul bémol, la disposition de la salle avec des sièges qui empêche tout le monde de danser. Impossible de se lâcher, le public reste éteint, les applaudissements faibles. Une catastrophe à ce niveau la. Et ce n'est malheureusement pas la dernière.
 Dj Spooky, tête affiche Hip-hop/électro arrive sur scène vers 21h, sous les acclamations du public impatient d'admirer la prestation de l'artiste. Que la fête commence enfin, envoie du lourd spook!
L'artiste, seul aux platines, à l'air d'être un mec simple et super cool. En revanche il s'avère rapidement que sa musique l'est moins. Les deux premiers morceaux sont assez étranges, l'artiste mixant de temps à autre sur des rythmiques de jazz trop rapides qui rendent impossible toute gesticulation de ma part. Aucune influence hip-hop n'est visible dans ses morceaux à mon grand étonnement. Le hip-hop/électro annoncé n'est clairement pas au rendez vous. Sa musique incohérente ne ressemble pas vraiment à de l'électro mais plutôt à un assemblage de pièces musicales inachevées qui mélangent tout et n'importe quoi. Je concède néanmoins que certains passages ravissent mes oreilles mais dans l'ensemble je suis très contrarié, avachi au fond de mon siège. De plus l'oeuvre purement musicale du dj est reléguée au second plan puisque des collages vidéos réalisés par le dj sont diffusés en continu sur un immense écran de projection mural qui mobilise toute notre attention. Pendant une bonne heure je suis donc contraint de visionner des vidéos sur l'histoire du situationnisme, l'épopée Stax, la lutte des noirs Américains... Car DJ Spooky est un artiste engagé, dans de multiples causes dont la lutte pour l'égalité des noirs. Je le respecte et suis moi même touché par toutes ces histoires mais le moment est mal choisi pour afficher ostensiblement ses opinions politiques. Quel genre de Dj est-il? Les spectateurs sont venus pour s'éclater en écoutant de la musique électro, pas pour assister au congrès d'un fan de Malcolm X. A la vue de sa prestation très marquée par la politique de nombreux spectateurs s'en vont. Parmi eux 2 skinheads qui quittent la salle très énervés en insultant l'artiste. Heureusement il ne se produisit aucun débordement. Après avoir fini sa piètre prestation l'Américain nous donne rendez-vous pour son concert du lendemain durant lequel il se produira avec des musiciens de Jazz... Cette annonce me laisse pantois. Ce concert n'était que le premier acte d'un concert qui se déroule en deux temps! Le vrai concert se déroulait donc le Dimanche, précision déterminante qui n'avait pas été explicité sur le site de la Gaité Lyrique. Nous avions bien vu les deux dates mais tout portait à croire qu'il s'agissait du même concert. Nous sortons de la salle désabusé, frustré, enragé, dépité, déconcerté...Une grosse blague.




 Dimanche 17 avril



1er Avril agité à la Cigale.


C'est l'un des poissons d'Avril les plus drôles que j'ai jamais vu. En effet depuis quelques semaines j'aperçois dans le métro parisien des affiches annonçant un concert de Beat Torrent le premier Avril à la cigale. Vous avez aussi bien compris que moi, B-T en live à Panam c'est trop beau pour être vrai et la date me conforte dans l'idée que c'est encore une de ces vastes campagnes de désinformation massive si récurrente en cette période de l'année. Ils sont quand même cyniques à la RATP, ils nous font saliver en nous faisant croire qu'un des meilleurs combos électro Français va venir foutre le feu dans le 75 et dans le même temps ils ajoutent dans un coin de l'affiche que la date de la soirée est fixée au premier Avril pour bien nous faire comprendre que c'est une grosse blague. En allant voir sur Internet je me rends compte à ma grande surprise qu'une billetterie à même était mise en place pour l'évènement! Ils poussent quand même la farce très très loin! Après avoir murement réfléchi je prends finalement ma place pour le faux-concert de Beat-Torrent en me disant que je pourrais passer un bon moment d'humour.
Le Vendredi 1er Avril à 19h, après avoir rangé mon vélib dans les environs de Pigalle je me dirige vers la Cigale. Je suis surpris en arrivant devant la salle à la vue de l'immense queue qui monopolise tout le trottoir sur au moins 100m. Les parisiens sont décidément bien facile à embobiner.
Après une heure d'attente je rentre enfin à l'intérieur de la cigale. Je commande une bière au bar et je me dirige vers la salle de concert. L'esthétique de la salle est magnifique : comme au Bataclan, des barrières en bois sont disposés de chaque côté de la petite fosse. La salle se compose d'un magnifique balcon qui surplombe la scène. C'est un format de salle qui me convient parfaitement, à mi chemin entre les salles type "Zénith" bien trop grandes à mon goût et les plus petites salles comme la maroquinerie qui sont plus intimistes. J'attends alors avec impatience de voir comment ce vrai-faux concert de Beat Torrent va se dérouler.
La vraie-fausse première partie est assurée par deux Belges qui font du Beat-Box. L'un des deux est d'ailleurs champion de Belgique en la matière. Ils jouent chacun leur tour puis se mettent ensuite ensemble, créant des rythmiques bien violentes qui anesthésient le cerveau. Ils sont très impressionnants, reproduisant avec comme seul instrument leur bouche plusieurs mélodies en même temps. Ils produisent une musique à la lisière entre le rap et l'électro très agréable à l'écoute et qui chauffe merveilleusement bien la salle avant la suite de la soirée. Ils quittent la scène sous les acclamations du public. C'est maintenant pour moi le moment fatidique. Les prochains à venir sur scène seront-ils réellement les Beat-Torrent, en ce premier Avril?
Contre toute attente, le véritable "crew" Beat Torrent arrive sur la scène de la Cigale, sous un tonnerre de hurlements! C'est donc un poisson d'Avril à l'envers : j'ai cru à la farce alors que le concert annoncé était bien réel! Ces poissons d'Avril là sont bien plus drôles, je suis désormais euphorique à l'idée d'assister au concert de Beat Torrent, un des mes groupes préférés en matière d'électro.
Notre professeur de Bordel, j'ai nommé Dj Atom nous demande de faire "un maximum de bruit". Ca change des "silence!" entendus toute la semaine à la fac'.






Vendredi 15 Avril



Soirée Jazz Indé' en eaux profondes.



C'est en effet dans la toute nouvelle salle de Musiques actuelles baptisée "la sirène" que se déroulait hier soir le concert du quartet Jazz d'Erik Truffaz, encensé par une bonne partie de la presse musicale et pas des moindres puisqu'il est le chouchou de Télérama et des Inrocks'. Cette soirée Jazz fut l'occasion pour moi de visiter ce nouveau haut lieu de la musique Rochelaise pour la première fois.

Après quelques bornes parcourues dans les faubourgs Rochelais, j'arrive enfin devant la fameuse salle, ornée d'un chapiteau. Le quartier en lui même n'est pas très accueillant mais qu'importe on a enfin une salle de musique digne de ce nom, capable d'afficher une "grosse" programmation.
On trouve dans ce tout nouvel espace un disquaire qui vend surtout des vinyles mais aussi quelques bouquins(Littérature Beatnik, poésie..), des studios d'enregistrement, un bar ainsi que deux salles de concerts. Une salle pour les petits concerts, dans le grand hall qui contient également le bar de la sirène, ainsi qu'une plus grande salle pour les têtes d'affiche située au premier étage. Les deux artistes qui se produisaient hier soir devaient donc en être puisque le concert se déroulait dans la grande salle.
Il est 20h50 : après quelques demis enquillés et avec un gobelet "la sirène" dans la main, je me dirige avec un pote vers le concert, qui vient de débuter. Chocolate Génius, un groupe venant de New York emmené par un leader-chanteur-guitariste black assure la première partie. Accompagné par une contrebassiste toute jeune, un gratteux mi figues mi raisins, un batteur à fond dans son concert et un pianiste à côté de la plaque, C-G n'accomplit pas de miracles. Sa voix, tantôt éraillé tantôt claire, réussit néanmoins à procurer de temps à autre quelques frissons. Les paroles sont un peu simplistes, notamment sur la chanson intitulé "Love". Du déjà vu. En définitif ce sont de bons musiciens qui jouent du Pop-Rock parfois teinté de blues ou de folk mais gâché par un chanteur qui dégage trop d'influences pop. Le public n'est d'ailleurs pas très réceptif malgré de nombreuses tentatives d'approche du chanteur qui est très à l'aise sur scène. Il offre par exemple une fleur et un verre de cabernet à un spectateur du premier rang qui siffle le vin en quelques secondes pour ensuite le rendre au master C-G.
C'est ensuite au tour d'Erik Truffaz, tête d'affiche d'un soir, grand professionnel, musicien exigeant, défricheur et très sobre côté fringues. Son quartet est atypique et plutôt moderne en matière de jazz puisqu'il se compose d'une basse électrique, d'un Piano Fender Rhodes et d'un batteur, avec donc Truffaz en leader à la trompette. Des gadgets électroniques gérés de temps à autre par notre ami trompettiste viennent compléter ce quartet.
Dès les premières notes je suis transporté par les sonorités orientales et feutrées qui se dégagent lors des envolées sonores de la trompette de Truffaz qui oriente son instrument vers le ciel. La musique qu'ils produisent est clairement du Jazz mais elle défriche de nombreux autres horizons musicaux se rapprochant alors d'un style Nu-jazz. La partie rythmique composée par le Bassiste Marcello Giuliani et le batteur Marc Erbetta évoque le Trip-Hop, la Drum'n'bass alors que les sonorités émises par le piano et la trompette font référence au Jazz. Certains morceaux sont très funky sous l'influence du duo Basse-Batterie, et là ca groove!! D'autres sont plus jazzy, notamment lors des solos du pianiste qui est très à son avantage sur son Fender Rhodes. Il nous gratifiera lors d'un des derniers morceaux d'un monumental solo de deux-trois minutes faisant suite à 5 minutes de Jazz-Funk d'anthologie.
Une bonne moitié des titres interprétés reste assez expérimentale, calme et envoutante, avec des envolées de trompette qui nous clouent sur place. Parmi ces titres plus expérimentaux certains me font penser à Portishead, à la musique Trip-Hop et impriment une ambiance planante, parfois psyché. Les spectateurs réagissent de deux manières différentes : certains sont ensorcelés et restent stoiques, d'autres sont soudainement épris d'une bougeotte compulsive(dédicace à l'étudiant à lunettes du premier rang). D'autres originalités sont à mettre au crédit de ce combo comme l'utilisation de la Wah-Wah par le trompettiste ou les expérimentations vocales complétement délirantes du batteur (Beat-Box avec une voix d'extraterrestre). C'est dire la diversité et la complexité qui caractérisent ce quartet de Jazz instrumental.
Erik Truffaz est un type bien, sensible et mélomane, mais timide comme on peut le voir lors de ses interventions. Je préfère ça qu'un musicien à l'aise qui ne dégage rien. Durant 2 heures je suis captivé par leur musique, en extase lors des passages funky, dont les ondes groovy me traversent le corps comme des électrochocs. Finalement Truffaz et ses acolytes quittent la scène vers 00h15 sous les acclamations d'une salle néanmoins clairsemée. A noter une forte majorité de plus de 30 ans présente hier soir. A croire que les jeunes sont moins attirés par ce genre de musique.
En tout cas une très bonne surprise, tant au niveau de la salle que je n'avais jamais vu qu'au niveau de la musique, qui a réellement ravi mes deux oreilles.

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